Etats-Unis
Bush paie sa dette à la droite religieuse
Le Sénat américain doit entériner la nomination la plus controversée de George W. Bush qui a choisi un ultra-conservateur comme ministre de la Justice. John Ashcroft est dénoncé pour ses positions extrêmes en matière de peine de mort, de contraception ou d'armes à feu.
De notre correspondant à New York
George W. Bush ne s'embarrasse plus du vernis consensuel dont il se parait au lendemain de son élection controversée. Sa toute première décision en donne la mesure. Lundi, il a décidé de bloquer tout financement fédéral américain à destination des organisations internationales qui pratiquent l'avortement, ou qui donnent des informations dans ce domaine. Le jour choisi n'avait rien d'anodin. C'était le 28e anniversaire de la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) par la Cour suprême des Etats-Unis. C'est aussi le jour choisi tous les ans par les militants anti-IVG pour un grand raout de protestation à Washington.
Le nouveau président leur a donc fait un cadeau, comme l'avait fait son père avant lui, et Ronald Reagan avant son père. «W» l'a agrémenté d'une lettre : «Nous partageons un grand objectif : travailler pour qu'un jour, chaque enfant soit le bienvenu dans la vie et protégé par la loi. (...) Cet objectif nous rassemble : construire une culture de la vie, affirmant que chaque personne à chaque stade ou saison de la vie, est créée à l'image de Dieu». Cette «culture de la vie» n'a pas empêché le gouverneur du Texas d'être un zélateur de l'application de la peine de mort qui a battu des records historiques sous son mandat.
L'homme a une dette à l'égard de la droite religieuse, qui l'a tiré d'affaire au moment des primaires disputées contre John Mc Cain. Cette dette a un gardien, John Ashcroft, pressenti par Bush au poste sensible d'Attorney General (ministre de la Justice). La simple évocation de cet ultra-conservateur donne de l'urticaire à l'Amérique libérale, qui l'accuse de tous les excès : anti-avortement (en cas de viol et d'inceste y compris), anti-contraception, anti-énergie solaire, anti-discrimination positive, anti-banissement des essais nucléaires, anti-lutte contre la ségrégation à l'école...
«Nous n'avons pas d'autre roi que Jésus»
Il est stigmatisé comme chaud partisan de la peine de mort, du lobby des armes, de l'industrie du tabac ou des pollueurs. Ce dernier point le rapproche du nouveau président, qui a déjà fait savoir qu'il comptait ouvrir le parc national de l'Arctique (un sanctuaire pour les caribous et les ours polaires), aux forages pétroliers et gaziers. Il a d'ailleurs nommé à la tête de l'agence de protection de l'environnement Christie Whitman, gouverneur du New Jersey, qui détient le record américain de la pollution de l'air juste après... le Texas.
John Ashcroft prête le flanc à la critique, en faisant des déclarations du type : en Amérique, «nous n'avons pas d'autre roi que Jésus». Ou en prohibant, en tant que gouverneur, la vente libre des bonbons fourrés à la liqueur (sic). Lors des audiences devant le Sénat, le sénateur démocrate du Massachussets Ted Kennedy a dénoncé un des «principaux architectes des efforts menés par l'extrême-droite» pour revenir sur le droit à l'avortement. En tant que sénateur du Missouri, Ashcroft a effectivement £uvré dans ce sens. Récemment, il s'est attiré les foudres de la communauté noire en bloquant la nomination à la cour fédérale du juge afro-américain Ronnie White, au prétexte qu'il avait trop souvent voté contre la peine de mort.
Selon le magazine de gauche The Nation, «c'est un homme qui à la veille de prêter serment comme sénateur du Missouri s'est oint d'huile végétale, soi-disant à la manière des rois Hébreux. (...). John Ashcroft n'est pas seulement un conservateur. Il est à la convergence des catholiques fanatiques, des anti-avortement, des miliciens, des allumés de la gachette et de ceux qui croient en la suprématie de la race blanche». Et d'énumérer une série de faits à l'appui de cette thèse. Selon le Guardian de Manchester, Ashcroft serait aussi un proche de Larry Pratt, dirigeant de Gunowners of America (lobby pro-armes), qui s'est illustré en préconisant d'armer les professeurs, pour éviter les fusillades à l'école. Selon un sondage de Newsweek, 41 % des Américains contre 37 % estiment que le Sénat devrait rejeter la nomination d'Ashcroft.
