Serbie
Belgrade renoue avec Tirana
L'Albanie a accueilli favorablement la proposition yougoslave de renouer les relations diplomatiques, interrompues lors de la guerre du Kosovo en avril 1999.
Geste fort en direction d'une normalisation des relations entre les pays des Balkans, l'Albanie et la République fédéral de Yougoslavie devrait prochainement rétablir leurs relations diplomatiques, et procéder à un échange d'ambassadeurs. «La décision de rétablir des relations diplomatiques avec l'Albanie a été prise en conformité avec la détermination de principe de notre pays de résoudre toutes les relations bilatérales par le dialogue», a déclaré le gouvernement yougoslave.
Dès le 1er janvier, le ministre fédéral des Affaires étrangères, Goran Svilanovic, avait indiqué que «la Yougoslavie souhaitait renouer ses relations diplomatiques avec l'Albanie, en dépit des divergences de vue des deux pays sur des questions très importantes». Vendredi matin, les autorités albanaises ont répondu favorablement à cette ouverture yougoslave. La Yougoslavie avait rompu les relations avec l'Albanie au début de la campagne de bombardements de l'OTAN, en mars 1999, estimant que Tirana soutenait le camp occidental.
Bien évidemment, les plus grands désaccords entre les deux pays portent sur le statut du Kosovo. La province placée sous administration internationale est aujourd'hui peuplée à 95% par des Albanais qui réclament l'indépendance du Kosovo, voire son unification avec l'Albanie, pour former une «Grande Albanie», qui pourrait aussi avoir des prétentions sur certaines régions de la Macédoine et du Monténégro au peuplement majoritairement albanais. En rétablissant un dialogue normal avec Tirana, Belgrade fait coup double. Ce geste de bonne volonté sera fort bien perçu par la communauté internationale, tandis que les autorités yougoslaves peuvent miser sur le dialogue avec l'Albanie, pour désamorcer l'hypothèse maximaliste d'une «Grande Albanie».
Un revers pour les nationalistes serbes et albanais
Du côté de Tirana, au contraire, les autorités socialistes prennent le risque d'être accusées de «trahison» et de coopération avec «l'ennemi serbe» par l'opposition de droite - menée par l'ancien Président de la République Sali Berisha, alors que le Kosovo reste un dossier extrêmement sensible et qu'une nouvelle guérilla séparatiste albanaise se développe dans le sud de la Serbie.
La normalisation des relations entre les deux pays s'oppose clairement à l'exaltation nationaliste des «grands» Etats - la «Grande Serbie» comme la «Grande Albanie», mais il ne manque pas de démagogues populistes prêts à dénoncer cette approche réaliste, aussi bien en Serbie qu'en Albanie. Officiellement, les autorités de Tirana n'ont jamais repris à leur compte l'objectif de «Grande Albanie», qui trouve beaucoup plus de sympathisants au Kosovo ou en Macédoine qu'en Albanie même. L'actuelle majorité socialiste conserve toutefois des liens importants avec l'ancienne Armée de libération du Kosovo (UCK), issue de cercles liés à l'ancien Parti communiste du dictateur Enver Hoxha. Le Parti démocratique du Kosovo (PDK), expression politique de l'ex-UCK, a toutefois été battu à plate couture par la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) d'Ibrahim Rugova, lors des élections municipales du 28 octobre dernier, le premier scrutin organisé au Kosovo depuis l'instauration du protectorat international.
A l'inverse, Ibrahim Rugova reste proche de l'ancien président d'Albanie Sali Berisha, les deux hommes pouvant se retrouver dans un courant de droite nationaliste pan-albanais. Jusqu'à ce jour, Ibrahim Rugova a rejeté toutes les offres de dialogue formulées par la nouvelle majorité démocratique serbo-yougoslave, et l'on peut s'attendre à ce que Sali Berisha dénonce avec virulence la normalisation des relations entre Belgrade et Tirana. L'ancien homme fort de Tirana est toutefois en perte de vitesse, après l'échec de son parti aux élections municipales du 1er octobre 1999.
Dès le 1er janvier, le ministre fédéral des Affaires étrangères, Goran Svilanovic, avait indiqué que «la Yougoslavie souhaitait renouer ses relations diplomatiques avec l'Albanie, en dépit des divergences de vue des deux pays sur des questions très importantes». Vendredi matin, les autorités albanaises ont répondu favorablement à cette ouverture yougoslave. La Yougoslavie avait rompu les relations avec l'Albanie au début de la campagne de bombardements de l'OTAN, en mars 1999, estimant que Tirana soutenait le camp occidental.
Bien évidemment, les plus grands désaccords entre les deux pays portent sur le statut du Kosovo. La province placée sous administration internationale est aujourd'hui peuplée à 95% par des Albanais qui réclament l'indépendance du Kosovo, voire son unification avec l'Albanie, pour former une «Grande Albanie», qui pourrait aussi avoir des prétentions sur certaines régions de la Macédoine et du Monténégro au peuplement majoritairement albanais. En rétablissant un dialogue normal avec Tirana, Belgrade fait coup double. Ce geste de bonne volonté sera fort bien perçu par la communauté internationale, tandis que les autorités yougoslaves peuvent miser sur le dialogue avec l'Albanie, pour désamorcer l'hypothèse maximaliste d'une «Grande Albanie».
Un revers pour les nationalistes serbes et albanais
Du côté de Tirana, au contraire, les autorités socialistes prennent le risque d'être accusées de «trahison» et de coopération avec «l'ennemi serbe» par l'opposition de droite - menée par l'ancien Président de la République Sali Berisha, alors que le Kosovo reste un dossier extrêmement sensible et qu'une nouvelle guérilla séparatiste albanaise se développe dans le sud de la Serbie.
La normalisation des relations entre les deux pays s'oppose clairement à l'exaltation nationaliste des «grands» Etats - la «Grande Serbie» comme la «Grande Albanie», mais il ne manque pas de démagogues populistes prêts à dénoncer cette approche réaliste, aussi bien en Serbie qu'en Albanie. Officiellement, les autorités de Tirana n'ont jamais repris à leur compte l'objectif de «Grande Albanie», qui trouve beaucoup plus de sympathisants au Kosovo ou en Macédoine qu'en Albanie même. L'actuelle majorité socialiste conserve toutefois des liens importants avec l'ancienne Armée de libération du Kosovo (UCK), issue de cercles liés à l'ancien Parti communiste du dictateur Enver Hoxha. Le Parti démocratique du Kosovo (PDK), expression politique de l'ex-UCK, a toutefois été battu à plate couture par la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) d'Ibrahim Rugova, lors des élections municipales du 28 octobre dernier, le premier scrutin organisé au Kosovo depuis l'instauration du protectorat international.
A l'inverse, Ibrahim Rugova reste proche de l'ancien président d'Albanie Sali Berisha, les deux hommes pouvant se retrouver dans un courant de droite nationaliste pan-albanais. Jusqu'à ce jour, Ibrahim Rugova a rejeté toutes les offres de dialogue formulées par la nouvelle majorité démocratique serbo-yougoslave, et l'on peut s'attendre à ce que Sali Berisha dénonce avec virulence la normalisation des relations entre Belgrade et Tirana. L'ancien homme fort de Tirana est toutefois en perte de vitesse, après l'échec de son parti aux élections municipales du 1er octobre 1999.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 13/01/2001