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Côte d''Ivoire

L'attaque contre la résidence du général Gueï

L'attaque contre la résidence du général Gueï, chef de la junte ivoirienne, repoussée dans la nuit de dimanche 17 à lundi 18 a fait au moins deux morts parmi les force loyalistes. L'identité des assaillants n'était pas encore connue dans la matinée. Mais le porte-parole du pouvoir a accusé, à mots à peine couverts, l'opposant Alassane Ouattara d'en être le commanditaire.
La résidence du chef de la junte ivoirienne a été dévastée par l'assaut mené dans la nuit du 17 au 18 septembre par une vingtaine d'hommes armés. Les murs de la villa, située dans le quartier huppé de l'Indénié, tout près du centre d'Abidjan, sont criblés de balles et selon l'AFP un véhicule blindé s'y est même encastré. Vers trois heures du matin, des tirs qui ont réveillé tout le centre ville ont été entendus autour de la résidence. Selon le correspondant de RFI sur place Bruno Minas, des forces loyalistes et des gendarmes ont repoussé l'assaut, après deux heures d'affrontements. Le chef de la junte, qui se trouvait dans sa villa au moment de l'attaque, autour de 03 h 00 (GMT), a pu être évacué sain et sauf.

La vie a repris son cours normal depuis dans la capitale économique ivoirienne, où les coups de feu ont cessé dès le début de la matinée. Seul le quartier de l'Indénié a été bouclé. Selon des sources militaires, il devait être entièrement fouillé pour débusquer les assaillants qui se seraient éventuellement cachés dans les environs après avoir abandonné leurs armes.

Les « commanditaires »

L'identité des auteurs de l'attaque n'est pas encore clairement déterminée. A la mi-journée, la télévision nationale a montré les images de trois soldats suspects, le visage tuméfié, niant toute responsabilité dans l'assaut. Des sources citées par l'AFP évoquent des jeunes soldats mécontents de la candidature du général Gueï, qu'ils accusent notamment d'avoir trahi sa promesse initiale de ne pas se présenter à la présidentielle. En intervenant devant la presse, au cours de la journée, ce dernier a affirmé qu'il «ne visait personne» à propos des commanditaires. Il a néanmoins précisé qu'il avait été averti de rumeurs sur la préparation d'une tentative d'assassinat contre sa personne. «Nous avions des informations selon lesquelles quelques jeunes militaires avaient été plus ou moins invitées par certaines personnes qui nous sont inconnues pour porter atteinte à ma vie», a-t-il affirmé.

En début de matinée, le porte-parole de la junte, le capitaine de frégate Henri Damalan Sama avait fait clairement allusion à l'ancien premier ministre d'Houphouët-Boigny Alassane Ouattara, dont la candidature est au c£ur d'une vaste polémique depuis de longs mois. Dans la soirée du vendredi 15 septembre, une rumeur d'arrestation de l'opposant avait entraîné un rassemblement d'une centaine de ses partisans devant sa résidence du quartier chic de Cocody. A ce propos, le capitaine Sama a évoqué les «commanditaires qui sont tapis dans l'ombreà» et les a surtout accusés de «distiller certaines rumeurs faisant croire à leur arrestation depuis quelques jours». Il a par ailleurs averti que la junte «frappera fort» et ne «laissera pas l'occasion passer». Au RDR, le parti d'Alassane Ouattara, Aly Coulibaly, on dément catégoriquement des «accusations sans fondements». >«Chaque fois que ce régime est confronté à des difficultés réelles ou supposées le RDR est désigné», a déclaré le porte-parole du mouvement parti, Aly Coulibaly.

La veille de l'attaque, Robert Gueï avait violemment attaqué l'ancien premier ministre lui enjoignant de renoncer à toute tentative de déstabilisation, après que celui-ci l'eut accusé d'avoir mis en place une dictature. Dans les jours précédent, la tension entre la junte ivoirienne et le leader du RDR était déjà montée d'un cran avec la sortie des avocats du Conseil national de salut public (CNSP) qui avaient présenté de nouveaux documents censés prouver sa «non-ivoirité».

Ce nouveau soubresaut de la difficile transition engagée le 24 décembre 1999 intervient dans un contexte tendu, en raison notamment de l'incertitude sur l'identité des personnalités admises à se présenter à la magistrature suprême. La chambre constitutionnelle, chargée de valider les candidatures, doit en rendre publique la liste définitive au plus tard le 7 octobre prochain. Et beaucoup d'observateurs craignent qu'une éventuelle exclusion d'Alassane Ouattara de la course ne provoque des troubles dans le pays.




par Christophe CHAMPIN  avec Bruno MINAS à Abidjan

Article publié le 18/09/2000