Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

L''affaire Elf

Sirven retenu en Allemagne

Alors que la justice allemande examinait, lundi, selon une procédure d'urgence, la demande d'extradition d'Alfred Sirven vers la France, le procès de Roland Dumas reprenait en début d'après-midi pour être presque aussitôt suspendu, en raison de l'arrestation, vendredi dernier, de l'ex-numéro 2 du groupe pétrolier Elf. Le procès a été renvoyé au mercredi 7 février.
Depuis ce matin, l'Allemagne évoque le retour d'Alfred Sirven en France avec force précautions : car si d'un côté elle est prête à tout faire pour que l'homme clé de l'affaire Elf soit remis aux autorités françaises au plus vite, elle est de l'autre très intéressée par cet homme qui en sait beaucoup sur l'affaire Elf-Leuna, une affaire de commissions qui aurait pu servir à financer l'Union chrétienne-démocrate (CDU) de l'ancien chancelier Helmut Kohl.

Pour la petite histoire, la raffinerie est-allemande de Leuna a été vendue en 1992 au groupe pétrolier français et des commissions occultes auraient atterri dans les caisses de la CDU. Sur ce point, la commission d'enquête parlementaire allemande sur la CDU a demandé en début d'après-midi d'entendre Sirven sur cette affaire et avait bon espoir de repousser à vendredi son extradition afin qu'il puisse être entendu : «Sirven joue un rôle clé dans l'affaire Elf-Leuna et il dira quel politicien de la CDU a obtenu quel argent par son biais. Une fois en France, ce témoin sera pour nous inatteignable» a souligné le président de cette commission. De son côté, le parquet allemand de Sarrebruck a fait savoir qu'il souhaitait également entendre Sirven sur ce dossier.

Favorable à une extradition rapide, le parquet général et le tribunal de grande instance de Francfort ont de concert confirmé le départ de Sirven. Mais le départ de ce dernier d'Allemagne pourrait être repoussé à mardi, en raison de complications administratives. Cependant, comme l'a expliqué Hildegard Becker-Toussaint, porte-parole du parquet général de Francfort : «on peut s'attendre à ce que l'extradition soit positive dans la mesure où il n'y a pas d'obstacles juridiques». En effet, Alfred Sirven a donné son accord à son transfert rapide en France ce qui évitera une procédure d'extradition extrêmement longue. Une cellule à la prison de la Santé à Paris, dans le quartier VIP, lui est déjà réservée.

Suspension du procès Dumas

Pendant ce temps, le procès Dumas/Deviers-Joncour, commencé il y a quinze jours, reprenait devant la 11ème chambre correctionnelle du tribunal de Paris. En raison de l'arrestation d'Alfred Sirven (jugé jusqu'à présent par défaut dans ce dossier) aux Philippines, vendredi dernier, le cours du procès a été modifié. Sophie Portier, la présidente du tribunal, a décidé de le suspendre jusqu'au mercredi 7 février, le temps que le «French Fugitive», comme l'a surnommé la presse philippine, rentre en France et qu'il puisse préparer sa défense pour être confronté aux autres accusés.

L'arrestation impromptue d'Alfred Sirven a bousculé les stratégies de défense des prévenus. Roland Dumas, Christine Deviers-Joncour mais aussi Loïk Le Floch-Prigent s'étaient jusqu'à présent tous abrités derrière l'absence de l'ex-numéro deux d'Elf à la personnalité sulfureuse pour minimiser leurs responsabilités dans l'embauche présumée fictive de Christine Deviers-Joncour et dans les avantages qu'aurait pu en retirer Roland Dumas.

Dans l'enquête principale sur les détournements de fonds à la société Elf, Alfred Sirven est accusé d' «abus de biens sociaux et recel» et de «tentative d'escroquerie» dans l'instruction sur la vente des frégates militaires de Thomson à Taiwan en 1991.



par Clarisse  Vernhes

Article publié le 05/02/2001