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Côte d''Ivoire

La police blanchie d'accusations de viols

L'enquête ordonnée par le président Gbagbo sur les viols, qui auraient été commis après les manifestations du Rassemblement des républicains (RDR) du 4 décembre dernier, blanchit la police. Mais elle met en cause la responsabilité de la gendarmerie pour des abus sexuels commis sur trois femmes. Le ministre de l'Intérieur a annoncé le dépot par l'Etat d'une «plainte contre X» pour que la parquet actionne une information judiciaire.
L'inspecteur général des services de la police ivoirienne, Kouadio N'Goran, a rendu son rapport, vendredi 22 décembre, sur les allégations de viols commis à l'école de police d'Abidjan, après les manifestations du parti d'Alassane Ouattara, le 4 décembre, qui avaient dégénérés en violents affrontements. Les forces de polices, soupçonnées d'abus sexuels contre dix à vingt femmes, sortent blanchies de l'enquête ordonnée par Laurent Gbagbo.

«Suite à la marche organisée par les dirigeants du Rassemblement des républicains et aux violences qui ont suivi, 302 personnes ont été interpellées et conduite par vagues successives à l'Ecole nationale de police (ENP). Six filles faisaient partie de ces 302 personnes, note le rapport, ajoutant «qu'aucun cas de viol n'a été signalé comme ayant lieu à l'Ecole nationale de police.» Kouadio N'Goran reconnaît néanmoins qu'il y a eu «des tentatives, mais avortées par suite d'interventions de certains policiers». Le rapport évoque en revanche un témoignage selon lequel «trois à six filles ont été violées, après leur interpellation, par des civils qui se disaient anti-marcheurs, en présence d'éléments de la gendarmerie.»

Des gendarmes à nouveau en cause

Parmi les témoins interrogés par les enquêteurs, une assistante sociale, également secrétaire aux affaires sociales du Mouvement ivoiriens des droits humains (MIDH), apporte toutefois une précision de taille. «Bien que les actes de viols ne se sont pas déroulés à l'ENP ni par les policiers, ils ont été accomplis certainement par des gendarmes mais surtout en leur présence et avec leur concours puisque ce sont les gendarmes qui auraient livré les filles aux violeurs», affirme-t-elle.

Le rapport ajoute que «des sévices corporels ont pu être commis «sur tous les interpellés, y compris les filles, les deux premiers jours de leur garde, suite à l'annonce du meurtre d'une femme agent de police». Mais il souligne que le directeur de l'Ecole nationale de police «a réagi en préconisant des sanctions à l'encontre du fautif». Et, dans ces conclusions, il affirme que certaines filles auraient même été arrachées des mains des violeurs pour être conduite «en lieu sûr» dans les locaux de l'ENP.

Après les manifestations du 4 décembre contre l'exclusion d'Alassane Ouattara des élections législatives, qui devaient se tenir le dimanche suivant, plusieurs associations de femmes proches du RDR avaient fait état de près de vingt viols à l'Ecole nationale de police. L'Association ivoirienne des droits des femmes (AIDF) avait de son coté dénoncé des abus sexuels contre au moins dix femmes par des policiers dans les même locaux.

L'enquête devrait toutefois avoir des suites judiciaires, puisque le ministre de l'Intérieur, Emile Boga Doudou, a annoncé le dépot par l'Etat d'une «plainte contre X» pour permettre l'ouverture d'une instruction. «La deuxième République est une République où il n'y aura pas d'impunité, a-t-il insisté dans un entretien à la télévision nationale, samedi. Le viol d'une femme est un crime et les auteurs seront punis comme tels.»



par Christophe  Champin

Article publié le 24/12/2000