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Zimbabwe

Mugabe «souhaite» la fin des occupations de terres<br>

Alors que le pays était paralysé mercredi par une grève générale, le président zimbabwéen a annoncé la fin prochaine des occupations illégales de fermes blanches. Robert Mugabe s'est engagé a réinstaller les anciens combattants et autres squatters sur des propriétés acquises par le gouvernement, d'ici la fin du mois d'aoûtà Avant de revenir partiellement sur ses déclarations.
La grave crise que traverse le Zimbabwe depuis le début des occupations de fermes blanches, à la fin du mois de février, pourrait connaître un début de solution. C'est du moins ce qui ressort des propos du président Mugabe lors d'une conférence de presse, mercredi, à l'issue d'entretiens avec son homologue sud-africain Thabo Mbeki. Interrogé par la correspondante régionale de RFI, Farida Ayari, il a réitéré sa décision de mettre en £uvre la réforme agraire promise depuis plusieurs mois. Mais il s'est surtout engagé à mettre fin aux occupations illégales de fermes. "Les fermes qui accueilleront ces nouveaux propriétaires seront les seules, je dis bien les seules, où devraient se trouver les actuels occupants illégaux. Les autres fermes devront rester vacantes, a-t-il déclaré. En d'autres termes, au cours de ce processus, nous seront amenés à déloger les occupants des terres qui ne font pas partie de la redistribution". Le chef de l'Etat zimbabwéen a même affirmé que les opérations seront terminées "d'ici un mois".

Ces déclarations, reprises dans des termes similaires par le quotidien gouvernemental The Herald, ont été diversement appréciées, par les fermiers blancs comme par les " vétérans ". Les premiers, qui ont saisi mercredi la Haute cour de justice pour contester la manière dont le pouvoir actuel gère la question de la terre, ne peuvent que s'inquiéter du délai extrêmement court fixé par le chef de l'Etat. Quant aux seconds, ils ont jusqu'à maintenant refusé d'évacuer les propriétés qu'ils occupent.

Il reste que si Robert Mugabe tient parole, la plus grave crise qu'a connu l'ex-Rhodésie depuis l'avènement au pouvoir de la majorité noire en 1980 pourrait trouver un début de solution, même si elle est loin d'être conforme aux v£ux du principal parti d'opposition, le Mouvement pour le changement démocratique (MDC), comme des fermiers blancs. Depuis la fin du mois de février, plus de 1 500 grandes exploitations agricoles ont été occupées par des vétérans plus ou moins avérés de la guerre d'indépendance. Le mouvement, appuyé en sous-main par un pouvoir en mal de popularité, s'est soldé par au moins quatre morts parmi les fermiers d'origine européenne et trois parmi leurs employés noirs. Mais il a aussi plongé l'économie en grande partie agricole de ce pays d'Afrique australe dans une récession aux répercussions régionales, en particulier côté sud-africain.

Un discours plus mesuré

Depuis la victoire étroite de la ZANU-PF au pouvoir, aux élections législatives des 24 et 25 juin derniers, le président zimbabwéen a sensiblement infléchit sa position. Son soutien affiché aux vétérans, dirigé par le controversé Chenjerai " Hitler " Hunzvi, et ses diatribes contre la communauté blanche pendant la campagne ont fait place à un discours plus mesuré. Tout en appelant toujours à la poursuite d'une redistribution foncière promise depuis de longues années, Robert Mugabe répète désormais qu'elle doit se dérouler dans la légalité.

Mais jusqu'à présent, les occupations de fermes blanches et les intimidations contre les ouvriers agricoles se sont poursuivies. Au point que le puissant Congrès des syndicats du Zimbabwe (ZCTU), dirigé par le président du MDC Morgan Tsvangirai, a organisé ce mercredi une grève générale, largement suivie, avec le soutien du CFU, le syndicat des fermiers blancs, et plusieurs organisations de défense des droits civiques.

Dans un tel contexte, l'annonce de Robert Mugabe a été analysée sur place comme un message destiné à calmer le jeu et à rassurer ses partenaires extérieurs. Harare est en effet soumis à une forte pression, en particulier de l'Afrique du Sud, dont la monnaie à fortement chuté depuis le début de la crise des terres. C'est d'ailleurs en sortant d'une réunion avec Thabo Mbeki que s'est exprimé le vieux chef de l'Etat. Dès jeudi toutefois, ce dernier est revenu partiellement sur ses propos de la veille, lors d'une rencontre avec des représentants du syndicat des fermiers noirs, et son porte-parole a précisé qu'il s'était contenté d'exprimer un " souhait " et non un engagement ferme. Adepte du double discours, pratique qui lui a valu la réputation de ne pas tenir ses promesses, Robert Mugabe devra donc, faute d'être cru sur parole, être jugé sur les actes.



par Christophe  Champin

Article publié le 03/08/2000