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Balkans

Macédoine : le gouvernement «<i>d'union nationale</i>» ramènera-t-il la paix ?

La trêve n'aura guère duré qu'une journée. Samedi, les forces de sécurité macédoniennes ont repris leur pilonnage contre les positions de la guérilla albanaise dans la région de Kumanovo, au nord du pays. Vendredi pourtant, le Parti de la prospérité démocratique (PDP), le parti albanais d'opposition avait donné son accord à la constitution d'un gouvernement d'union nationale, qui devait être formé ce dimanche.
De notre envoyé spécial en Macédoine

A Kumanovo, le responsable local du PDP, Feriz Dervishi, habite lui-même Cerkezi, un village exposé aux tirs de l'Armée. Pour qu'il puisse gagner la mairie de la ville, où doit se tenir une réunion, le maire social-démocrate doit envoyer un chauffeur parlementer avec les policiers qui bloquent les accès au bourg. Feriz Dervishi reconnaît sans ambages que son parti n'a accepté de participer à ce gouvernement d'union nationale que sous la pression internationale. «La communauté internationale ne nous a pas laissé le choix; maintenant, c'est à elle de faire des propositions et de trouver des solutions à la crise».
Toutes les chancelleries ont salué la constitution du gouvernement, mais il n'est pourtant pas sûr que cet accord entre les partis suffise à désamorcer la crise. «Les partis politiques n'ont pas de lien avec l'UCK. Tant que l'UCK ne sera pas elle-même conviée à la table des négociations, les jeux politiciens n'auront aucune signification», expliquent, unanimes, les clients albanais qui se pressent sur le marché de Kumanovo, qui reprend peu à peu un rythme d'activité normal. Officiellement, les autorités de Skopje excluent toujours d'entrer en pourparlers avec les «terroristes», mais il n'est pas exclu que les pressions extèrieures ne les amènent également à renoncer à ce principe.

Des partis albanais sans prise sur la guérilla

A défaut d'être directement associée aux négociations, la guérilla n'a en effet aucune raison de se sentir liée par les engagements pris par les partis albanais légaux, avec lesquels elle n'entretient pas de liens directs. Seul le Parti démocratique nationale (PDK) de Kastriot Haxhirexha, récemment constitué, peut se présenter comme la «branche politique» de l'UCK. Le PDP et le Parti démocratique albanais (PDSh) d'Arben Xhaferi semblent l'un et l'autre sans prise réelle sur les événements. Jusqu'en 1998, le PDP participait au gouvernement du pays, en coalition avec l'Union sociale démocrate de Macédoine (SDSM) de l'ancien président de la République Kiro Gligorov. Depuis, ces deux formations ont dû céder la place à une alliance surprenante entre les nationalistes macédoniens du VMRO-DPMNE et les nationalistes albanais du PDSh. Jusqu'à la veille de son entrée au gouvernement, le PDSh passait en effet pour beaucoup plus radical que le PDP.
«Depuis que le PDSh est entré au gouvernement, les cadres du parti ont obtenu des postes prestigieux et beaucoup d'argent, mais rien n'a changé pour les Albanais ordinaires», s'indigne Mustafa, un ancien sympathisant du PDSh. Le PDP a essayé de profiter de la « collusion » du PDSh avec le gouvernement pour essayer de retrouver les faveurs de l'opinion albanaise, en multipliant les déclarations patriotiques et en refusant de condamner les guérillas. Mustafa ne cache pourtant pas son scepticisme : «L'union nationale, cela veut dire que tous les partis, ceux de la majorité et ceux de l'opposition, les partis macédoniens et les partis albanais vont devoir se partager le gâteau entre eux tous, mais comme il n'y en aura pas assez pour tout le monde, cela ne pourra pas fonctionner».



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 13/05/2001