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L''affaire Elf

L'étau se resserre autour de Sirven

Alfred Sirven, ancien numéro deux du groupe pétrolier Elf, accusé d'énormes détournements de fonds et réfugié aux Philippines depuis 1998, a échappé de justesse, le 16 décembre, au dispositif policier chargé de l'interpeller. Les policiers français et philippins restent cependant optimistes quant à son arrestation prochaine.
Une fois encore, Alfred Sirven aura échappé aux policiers français et philippins qui le traquent déjà depuis plusieurs mois. En fait, il aurait bénéficié de «fuites» lui ayant permis de quitter in extremis son refuge. La presse française a plusieurs fois fait état de la possibilité qu'une ou des «taupes» renseigneraient Sirven depuis Paris. Certains la ou les situeraient au sein du ministère français de l'Intérieur. Une thèse qui pourrait s'avérer : le groupe pétrolier a toujours eu des liens très étroits avec les services extérieurs de renseignements (aujourd'hui DGSE). Les enquêteurs ont l'amer sentiment d'avoir encore raté d'un cheveu l'arrestation de l'homme le plus recherché de France.

Depuis le 24 octobre, ces quatre policiers français se trouvent aux Philippines où ils travaillent en étroite collaboration avec les services de lutte contre le crime organisé, le bureau national d'enquête ainsi que le service de l'immigration pour arrêter le fugitif. Une tâche bien difficile pour eux si l'on en juge par la couverture médiatique qui peut rendre très ardues leurs investigations afin de capturer celui qui s'est vanté d'être en mesure de «faire sauter vingt fois la République».

«On a travaillé et on travaille encore sur des pistes qui peuvent se révéler fortes. On est parfois passé très près, mais on a joué de malchance» a déclaré Philippe Goujard, chef de la mission française sur place, avant d'ajouter : «nous avons eu la quasi certitude d'avoir localisé Alfred Sirven et de pouvoir l'arrêter».

Pour l'heure la question à laquelle personne ne peut répondre est de savoir de quelle somme d'argent dispose Alfred Sirven pour s'évaporer à chaque fois juste à temps et tromper ainsi les policiers qui sont à ses trousses.

Une secte se propose de collaborer à la traque

Soupçonnée d'avoir caché l'homme d'affaires français en fuite, la secte «Iglesia ni Cristo», a récusé cette information et a affirmé officiellement le 20 décembre, vouloir collaborer à la traque de l'ancien numéro deux d'Elf. Une partie de la famille de Vilma Medina appartient en effet à ce groupe religieux : le porte-parole officiel de «Iglesia ni Cristo» a confirmé que les deux filles de la compagne du fugitif étaient bien membres de la secte. Ces dernières se seraient engagées à prévenir le groupe religieux et à fournir des informations sur le sort de leur mère, sans qui Alfred Sirven ne pourrait se déplacer aussi vite dans cet archipel qui compte plus de 7 000 îles et d'échapper ainsi à la police.

Nul ne peut dire combien de temps va encore durer cette traque. Cependant, les enquêteurs se veulent résolument optimistes tout en admettant qu'il existe un risque que l'ex-numéro deux d'Elf ne puisse pas être attrapé vivant, donc révéler les informations que recherchent tant les juges français et suisse chargés de l'affaire.

Alfred Sirven qui fait l'objet de plusieurs mandats d'arrêt internationaux et d'une fiche de recherche par Interpol doit être jugé par défaut le 22 janvier 2001, à Paris, dans le volet de l'affaire Elf où sont déjà poursuivis l'ancien ministre des Affaires étrangères de François Mitterrand, Roland Dumas, et son ex-maîtresse Christine Deviers-Joncour. S'il est arrêté aux Philippines, Sirven qui ne fait localement l'objet que d'une infraction à la législation sur le séjour, pourrait tomber sous le coup d'une expulsion et non d'une extradition ; Paris et Manille n'ayant pas de convention en ce domaine.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 21/12/2000