Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Serbie

La Yougoslavie dans le noir

C'est bien souvent à la bougie que la population a fêté la victoire de l'opposition démocratique aux législatives de Serbie. Depuis samedi, les coupures de courant se sont effet généralisées à travers tout le pays, y compris au Montenegro.
A Belgrade, la plupart des quartiers connaissent des coupures pouvant durer jusqu'à 15 heures d'affilée. Les habitants de la capitale serbe ont été partagés en quatre quartiers, dont trois sont simultanément privés d'électricité. Certaines villes sont totalement privées de courant depuis plusieurs jours, comme Vranje, dans le sud du pays, ou Cacak, en Serbie centrale, où la municipalité a ordonné la fermeture des entreprises et des écoles - les vacances d'hiver ne devant normalement commencer que dans quelques jours en Serbie.

La mairie de Cacak a mis en place un comité de crise, et seuls les services d'urgence continuent de fonctionner. Alors que les températures sont presque partout inférieures à zéro degré durant la plus grande partie de la journée, de nombreux habitants sont privés de chauffage. En ville, de nombreux appartements sont chauffés à l'électricité, et le gaz naturel manque lui aussi, la Russie ayant suspendu ses livraisons en raison des dettes de la Yougoslavie.

D'après les dirigeants de la compagnie nationale d'électricité EPS, il manque 40 millions de kilowatts par jour pour satisfaire les besoins du pays.

Le Montenegro est également affecté par des coupures, car la petite république est déficitaire de 4 millions de kilowatts par jour, en raison de l'arrêt des livraisons d'électricité venant de Serbie.

Dragan Batalo, un des dirigeants d'EPS, s'est pourtant voulu rassurant, espérant une hausse des températures, et surtout l'arrivée de précipitations. Les centrales hydroélectriques fournissent en effet l'essentiel de l'électricité du pays et, en raison d'un automne particulièrement sec, les lacs d'accumulation n'atteignent pas un niveau suffisant pour permettre la production d'énergie. Plus pessimiste, le ministre fédéral de l'énergie a expliqué que si le temps froid et sec se maintenait, la Serbie devait s'attendre à des privations durant tout l'hiver.

Le système énergétique yougoslave, qui s'était détérioré durant les années de sanctions internationales qui ont frappe le pays, a également été fortement endommagé par les bombardements de l'OTAN au printemps 1999. Plusieurs pays voisins de la Yougoslavie ont averti Belgrade de ne pas prélever de l'électricité sur leurs réseaux nationaux et de ne pas faire une utilisation excessive de l'eau du Danube pour la production énergétique.

Les coupures de courant commencent à susciter le mécontentement de la population. Ainsi, à Nis, des habitants en colère ont-ils dressé des barricades et menacé d'attaquer les locaux de la compagnie EPS. La police a refusé d'intervenir, «par solidarité avec la population».

Certaines mauvaises langues constatent déjà que le pays est resté capable d'acheter de l'énergie à l'étranger jusqu'à la veille des élections, et que la situation s'est sensiblement détériorée depuis la tenue du scrutin. Les caisses de l'Etat sont en effet vides, et seule l µaide internationale d'urgence pourrait permettre à la Serbie d'acheter suffisamment d'électricité pour faire face à ses besoins.




par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 27/12/2000