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Côte d''Ivoire

«Non à l'ingérence de l'OUA»

« La Côte d'Ivoire aux Ivoiriens », « Non à l'ingérence », « Non au diktat de l'OUA ». Des milliers d'Ivoiriens ont manifesté jeudi 28 septembre dans les rues d'Abidjan pour protester contre les propositions faites par le Comité des 10 de l'OUA, dans le but de faire baisser la tension dans un pays en « révolution permanente » depuis le putsch des mutins de Noël 1999.
Organisée par des associations et des syndicats, avec l'appui discret main bien réel du régime de Robert Gueï, cette démonstration de force des partisans du pouvoir visait à rappeler que la Constitution adoptée lors du référendum de juillet dernier par 86% des Ivoiriens était désormais leur référence unique et ne pouvait donc être mise en cause - ni entre parenthèses - par l'Organisation de l'unité africaine. Celle-ci avait dépêché sur place une importante délégation de chefs d'Etat, tous préoccupés au plus haut point par le climat qui règne en Côte d'Ivoire, mais aussi par les répercussions que leurs propres pays pourraient en subir.

L'instabilité qui prévaut actuellement a été une nouvelle fois illustrée récemment par l'attaque lancée par des militaires contre la résidence de Robert Gueï. Une attaque qui a été attribuée par le régime à deux anciens compagnons de route du général Gueï : les généraux Palenfo et Coulibaly, tous deux actuellement en fuite. La mission du Comité des 10 de l'OUA n'a apparemment pas dissipé la tension, même si le général Gueï a tenu à préciser, mercredi matin : « aucun des chefs d'Etat n'est venu pour imposer quoi que ce soit » à la Côte d'Ivoire. Un message qui n'a été guère entendu par les jeunes qui ont manifesté le lendemain dans les rues du « Plateau », le quartier administratif de la capitale économique, en dénonçant « le complot international » et notamment « les Mossi » , l'ethnie majoritaire du Burkina Faso, dont est originaire la plupart des étrangers présents en Côte d'Ivoire.

La Constitution comme seul repère pour les Ivoiriens

Cette marche ne peut que conforter le général-président Gueï, au moment où il a visiblement du mal à contrôler la situation (y compris dans les rangs de son armée) car elle a clairement
repoussé les propositions de l'OUA, à savoir : création d'un « conseil de transition » de dix-huit mois présidé par Gueï et co-présidé par les leaders politiques, organisation d'élections législatives avant la présidentielle et autorisation à tous les candidats - y compris Alassane Ouattara - de participer à celle-ci. Des propositions quelque peu naïves, car elles remettaient en cause le seul acquis de cette « révolution » : une constitution adoptée par plus de trois quarts d'Ivoiriens et qui reste l'un des rares repères actuels, car elle a été acceptée par la quasi totalité de la classe politique.

De plus, la tenue d'élections législatives avant la présidentielle a sans doute déplu au général Gueï, seul parmi les candidats à la plus haute charge à ne pas disposer d'un véritable parti implanté partout dans le pays. Enfin, l'éventuelle mise en place d'un « conseil de transition » selon le schéma traditionnel des gouvernements provisoires d'unité nationale aurait nécessairement impliqué le « suicide » politique du CNSP, le Comité militaire au pouvoir depuis Noël 1999, et donc du général-président lui-même. Un geste que Gueï ne pouvait accepter, et ce d'autant plus qu'il était proposé par des « frères » africains qui - à commencer par Gnassingbé Eyadéma et Blaise Compaoré - sont eux aussi des militaires, et sont arrivés au pouvoir après avoir assassiné leurs prédécesseurs. Ce que n'a pas fait Robert Gueï.





par Elio  Comarin

Article publié le 05/10/2000