Burkina Faso
Norbert Zongo, deux ans après
Il y a deux ans, disparaissait tragiquement le journaliste burkinabé Norbert Zongo, directeur de l'hebdomadaire L'indépendant assassiné le 13 décembre 1998 avec ses trois compagnons dans une voiture à Sapouy au sud de Ouagadougou. Cette année, la commémoration de l'anniversaire de ce drame, qui a plongé le Burkina dans une crise sans précédent, a lieu sous le signe de la confrontation entre le pouvoir et le Collectif contre l'impunité créé pour réclamer vérité et justice dans cette affaire.
De notre correspondant au Burkina Faso
Coup dur pour tous ceux qui veulent commémorer l'anniversaire de la mort de Norbert Zongo : le gouvernement a décidé le 6 décembre dernier de suspendre «jusqu'à nouvel ordre, les manifestations sur la voie publique sur toute l'étendue du territoire». Cette décision, qui intervient après le refus de la municipalité de Ouagadougou d'autoriser des affiches de Reporters sans frontières, vise à interdire les nombreuses manifestations du Collectif programmées sur trois jours dans toutes les villes du pays et particulièrement le meeting et la procession prévue à Ouagadougou en direction du cimetière de Gounghin, où sont enterrés les quatre victimes du 13 décembre. Recevant une délégation du Collectif le 7 décembre dernier, le ministre de la Sécurité le lieutenant-colonel Djibril Bassolé a mis en garde ceux qui pourraient être tentés de passer outre cette décision. «Nous allons sévir», a-t-il prévenu d'un ton menaçant. Dans une deuxième rencontre le 9 décembre, le ministre a tenté, cette fois par le dialogue, de «ramener à la raison» l'organisation qui rassemble des partis politiques de l'opposition, des syndicats et des mouvements de droits de l'homme.
Mais comme il fallait s'y attendre, le Collectif a choisi d'ignorer le décret gouvernemental : toutes ses manifestations sont maintenues. L'organisation qui dénonce «une dérive fascisante» du pouvoir s'appuie sur la constitution qui «reconnaît le droit de manifester». Ce désaccord profond entre le pouvoir et le Collectif laisse planer de gros risques d'affrontements entre manifestants et forces de l'ordre tout au long des trois jours de commémoration du deuxième anniversaire. En tout cas, l'opposition qui reconnaît avec le professeur Joseph Ki-Zerbo que «cet anniversaire peut être dramatique et même tragique» semble prête à affronter le pouvoir.
Persistance de la crise
Cette ambiance tendue est le signe que, deux ans après l'assassinat du journaliste, la crise née de cette affaire est loin d'être terminée. Bien au contraire, les récentes mesures d'invalidation de l'année universitaire et la fermeture de l'université de Ouagadougou prises début octobre par le gouvernement ravivent la tension. Pis, la mort d'un écolier par balle, le 6 décembre, au cours d'un affrontement entre élèves et forces de l'ordre à Boussé (à 50 km au nord de Ouagadougou) renforce l'émotion provoquée par la tragique disparition de Norbert Zongo et par la longue liste des crimes non élucidés.
«Deux ans après, c'est comme si on repartait à la case départ», constate un observateur. Pourtant, le pouvoir, qui critique l'intransigeance du Collectif, estime avoir beaucoup fait pour juguler la crise. Il cite le procès David Ouédraogo, du nom du chauffeur du président Compaoré mort sous les tortures de la garde présidentielle, qui a été clôturé et les nombreuses réformes institutionnelles et politiques opérées ces deux dernières années. Relevant ces «acquis» le quotidien d'Etat, Sidwaya écrivait dans sa livraison du 12 décembre que «Norbert Zongo n'est pas mort pour rien».
Pour le Collectif, pas grand chose n'a été réalisée. «Les questions de crime n'ont toujours pas été liquidées parce que la justice est encore aux ordres», déclaraient le 10 décembre les dirigeants du Collectif dans une conférence de presse. En effet, le procès Norbert Zongo qui reste le n£ud de la crise se fait attendre. Celui de l'assassinat de l'ancien président, le capitaine Thomas Sankara a été renvoyé devant un tribunal militaire. Les discussions entre le gouvernement et le Collectif, considéré comme le plus important interlocuteur dans la résolution de la crise, sont rompues depuis plusieurs mois. Et un mois après sa mise en place, le nouveau gouvernement, qui avait déclaré que la reprise du dialogue était une de ses priorités, n'a jusque ici pas pris contact avec l'opposition.
