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Iran

Khatami favori pour un deuxième mandat

Face à ses neuf concurrents conservateurs, le président sortant Mohammad Khatami part largement favori pour le scrutin présidentiel du vendredi 8 juin.
De notre correspondant en Iran

Khatami élu avec 22 voire 25 millions de voix, désormais l'hypothèse n'est pas exclue. En effet, comme en 1997, les derniers jours de la campagne ont été l'occasion d'une mobilisation des jeunes et des femmes en faveur du candidat réformateur. «C'est une lame de fond qui vient des profondeur de la société», affirme un journaliste iranien. En tout cas, selon les derniers sondages, les neuf adversaires conservateurs du président Khatami obtiendraient encore moins de voix que le candidat officiel des conservateur en mai 1997. A l'époque, Ali Akbar Nategh Nouri avait obtenu sept millions de voix. Les sondages créditent aujourd'hui le président sortant de 70% des suffrages.

Toutes les tentatives des conservateurs pour faire baisser le vote du président semblent avoir échoué. Les grands partis conservateurs n'ont pas présenté de candidat officiel, espérant que les neuf adversaires du président Khatami réussiraient à grignoter des voix. Mais la multiplication des candidatures à dispersé le vote conservateur et désorienté les électeurs. De même, la télévision contrôlée par la droite a accordé 13 heures d'émissions à chacun des candidats. «L'objectif était simple. Les neufs adversaires du président avaient au total 117 heures d'émissions contre seulement 13 pour Mohammad Khatami. Ce bombardement médiatique devait aux yeux des conservateurs orienter les électeurs», affirme le journaliste Saïd Leylaz. Mais c'en était trop. En effet, très vite les gens se sont lassés et ce d'autant plus que les neufs candidats conservateurs répétaient toujours la même chose et n'hésitaient pas à faire les promesses les plus saugrenues. L'un a promis de ramener l'inflation et le chômage à 0% en quelques années. Un autre a affirmé qu'il allait nommer 22 femmes dans son gouvernement. Un troisième voulait distribuer des logements gratuits.

Face à cette surenchère électorale, le président Khatami a maintenu le cap. «La demande historique des Iraniens est la démocratie et la liberté. Les adversaires des réformes peuvent freiner ce mouvement mais ne pourront pas l'arrêter. Je reste fidèle au pacte que j'ai passé avec la population. La poursuite des réformes est la seule voie possible pour notre pays», n'a cessé d'affirmer le candidat des réformateurs. Visiblement, le message est passé. «Nous ne votons pas pour une personne. En votant pour Khatami, nous choisissons une voie, un projet de société, une manière d'être», affirmait il y a quelques jours un jeune lycéen de 15 ans qui vote pour la première fois. Cette phrase revient dans toutes les conversations.

Le choix entre «un islam moderne et un islam passéiste»

Plus politique, Hashemi Aghjeri, l'un des théoricien du camp réformateur, a affirmé mardi dernier lors d'un meeting que «les électeurs allaient en réalité dire quel islam ils choisissaient. Le choix est entre un islam moderne et un islam passéiste». «Nous avons obtenu beaucoup de chose depuis quatre ans grâce au président Khatami. Pas seulement moi, mais la grande majorité des jeunes vont voter cette fois-ci encore pour le président Khatami. En fait ces quatre dernières années, il a mis en place les soubassements de la démocratie», affirme Ali, un jeune iranien de 22 ans, rencontré à Islamshahr, une banlieue ouvrière du sud de Téhéran. «S'il est réélu pour quatre ans encore, il va répondre aux attentes des jeunes. Le président n'a pas été trop mou comme le disent certains. Comme dans une guerre, il faut éviter de se faire tuer. Un bon stratège essaie de démoraliser les soldats d'en face et de les faire changer de camp».

En fait, cette stratégie commence à porter ses fruits puisque dans les rangs conservateurs, de plus en plus de personnes critiquent la politique d'obstruction systématique de ces quatre dernières années et demandent une modernisation de la droite. «Nous voulons le règne de la loi. Nous ne voulons plus qu'un petit groupe d'extrémistes se permettre de perturber les rassemblements et les meeting. C'est pour cela que nous avons voté pour le président Khatami. Il y a quatre ans, nous n'avons pas voté pour une personne mais pour les idées, le comportement et les projets de réformes du président Khatami. Mes deux frères sont des martyrs de la guerre Iran-Irak», affirme un autre jeune venu fumer le narguilé dans un café traditionnel. Un passe-temps pour des jeunes qui trouvent pas souvent un travail...

Malgré les nombreux obstacles sur sa route, le président Khatami a réussi à avancer. Certes, une cinquantaine de journaux ont été fermés, mais les réformateurs ont publié une dizaine de nouveaux titres. De même, l'arrestation de plusieurs dizaines de journalistes et de responsables réformateurs et de l'opposition libérale n'a fait que discréditer encore un peu plus les conservateurs. Répondant à un journaliste qui le questionnait à ce sujet, le président a répondu: «Ces gens qui ont payé un prix élevé doivent savoir que nous poursuivons la route. Nous devons être patients. Ce qui compte, c'est de ne pas perdre l'objectif qui est la démocratie et la liberté».

En tout cas, le président Khatami, qui a réussi à assainir la situation économique, la dette extérieure a été ramenée de 25 à 8 milliards de dollars, l'inflation de 30 à 13% et le gouvernement a constitué 12 milliards de dollars de réserves grâce à l'augmentation du prix du pétrole, ainsi qu'à normaliser les relations avec les pays arabes et l'Occident, même si les relations diplomatiques n'ont pas encore été rétablies avec les Etats-Unis, a de nombreux atouts entre les mains. Une large victoire -comme cela semble se dessiner- finira pas neutraliser ses adversaires conservateurs.







par Siavosh  Ghazi

Article publié le 07/06/2001