Côte d''Ivoire
Des législatives sous haute tension
Les Ivoiriens se rendent une nouvelle fois aux urnes, dimanche 10 décembre, mais on s'achemine vers un report des législatives dans le Nord musulman, en raison des incidents violents qui se multiplient dans cette partie du pays. Le ministre de l'Intérieur exclut toutefois de retarder l'ensemble d'un scrutin test pour le président nouvellement élu Laurent Gbagbo comme pour l'ancienne majorité (PDCI).
La situation s'est considérablement dégradée ces dernières quarante-huit heures dans le Nord du pays, fief du RDR d'Alassane Ouattara. Les habitants de Kong, le village où il devait se présenter, ont chassé le sous-préfet et d'autres incidents ont eu lieu ailleurs. Quatre gendarmes et trois policiers auraient été blessés par balle dans la nuit de jeudi à vendredi, à Tengrela, dans l'extrême Nord, par des manifestants qui ont incendié la préfecture et la gendarmerie. Le domicile d'un policier aurait par ailleurs été saccagé et sa femme violée, rapporte le préfet, cité par l'AFP. A Korhogo, capitale du Nord, où certains n'hésitent pas à parler de sécession, des affrontements entre militants du RDR et forces de l'ordre ont fait trois morts mardi. Des attaques contre la préfecture et la sous-préfecture de Boundiali ont par ailleurs fait un mort, ce qui, selon un représentant local de la Commission nationale électorale, pourrait empêcher les opérations de vote de s'y dérouler.
Mais Laurent Gbagbo reste ferme : «Les élections auront lieu comme prévu le 10 décembre», déclare-t-il dans une interview au quotidien français le Figaro, ce vendredi. En milieu de journée, le ministre de l'Intérieur Emile Boga Doudou a enfoncé le clou, mais il a évoqué la possibilité que «dans telle ou telle circonscription, sur recommandation du préfet, le scrutin soit reporté». Cette éventualité a été envisagée dans les négociations directes, menées par le président ivoirien et des responsables du RDR, malgré les violences de ces derniers jours. De source bien informée, on indique qu'un report partiel pourrait même servir à «remettre à plat» le cas Ouattara.
«J'ai besoin d'un parlement pour légiférer»
Perçue à l'extérieur comme un entêtement, la tenue des élections législatives dans les délais est en tous cas considérée à Abidjan comme une nécessité. «J'ai fait campagne avec des promesses. J'ai besoin d'un parlement pour légiférer», a expliqué Laurent Gbagbo. Mais ce qui devait être un test pour la démocratie ivoirienne se présente désormais comme une épreuve à haut risque pour le chef de l'Etat ivoirien : l'échec de sa stratégie pourrait être fatale à la reprise de l'aide extérieure à un pays en pleine banqueroute. Car les bailleurs de fonds ont fait du bon déroulement et de la transparence du scrutin du 10 décembre une condition de leur soutien au nouveau pouvoir.
Avec ou sans le RDR, le scrutin s'annonce difficile pour le Front populaire ivoirien autant que pour l'ancien parti unique d'Houphouët-Boigny, le PDCI, qui disposait d'une large majorité au lendemain des législatives de 1995. Le parti de Laurent Gbagbo (24% et 13 sièges en 1995), s'il est assuré de faire le plein des voix dans son fief traditionnel de l'ouest du pays et devrait faire un bon score à Abidjan, il aura plus de mal à gagner des sièges ailleurs.
De son côté le PDCI pourrait profiter du boycott du RDR (12% et 13 sièges en 1995), dans le nord du pays. Mais le parti du « Vieux » est profondément divisé et sort d'une crise majeure provoquée d'abord par la chute de son président, Henri Konan Bédié, et ensuite par la candidature du général Gueï aux présidentielles de novembre. Peu sensible à la culture d'opposition, des dizaines de députés du PDCI avaient alors rallié le général putschiste. Alors que le secrétaire général Laurent Dona Fologo prônait l'abstention. A la veille du scrutin de dimanche, le PDCI - qui disposait de 145 des 175 sièges dans l'Assemblée dissoute en décembre dernier par le général Gueï - est de facto un allié du président Gbagbo, sinon du FPI : quatre ministres issus du PDCI siègent actuellement au gouvernement et l'ancien président Bédié n'est plus menacé de poursuites judiciaires. L'ancien président pourrait même rentrer au pays dès le début de l'année prochaine, Laurent Gbagbo s'étant engagé à faciliter son retour, en cas de victoire. Enfin le PDCI compte toujours des caciques bien implantés localement, qui pourraient assurer à l'ancien parti unique un score honorable, même s'il sera nécessairement réduit par rapport à 1995.