Coup dur pour tous ceux qui veulent commémorer l'anniversaire de la mort de Norbert Zongo : le gouvernement a décidé le 6 décembre dernier de suspendre «jusqu'à nouvel ordre, les manifestations sur la voie publique sur toute l'étendue du territoire». Cette décision, qui intervient après le refus de la municipalité de Ouagadougou d'autoriser des affiches de Reporters sans frontières, vise à interdire les nombreuses manifestations du Collectif programmées sur trois jours dans toutes les villes du pays et particulièrement le meeting et la procession prévue à Ouagadougou en direction du cimetière de Gounghin, où sont enterrés les quatre victimes du 13 décembre. Recevant une délégation du Collectif le 7 décembre dernier, le ministre de la Sécurité le lieutenant-colonel Djibril Bassolé a mis en garde ceux qui pourraient être tentés de passer outre cette décision. «Nous allons sévir», a-t-il prévenu d'un ton menaçant. Dans une deuxième rencontre le 9 décembre, le ministre a tenté, cette fois par le dialogue, de «ramener à la raison» l'organisation qui rassemble des partis politiques de l'opposition, des syndicats et des mouvements de droits de l'homme.
Mais comme il fallait s'y attendre, le Collectif a choisi d'ignorer le décret gouvernemental : toutes ses manifestations sont maintenues. L'organisation qui dénonce «une dérive fascisante» du pouvoir s'appuie sur la constitution qui «reconnaît le droit de manifester». Ce désaccord profond entre le pouvoir et le Collectif laisse planer de gros risques d'affrontements entre manifestants et forces de l'ordre tout au long des trois jours de commémoration du deuxième anniversaire. En tout cas, l'opposition qui reconnaît avec le professeur Joseph Ki-Zerbo que «cet anniversaire peut être dramatique et même tragique» semble prête à affronter le pouvoir.
Persistance de la crise
Cette ambiance tendue est le signe que, deux ans après l'assassinat du journaliste, la crise née de cette affaire est loin d'être terminée. Bien au contraire, les récentes mesures d'invalidation de l'année universitaire et la fermeture de l'université de Ouagadougou prises début octobre par le gouvernement ravivent la tension. Pis, la mort d'un écolier par balle, le 6 décembre, au cours d'un affrontement entre élèves et forces de l'ordre à Boussé (à 50 km au nord de Ouagadougou) renforce l'émotion provoquée par la tragique disparition de Norbert Zongo et par la longue liste des crimes non élucidés.
«Deux ans après, c'est comme si on repartait à la case départ», constate un observateur. Pourtant, le pouvoir, qui critique l'intransigeance du Collectif, estime avoir beaucoup fait pour juguler la crise. Il cite le procès David Ouédraogo, du nom du chauffeur du président Compaoré mort sous les tortures de la garde présidentielle, qui a été clôturé et les nombreuses réformes institutionnelles et politiques opérées ces deux dernières années. Relevant ces «acquis» le quotidien d'Etat, Sidwaya écrivait dans sa livraison du 12 décembre que «Norbert Zongo n'est pas mort pour rien».
Pour le Collectif, pas grand chose n'a été réalisée. «Les questions de crime n'ont toujours pas été liquidées parce que la justice est encore aux ordres», déclaraient le 10 décembre les dirigeants du Collectif dans une conférence de presse. En effet, le procès Norbert Zongo qui reste le n£ud de la crise se fait attendre. Celui de l'assassinat de l'ancien président, le capitaine Thomas Sankara a été renvoyé devant un tribunal militaire. Les discussions entre le gouvernement et le Collectif, considéré comme le plus important interlocuteur dans la résolution de la crise, sont rompues depuis plusieurs mois. Et un mois après sa mise en place, le nouveau gouvernement, qui avait déclaré que la reprise du dialogue était une de ses priorités, n'a jusque ici pas pris contact avec l'opposition.
par Alpha Barry
Article publié le 13/12/2000