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Sécurité alimentaire

A son tour, l'Allemagne

Après la découverte d'un premier cas de «vache folle», l'Allemagne est saisie d'un vent de panique. Le chancelier Schröder appelle à une action européenne.
De notre correspondant à Berlin

Comme le nuage radioactif de Tchernobyl qui s'était arrêté à la frontière franco-allemande « épargnant » la France, l'Allemagne se considérait, jusqu'à la fin de la semaine dernière, miraculeusement protégée de la maladie de la vache folle.
Le 10 juillet dernier, Berlin qualifiait de « totalement inacceptable » la proposition de Bruxelles de classer l'Allemagne parmi les pays à risques. La semaine dernière encore, le ministre de l'agriculture Karl-Heinz Funke déclarait sûr de lui : « Les consommateurs peuvent continuer à manger sans crainte de la viande de b£uf ». Pourtant depuis des années, la Commission européenne et les experts se montraient plus prudents jugeant que l'Allemagne n'était pas à l'abri.

Ils ont malheureusement eu raison. Vendredi dernier, les deux premiers cas d'ESB allemands étaient annoncés. Depuis, un vent de panique souffle sur le pays. La presse populaire fait ses gros titres sur la maladie se demandant comme le quotidien Bild Zeitung, « Que pouvons-nous encore manger ? » Les services d'information téléphoniques pour les consommateurs mis en place par les pouvoirs publics sont pris d'assaut. Les mêmes questions reviennent sans cesse : Peut-on encore manger du b£uf ? Quels sont les risques pour les autres viandes ? Les journaux publient des conseils pratiques à longueur de page. A ceux qui ne veulent pas renoncer au b£uf, ils conseillent d'acheter de la viande bio ou du steak argentin, plus chers mais aussi plus sûrs.

Le parlement bat des records de rapidité

Les conséquences pour le marché n'ont pas tardé à se faire sentir. La consommation a baissé de 30% à 50%. Les files d'attente devant les rayons viande des supermarchés ont disparu. Restaurants et cantines ont souvent rayé le b£uf de leurs cartes. D'après un sondage, un tiers des Allemands préfèrent renoncer au goulash et aux steaks. Et il n'est pas exclu que la crise de confiance ne s'étende aux autres viandes. De nombreux abattoirs ont dû mettre leur personnel au chômage technique. Un syndicat parle de 10 000 emplois menacés par la crise.

Les pouvoirs publics ont dû réagir rapidement. Le parlement allemand bat des records de rapidité. Une loi devrait entrer en vigueur samedi et interdire la production, l'importation et l'exportation de farines animales. Depuis 1994, elles ne pouvaient plus servir à l'alimentation des bovins. L'interdiction est aujourd'hui étendue aux autres animaux. Tout contrevenant sera puni d'une amende de 180.000 francs. L'Allemagne veut aussi généraliser avant le 1er juillet prochain ûdélai fixé par l'Union européenne- les tests rapides anti-BSE pour tous les bovins de plus de 30 mois.

Ces mesures suffiront-elles à calmer les esprits ? On peut en douter. Les deux vaches frappées par la maladie sont nées après 1994 et n'ont, en principe, pas consommé de farines animales jugées responsables de la transmission de l'ESB. Le doute reste donc entier. Et la crise de confiance des Allemands promet d'être durable : 82% d'entre eux pensent que leur gouvernement ne fait pas assez pour lutter contre la maladie de la vache folle.



par Pascal  THIBAUT

Article publié le 29/11/2000