Congo démocratique
Tapis rouge pour Joseph Kabila
Le nouveau président congolais a rencontré mercredi Jacques Chirac, à l'occasion d'une escale à Paris, avant de se rendre à Washington, où il doit s'entretenir avec Colin Powell et, peut-être, George W. Bush. Alors que, selon l'envoyé spécial de l'Union européenne Aldo Ajello, «une nouvelle occasion est apparue pour la paix» en RDC, au lendemain de l'assassinat de Laurent Kabila.
Mardi : rencontre à Kinshasa avec le sud-africain Thabo Mbeki ; mercredi : entretien à Paris avec le français Jacques Chirac ; jeudi : à Washington, pourparlers avec les américains Colin Powell et George W. Bush ; vendredi : à New York, intervention devant le Conseil de sécurité de l'ONU et rencontre avec Kofi Annan; samedi : à Bruxelles entretien avec le ministre belge des Affaires étrangères Louis Michel.
Quelques jours à peine après avoir enterré son père, le jeune Joseph Kabila a entamé une longue tournée internationale au cours de laquelle il aura droit, à chaque étape, à un tapis rouge, à des encouragements, à des conseils, mais aussi à des questions plus ou moins directes concernant l'avenir d'un pays - le Congo démocratique - qui conditionne celui de tous ses voisins.
Ce traitement de faveur n'était guère prévisible il y a une semaine à peine, lorsque le fils de Laurent Kabila, âgé de 29 ans, remportait une succession difficile et faisait l'objet d'interrogations sur sa véritable filiation autant que sur sa capacité à diriger un pays presque sans Etat, partagé entre fronts rebelles et forces gouvernementales, et occupé par une demi-douzaine d'armées étrangères. Depuis, les principales puissances intéressées par l'Afrique centrale se sont lancées dans un «forcing diplomatique» qui commencé à porter ses fruits : les Etats-Unis et l'Afrique du sud d'un côté, l'Europe de l'autre.
USA contre Europe ?
L'Afrique du sud et les Etats-Unis ont dû mettre entre parenthèses leurs réticences vis-à-vis du régime de Kinshasa et prendre acte d'une succession qui est sans doute, à leurs yeux, le moindre mal auquel on pouvait s'attendre au lendemain de l'assassinat de Laurent Kabila. Le fils de celui-ci et Thabo Mbeki ont eu mardi soir un entretien d'une heure, à l'aéroport kinois de Ndjili, mais aucune déclaration publique n'a été faite par les deux présidents. Mbeki tente visiblement de concrétiser ce que son prédécesseur, Nelson Mandela, avait en vain rêvé: faire de l'Afrique du sud une «puissance régionale politiquement et économiquement incontournable». Pour l'heure, l'échec diplomatique de Mandela, constamment soupçonné de pencher du côté de Washington et de ses alliés (Ouganda et Rwanda), ne permet par à Pretoria de jouer un rôle à la hauteur d'une puissance régionale.
Vraisemblablement, Joseph Kabila préfère traiter directement avec Washington : à Colin Powell il va demander une «intervention» des Etats-Unis pour ramener la paix au Congo démocratique : «Nous voulons convaincre la nouvelle administration d'intervenir dans la situation et de faire une relecture de la crise en RDC» a dit son ministre des Affaires étrangères. «Il faut mettre fin à la confusion créée autour de la crise en RDC en séparant la question de l'agression dont est victime le pays de la part de ses voisins des problèmes internes congolais», a-t-il précisé.
Jusque là, Kinshasa a souvent reproché à l'ancienne administration américaine d'être conditionnée par le «traumatisme du génocide rwandais» et de favoriser Kigali et Kampala. Joseph Kabila, dès son premier discours a ténu à rappeler les « moments d'incompréhension mutuelle » entre Washington et Kinshasa mais aussi sa volonté de « normaliser les rapports bilatéraux ». Dans le but évident de pousser les Etats-Unis à intervenir auprès de leurs alliés pour qu'ils retirent leurs troupes du nord et de l'est de la RDC. Ce qui est loin d'être acquis : mercredi Colin Powell a rencontré le rwandais Paul Kagamé, à Washington, et a rappelé que la visite surprise de Kabila n'indiquait pas de changement politique de la part des Etats-Unis vis-à-vis du Congo démocratique.
Mais Kabila peut compter surtout sur l'Europe. La Belgique a été la première à prendre langue avec le successeur de Laurent Kabila et son ministre des Affaires étrangères Louis Michel est à l'origine de la «valse diplomatique» en cours dans la région. L'Union européenne a pour sa part dépêché sur place son envoyé spécial Aldo Ajello, et celui-ci vient de lancer un nouvel appel au cessez-le-feu, afin de permettre le déploiement de la MONUC (5 500 casques bleus) et d'enclencher ensuite un «processus de désengagement» militaire.
Mais c'est à la France que Kabila a rendu un hommage particulier, lors de son discours d'intronisation, «en raison de ses nombreux engagements au Conseil de sécurité des Nations unies dans la recherche de solutions pacifiques à la crise», notamment par l'adoption de résolutions demandant le retrait des troupes étrangères que les Etats-Unis ont constamment tenté de bloquer. C'est sans doute pour cela qu'il a voulu s'arrêter Paris, avant de reprendre sa route vers Washington.