En l'absence de sondages officiels, on s'attend généralement à ce que le FPI et le PDCI fassent presque jeu égal, et s'assurent chacun environ un tiers des députés de la prochaine Assemblée nationale. Reste la question principale : le dernier tiers des sièges va-t-il être gagné par des candidats du RDR, si celui-ci décide finalement de participer au scrutin ? ou va-t-il grossir les rangs du PDCI, qui reste le parti le mieux implanté sur l'ensemble du pays?
Mais Laurent Gbagbo reste ferme : «Les élections auront lieu comme prévu le 10 décembre», déclare-t-il dans une interview au quotidien français le Figaro, ce vendredi. En milieu de journée, le ministre de l'Intérieur Emile Boga Doudou a enfoncé le clou, mais il a évoqué la possibilité que «dans telle ou telle circonscription, sur recommandation du préfet, le scrutin soit reporté». Cette éventualité a été envisagée dans les négociations directes, menées par le président ivoirien et des responsables du RDR, malgré les violences de ces derniers jours. De source bien informée, on indique qu'un report partiel pourrait même servir à «remettre à plat» le cas Ouattara.
«J'ai besoin d'un parlement pour légiférer»
Perçue à l'extérieur comme un entêtement, la tenue des élections législatives dans les délais est en tous cas considérée à Abidjan comme une nécessité. «J'ai fait campagne avec des promesses. J'ai besoin d'un parlement pour légiférer», a expliqué Laurent Gbagbo. Mais ce qui devait être un test pour la démocratie ivoirienne se présente désormais comme une épreuve à haut risque pour le chef de l'Etat ivoirien : l'échec de sa stratégie pourrait être fatale à la reprise de l'aide extérieure à un pays en pleine banqueroute. Car les bailleurs de fonds ont fait du bon déroulement et de la transparence du scrutin du 10 décembre une condition de leur soutien au nouveau pouvoir.
Avec ou sans le RDR, le scrutin s'annonce difficile pour le Front populaire ivoirien autant que pour l'ancien parti unique d'Houphouët-Boigny, le PDCI, qui disposait d'une large majorité au lendemain des législatives de 1995. Le parti de Laurent Gbagbo (24% et 13 sièges en 1995), s'il est assuré de faire le plein des voix dans son fief traditionnel de l'ouest du pays et devrait faire un bon score à Abidjan, il aura plus de mal à gagner des sièges ailleurs.
De son côté le PDCI pourrait profiter du boycott du RDR (12% et 13 sièges en 1995), dans le nord du pays. Mais le parti du « Vieux » est profondément divisé et sort d'une crise majeure provoquée d'abord par la chute de son président, Henri Konan Bédié, et ensuite par la candidature du général Gueï aux présidentielles de novembre. Peu sensible à la culture d'opposition, des dizaines de députés du PDCI avaient alors rallié le général putschiste. Alors que le secrétaire général Laurent Dona Fologo prônait l'abstention. A la veille du scrutin de dimanche, le PDCI - qui disposait de 145 des 175 sièges dans l'Assemblée dissoute en décembre dernier par le général Gueï - est de facto un allié du président Gbagbo, sinon du FPI : quatre ministres issus du PDCI siègent actuellement au gouvernement et l'ancien président Bédié n'est plus menacé de poursuites judiciaires. L'ancien président pourrait même rentrer au pays dès le début de l'année prochaine, Laurent Gbagbo s'étant engagé à faciliter son retour, en cas de victoire. Enfin le PDCI compte toujours des caciques bien implantés localement, qui pourraient assurer à l'ancien parti unique un score honorable, même s'il sera nécessairement réduit par rapport à 1995.
En l'absence de sondages officiels, on s'attend généralement à ce que le FPI et le PDCI fassent presque jeu égal, et s'assurent chacun environ un tiers des députés de la prochaine Assemblée nationale. Reste la question principale : le dernier tiers des sièges va-t-il être gagné par des candidats du RDR, si celui-ci décide finalement de participer au scrutin ? ou va-t-il grossir les rangs du PDCI, qui reste le parti le mieux implanté sur l'ensemble du pays?
par Christophe CHAMPIN et Elio COMARIN
Article publié le 09/12/2000