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Balkans

Le nouveau défi des extrémistes albanais

La Macédoine a décidé de fermer sa frontière avec le Kosovo en réponse après la mort de trois soldats macédoniens tués lors d'affrontements avec des séparatistes albanais. Les extrémistes albanais multiplient les attaques à l'extérieur du Kosovo ces dernières semaines.
La Macédoine doit faire face au défi d'une nouvelle guérilla séparatiste, apparue dans les villages albanais qui bordent la frontière du Kosovo. Les Albanais représentent environ le quart de la population de ce fragile petit pays de deux millions d'habitants. Les combattants de l'Armée de libération nationale û dont les initiales, en albanais, sont identiques a celles de l'UCK du Kosovo û affirment se battre contre les «discriminations» dont les Albanais seraient victimes en Macédoine.

A Tetovo, la «capitale» des Albanais de Macédoine, les commerçants, qui font de juteuses affaires avec le Kosovo, sont pourtant prospères, et le niveau de vie des Albanais du pays vaut bien celui des Macédoniens. Les Albanais sont certes sous-représentés dans les services publics et la police, mais ils participent au gouvernement depuis l'indépendance du pays en 1992. Le Parti démocratique albanais (PDSh), qui professe un nationalisme albanais radical, a ainsi passé une alliance de coalition avec la droite nationaliste macédonienne du VMRO.

Risque de tempête au carrefour des Balkans

Tous les partis albanais se retrouvent pour contester la ratification des frontières entre la Macédoine et la Yougoslavie, votée jeudi dernier par le Parlement macédonien, après de longues années de contentieux. Les frontières sont ici le résultats des vicissitudes de l'histoire, dont il faudrait, selon les nationalistes albanais, corriger les «injustices», puisqu'elles divisent le peuple albanais entre plusieurs Etats. Ni l'UCK de Macédoine, ni l'UCPMB û la guérilla albanaise du sud de la Serbie û ne sont prêtes à reconnaître le principe de l'intangibilité des frontières, au risque de provoquer une bourrasque dans ce carrefour des Balkans, ou cohabitent Serbes, Albanais et Macédoniens.

Pour les Albanais, la Macédoine a représenté durant de longues années le point de passage obligé entre Kosovo et Albanie, les frontières directes étant presque infranchissables. C'est en Macédoine que le thème de la réunion de tous les Albanais des Balkans dans un seul Etat a toujours trouvé le plus d'écho, tant les Albanais de Macédoine avaient peur d'être «oubliés» entre l'Albanie et un Kosovo qui deviendrait indépendant. C'est aussi en Macédoine, entre Tetovo et Gostivar, que les puissantes mafias albanaises ont établi certaines de leurs bases les plus importantes.

Des l'apparition de l'UCK au Kosovo, a partir de 1996, les combattants albanais évoquaient une «zone 1», correspondant au Kosovo, et une «zone 2», correspondant à la Macédoine. On ignore si l'UCPMB du sud de la Serbie et l'UCK de Macédoine obéissent à un même commandement centralisé, et les violentes divisions politiques au sein du camp nationaliste albanais peuvent faire craindre une course de vitesse entre groupes rivaux, cherchant tous a devenir le leader de la «lutte nationale». Durant des années, Arben Xhaferi, le président du PDSh de Macédoine a fait figure de modérateur entre les différents groupes politiques albanais et les différents intérêts mafieux. Cette figure du nationalisme albanais est aujourd'hui très diminuée par la maladie. L'apparition de groupes armés en Macédoine même signifie peut-être que la lutte pour sa succession est déjà ouverte. Quitte à mettre en feu le sud des Balkans, certains ne veulent pas manquer de saisir «l'occasion historique» de réaliser la «Grande Albanie».



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 05/03/2001