Au menu de toutes les rencontres de ces jours-ci, un «deal» semble se dégager : «retrait des forces étrangères» contre un «vrai partage du pouvoir» entre les différents acteurs congolais. Lesquels au juste ?
Quelques jours à peine après avoir enterré son père, le jeune Joseph Kabila a entamé une longue tournée internationale au cours de laquelle il aura droit, à chaque étape, à un tapis rouge, à des encouragements, à des conseils, mais aussi à des questions plus ou moins directes concernant l'avenir d'un pays - le Congo démocratique - qui conditionne celui de tous ses voisins.
Ce traitement de faveur n'était guère prévisible il y a une semaine à peine, lorsque le fils de Laurent Kabila, âgé de 29 ans, remportait une succession difficile et faisait l'objet d'interrogations sur sa véritable filiation autant que sur sa capacité à diriger un pays presque sans Etat, partagé entre fronts rebelles et forces gouvernementales, et occupé par une demi-douzaine d'armées étrangères. Depuis, les principales puissances intéressées par l'Afrique centrale se sont lancées dans un «forcing diplomatique» qui commencé à porter ses fruits : les Etats-Unis et l'Afrique du sud d'un côté, l'Europe de l'autre.
USA contre Europe ?
L'Afrique du sud et les Etats-Unis ont dû mettre entre parenthèses leurs réticences vis-à-vis du régime de Kinshasa et prendre acte d'une succession qui est sans doute, à leurs yeux, le moindre mal auquel on pouvait s'attendre au lendemain de l'assassinat de Laurent Kabila. Le fils de celui-ci et Thabo Mbeki ont eu mardi soir un entretien d'une heure, à l'aéroport kinois de Ndjili, mais aucune déclaration publique n'a été faite par les deux présidents. Mbeki tente visiblement de concrétiser ce que son prédécesseur, Nelson Mandela, avait en vain rêvé: faire de l'Afrique du sud une «puissance régionale politiquement et économiquement incontournable». Pour l'heure, l'échec diplomatique de Mandela, constamment soupçonné de pencher du côté de Washington et de ses alliés (Ouganda et Rwanda), ne permet par à Pretoria de jouer un rôle à la hauteur d'une puissance régionale.
Vraisemblablement, Joseph Kabila préfère traiter directement avec Washington : à Colin Powell il va demander une «intervention» des Etats-Unis pour ramener la paix au Congo démocratique : «Nous voulons convaincre la nouvelle administration d'intervenir dans la situation et de faire une relecture de la crise en RDC» a dit son ministre des Affaires étrangères. «Il faut mettre fin à la confusion créée autour de la crise en RDC en séparant la question de l'agression dont est victime le pays de la part de ses voisins des problèmes internes congolais», a-t-il précisé.
Jusque là, Kinshasa a souvent reproché à l'ancienne administration américaine d'être conditionnée par le «traumatisme du génocide rwandais» et de favoriser Kigali et Kampala. Joseph Kabila, dès son premier discours a ténu à rappeler les « moments d'incompréhension mutuelle » entre Washington et Kinshasa mais aussi sa volonté de « normaliser les rapports bilatéraux ». Dans le but évident de pousser les Etats-Unis à intervenir auprès de leurs alliés pour qu'ils retirent leurs troupes du nord et de l'est de la RDC. Ce qui est loin d'être acquis : mercredi Colin Powell a rencontré le rwandais Paul Kagamé, à Washington, et a rappelé que la visite surprise de Kabila n'indiquait pas de changement politique de la part des Etats-Unis vis-à-vis du Congo démocratique.
Mais Kabila peut compter surtout sur l'Europe. La Belgique a été la première à prendre langue avec le successeur de Laurent Kabila et son ministre des Affaires étrangères Louis Michel est à l'origine de la «valse diplomatique» en cours dans la région. L'Union européenne a pour sa part dépêché sur place son envoyé spécial Aldo Ajello, et celui-ci vient de lancer un nouvel appel au cessez-le-feu, afin de permettre le déploiement de la MONUC (5 500 casques bleus) et d'enclencher ensuite un «processus de désengagement» militaire.
Mais c'est à la France que Kabila a rendu un hommage particulier, lors de son discours d'intronisation, «en raison de ses nombreux engagements au Conseil de sécurité des Nations unies dans la recherche de solutions pacifiques à la crise», notamment par l'adoption de résolutions demandant le retrait des troupes étrangères que les Etats-Unis ont constamment tenté de bloquer. C'est sans doute pour cela qu'il a voulu s'arrêter Paris, avant de reprendre sa route vers Washington.
Au menu de toutes les rencontres de ces jours-ci, un «deal» semble se dégager : «retrait des forces étrangères» contre un «vrai partage du pouvoir» entre les différents acteurs congolais. Lesquels au juste ?
par Elio Comarin
Article publié le 31/01/2001