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Liban

Khiam : la foule libère la prison<br>

Des centaines de civils libanais ont pris d'assaut, mardi 23 mai, la prison de Khiam, l'un des symboles de l'occupation israélienne au Liban Sud, libérant près de 150 détenus.
Il sont plus de cinq cents, sans armes, rassemblés au bas de la colline où se tient la prison de Khiam. Des villageois et des familles de détenus qui scandent «Dieu est grand!» et lèvent le poing en s'engageant vers l'entrée de la prison. Au même moment, les gardiens en sortent. Dans un mouvement de sauve-qui-peut général, ils dévalent la route à bord d'une quarantaine de véhicules. Le convoi est stoppé par la foule compacte qui s'en prend aux voitures, obligeant les gardiens à tirer en l'air pour se dégager. Ces derniers, pour la plupart des miliciens de l'Armée du Liban Sud (ALS, pro-israélienne), parviennent à s'extraire et prennent la fuite vers la frontière israélienne.

Les habitants se précipitent vers la prison, renversent les barbelés, pénètrent dans le bâtiment et forcent les portes des cellules avec des moyens de fortune, des pierres, des bâtons, des barreaux arrachés aux fenêtres. Par petits groupes, les prisonniers sortent, aveuglés par la lumière, n'osant pas croire qu'ils sont enfin libres. Dans une ambiance mêlant la liesse et l'émotion, certains retrouvent leurs proches après plus de quinze ans de détention sans jugement. Parmi les 145 prisonniers libérés, des figures comme Cosette Ibrahim, une journaliste chrétienne de 24 ans accusée d'espionnage au profit des combattants libanais. Soutenue par Reporters sans frontières, elle était détenue à Khiam depuis 9 mois. La libération des prisonniers est «une grande victoire pour moi et pour la résistance» déclare de son côté Souha Béchara, une autre détenue célèbre. Agée de 33 ans, elle a passé 10 ans à Khiam, de 1988 à 1998, pour avoir tenté d'assassiner le général Lahad, chef de l'ALS.

La chute de cette prison marque la fin d'une époque. Khiam était l'un des principaux symboles d'une occupation israélienne marquée par des emprisonnements arbitraires et des mauvais traitements. Qualifié par les libanais de "camp de concentration", la prison de Khiam était, selon les organisations de défense des droits de l'Homme, un centre de torture où des officiers israéliens procédaient aux interrogatoires.




par Philippe  Quillerier-Lesieur

Article publié le 24/05/2000