Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

L''affaire Elf

Les juges attendent Alfred Sirven

L'affaire Elf a connu vendredi un nouveau coup de théâtre avec l'arrestation à Manille d'Alfred Sirven, l'homme clé de ce nébuleux dossier. Il était jugé à Paris par défaut dans un des volets de cette affaire, aux côtés de Roland Dumas. Expulsé des Philippines, il est attendu samedi matin en France. Le procès est suspendu avant d'être vraisemblablement renvoyé.
Alfred Sirven, expulsé des Philippines, devait arriver samedi matin en Allemagne, à Francfort, à bord d'un vol de la Lufthansa, en provenance de Manille. Il devrait être «cueilli» à son arrivée par les enquêteurs, qui doivent le ramener à Paris. A son arrivée en France il devrait être placé en maison d'arrêt. Il devrait ensuite être convoqué devant le tribunal qui pourrait ordonner un supplément d'information, entraînant ainsi la suspension du procès. Autant dire que l'arrivée à Paris de l'homme clé de la plus grosse affaire de corruption qu'ait connue la France est très attendue en plein milieu du procès d'un des volets Elf.

Depuis trois ans, Sirven, qui fait l'objet de quatre mandats d'arrêt internationaux, jouait à cache-cache avec les services de police. En octobre dernier encore, il était parvenu de justesse à échapper aux policiers français et à leurs collègues philippins qui le filaient à Manille, ayant été vraisemblablement prévenu. Mais vendredi, la cavale a pris fin. L'annonce de son arrestation a été faite par le commissaire à l'immigration philippin, Andrea Domingo.

Sirven, âgé de 74 ans, a été appréhendé dans la localité résidentielle de Tagaytay, dans la banlieue de Manille, à la suite d'une indication de la police de Hong Kong. Il a été interpellé peu de temps après son chauffeur philippin, Roberto Astral, à l'aéroport de Manille, où il arrivait en provenance de Hong Kong. «Les Philippines ne sont plus un havre pour les criminels étrangers et les fugitifs, s'est félicité Mme Domingo. Ce n'est plus un refuge pour eux».

La collaboration entre les polices de Hong Kong et de Manille a permis cette arrestation. On sait que deux policiers français ont assisté à cette arrestation. L'un appartient à la police judiciaire et l'autre au Service international de coopération technique de police (SICTP). Les deux hommes se trouvaient à Manille depuis le 24 octobre dernier sur décision des deux magistrats parisiennes en charge de l'affaire Elf, Eva Joly et Laurence Vichnievsky.

A peine les menottes passées, l'ex-numéro deux du groupe pétrolier a clamé son innocence, dénonçant «un coup monté politique», alors qu'il était conduit dans les services du ministère philippin de la Justice. Décontracté, bronzé, vêtu d'une chemise bleu à carreaux et arborant une casquette sombre, Sirven a fait l'éloge des Philippines où il a passé trois années : «c'est un pays merveilleux, je pars avec regret», tout en ajoutant qu'il n'avait commis «aucun délit». L'ex-numéro deux du groupe pétrolier Elf était entré à Manille en utilisant un passeport au nom de Robert Lapierre, un Parisien décédé en septembre 1997.

Le procès qui se tient au Tribunal correctionnel de Paris depuis le 22 janvier dernier, devait reprendre lundi 5 février avec les plaidoiries des parties civiles et le réquisitoire du Procureur. Les avocats de la défense devaient plaider le 6 et 7 février. Le procès devrait être suspendu et renvoyé.

Aussitôt la nouvelle de l'arrestation connue, l'avocate de Christine Deviers-Joncour, l'ex-maîtresse de Dumas, qui comparait aussi dans cette affaire, a estimé qu'il n'était pas «imaginable» que le procès continue. Quant au bâtonnier Jean-René Farthouat, il préconise un «renvoi» de l'affaire. Enfin, l'avocat d'André Tarallo, Me Le Foyer de Costil a estimé que les prévenus du procès des abus de biens sociaux aux dépens de Elf, avaient tout intérêt «à ce que Sirven soit entendu avant que le tribunal ne statue».



par Sylvie  Berruet

Article publié le 02/02/2001