George W. Bush ne s'embarrasse plus du vernis consensuel dont il se parait au lendemain de son élection controversée. Sa toute première décision en donne la mesure. Lundi, il a décidé de bloquer tout financement fédéral américain à destination des organisations internationales qui pratiquent l'avortement, ou qui donnent des informations dans ce domaine. Le jour choisi n'avait rien d'anodin. C'était le 28e anniversaire de la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) par la Cour suprême des Etats-Unis. C'est aussi le jour choisi tous les ans par les militants anti-IVG pour un grand raout de protestation à Washington.
Le nouveau président leur a donc fait un cadeau, comme l'avait fait son père avant lui, et Ronald Reagan avant son père. «W» l'a agrémenté d'une lettre : «Nous partageons un grand objectif : travailler pour qu'un jour, chaque enfant soit le bienvenu dans la vie et protégé par la loi. (...) Cet objectif nous rassemble : construire une culture de la vie, affirmant que chaque personne à chaque stade ou saison de la vie, est créée à l'image de Dieu». Cette «culture de la vie» n'a pas empêché le gouverneur du Texas d'être un zélateur de l'application de la peine de mort qui a battu des records historiques sous son mandat.
L'homme a une dette à l'égard de la droite religieuse, qui l'a tiré d'affaire au moment des primaires disputées contre John Mc Cain. Cette dette a un gardien, John Ashcroft, pressenti par Bush au poste sensible d'Attorney General (ministre de la Justice). La simple évocation de cet ultra-conservateur donne de l'urticaire à l'Amérique libérale, qui l'accuse de tous les excès : anti-avortement (en cas de viol et d'inceste y compris), anti-contraception, anti-énergie solaire, anti-discrimination positive, anti-banissement des essais nucléaires, anti-lutte contre la ségrégation à l'école...
«Nous n'avons pas d'autre roi que Jésus»
Il est stigmatisé comme chaud partisan de la peine de mort, du lobby des armes, de l'industrie du tabac ou des pollueurs. Ce dernier point le rapproche du nouveau président, qui a déjà fait savoir qu'il comptait ouvrir le parc national de l'Arctique (un sanctuaire pour les caribous et les ours polaires), aux forages pétroliers et gaziers. Il a d'ailleurs nommé à la tête de l'agence de protection de l'environnement Christie Whitman, gouverneur du New Jersey, qui détient le record américain de la pollution de l'air juste après... le Texas.
John Ashcroft prête le flanc à la critique, en faisant des déclarations du type : en Amérique, «nous n'avons pas d'autre roi que Jésus». Ou en prohibant, en tant que gouverneur, la vente libre des bonbons fourrés à la liqueur (sic). Lors des audiences devant le Sénat, le sénateur démocrate du Massachussets Ted Kennedy a dénoncé un des «principaux architectes des efforts menés par l'extrême-droite» pour revenir sur le droit à l'avortement. En tant que sénateur du Missouri, Ashcroft a effectivement £uvré dans ce sens. Récemment, il s'est attiré les foudres de la communauté noire en bloquant la nomination à la cour fédérale du juge afro-américain Ronnie White, au prétexte qu'il avait trop souvent voté contre la peine de mort.
Selon le magazine de gauche The Nation, «c'est un homme qui à la veille de prêter serment comme sénateur du Missouri s'est oint d'huile végétale, soi-disant à la manière des rois Hébreux. (...). John Ashcroft n'est pas seulement un conservateur. Il est à la convergence des catholiques fanatiques, des anti-avortement, des miliciens, des allumés de la gachette et de ceux qui croient en la suprématie de la race blanche». Et d'énumérer une série de faits à l'appui de cette thèse. Selon le Guardian de Manchester, Ashcroft serait aussi un proche de Larry Pratt, dirigeant de Gunowners of America (lobby pro-armes), qui s'est illustré en préconisant d'armer les professeurs, pour éviter les fusillades à l'école. Selon un sondage de Newsweek, 41 % des Américains contre 37 % estiment que le Sénat devrait rejeter la nomination d'Ashcroft.
par Philippe Bolopion
Article publié le 24/01/2001