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Corse

Un statut en équilibre instable

Le projet de nouveau statut de la Corse, en discussion à l'Assemblée nationale, navigue entre deux écueils: la fidélité aux négociations conclues avec les nationalistes corses et la conformité à la constitution. Sur plusieurs thèmes essentiels, toute modification destinée à passer l'épreuve du Conseil constitutionnel met en danger le subtil équilibre du «processus de Matignon».
Le projet de loi sur le statut particulier pour la Corse, en raison de son insularité, de ses revendications d'autonomie et pour mettre fin à la violence prévoit trois éléments essentiels: la possibilité d'adapter lois et règlements, l'enseignement de la langue corse à l'école et la fiscalité des successions. Le texte soumis à partir de mardi aux députés est très largement le résultat des discussions engagées entre le gouvernement et les forces politiques de l'Ile de Beauté qui ont abouti, en juillet 2000, à ce qu'on a appelé les accords de Matignon. Toutefois, certaines des dispositions ainsi négociées semblaient de nature à déclencher les foudres du Conseil constitutionnel, ce sur quoi le Conseil d'Etat avait d'ailleurs attiré l'attention du gouvernement.

Gauche et droite divisées

La difficulté pour le gouvernement Jospin a donc été d'apporter les modifications évitant le rejet des Sages du conseil constitutionnel tout en conservant l'approbation des nationalistes corses qui faisaient mine de croire les accords Matignon intangibles. D'autant que tout ce qui pouvait lever les objections de démantèlement de la collectivité nationale passait pour un recul aux yeux des autonomistes corses et suscitait des menaces réitérées d'actions violentes de la part des indépendantistes. Ainsi le pouvoir d'adaptation législative est-il encadré par le Parlement qui exercera donc un contrôle renforcé. A l'inverse, l'article consacré à l'enseignement de la langue corse est reformulé de telle façon que l'expression de la volonté des parents n'y apparaît plus.

Le pouvoir d'adaptation des lois et règlements nationaux aux spécificités locales et le caractère obligatoire ou non de l'enseignement du corse en maternelle et primaire ont déchaîné la polémique en France et séparé en deux camps irréductibles les défenseurs de l'unité nationale ou «centralisateurs» et les partisans d'une décentralisation accrue. Le clivage entre ces deux sensibilités, pour «corser» la chose, ne recouvre pas la traditionnelle séparation droite-gauche. On trouve des partisans du projet à l'UDF et un opposant farouche en l'ancien ministre de l'Intérieur, Jean-Pierre Chevènement, dont la formation le MDC est dans la majorité plurielle. Peu avant l'ouverture du débat les néo-gaullistes du RPR ont annoncé qu'ils voteraient contre le texte tandis que l'UDF devrait majoritairement s'abstenir. Les communistes, peu enthousiastes, n'ont pas encore arrêté leur position.



par Francine  Quentin

Article publié le 15/05/2001