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Côte d''Ivoire

Gbagbo : l'attitude du FMI est <i>«politique»</i>

Poursuivant sa visite «privée» en France, le président ivoirien était auditionné, mercredi matin, par la commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale. Laurent Gbagbo a vivement critiqué la position des institutions financières internationales à l'égard de la Côte d'Ivoire et a longuement justifié sa position à propos de l'opposant Alassane Ouattara.
C'est un Laurent Gbagbo détendu mais s'exprimant avec son habituel franc-parler, qui a rencontré mercredi les membres de la Commission des Affaires étrangères de l'Assemblée nationale française. Le chef de l'Etat ivoirien, venu demander à la France d'oeuvrer en faveur d'une reprise de l'aide internationale à son pays, n'a pas mâché ses mots : «Je ne comprend pas que l'Union européenne qui a travaillé pendant trente ans avec le régime de parti unique ne veuille pas travailler avec nous», a-t-il lancé, en ajoutant que l'UE, qui a placé la Côte d'Ivoire en observation mais pourrait reprendre prochainement sa coopération, n'a pas de scrupules à travailler avec des dirigeants africains moins démocrates que lui. Le chef de l'Etat ivoirien a poursuivi en estimant «moralement inacceptable» que le Fonds monétaire international lie sa décision de renouer avec la Côte d'Ivoire à celle de Bruxelles. «C'est une décision politique», a-t-il martelé.

«Je suis contre le vagabondage des nationalités»

Parmi les présents, quelques amis de longue date, comme Henri Emmanuelli président de la commission des Finances et le «Monsieur Afrique» du Parti socialiste Guy Labertit , mais aussi des parlementaires inquiets de l'évolution politique en Côte d'Ivoire, à l'image de Pierre Brana, député socialiste de Gironde. Laurent Gbagbo est revenu sur la situation du leader du RDR Alassane Ouattara, exclu des dernières élections présidentielle et législatives en Côte d'Ivoire. «Il a été exclu de l'élection. Je ne suis pas responsable de sa vie». Mais il a répété une position maintes fois réitérées, estimant «malsain pour quelqu'un qui veut être président d'un pays de prendre de façon opportuniste, une nationalité ici et là, au gré de ses intérêts personnels.» «Je suis contre le vagabondage des nationalités», a-t-il ajouté.

Interrogé sur la situation des étrangers et plus généralement des musulmans de Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo est revenu sur ses relations avec le Burkina Faso et le Mali voisins, soupçonnés par Abidjan d'être impliqués dans la tentative de coup d'Etat des 7 et 8 janvier 2001. «Je leur reproche d'être intervenus sans retenue dans le processus politique chez nous», a-t-il déclaré. Avant d'ajouter à propos de leur soutien à Alassane Ouattara, n'avoir pas à «recevoir un président» de la part de ses voisins. «La situation a été aggravée après la tentative de coup d'Etat, ils n'ont pas démenti nos accusations, alors que les assaillants venaient de nos frontières nord», a t-il ajouté.

Le président ivoirien s'est par ailleurs expliqué sur les récents conflits fonciers dans l'ouest de la Côte d'Ivoire, qui ont entraîné le départ d'immigrés burkinabés. «Le vrai problème c'est qu'il n'y a pas de terre pour l'hévéa, l'ananas et le cacao. Quatre-vingt pour cent des conflits opposent des Ivoiriens entre eux. Mais on ne parle que des 20% opposant des Ivoiriens et des étrangers.» Pour Laurent Gbagbo, les voisins de la Côte d'Ivoire doivent comprendre qu'elle «ne peut plus recevoir tout le monde». «De même que les trente glorieuses sont finies en France, c'est fini en Côte d'Ivoire.»

Laurent Gbagbo a enfin insisté sur les problèmes d'insécurité en Côte d'Ivoire. Tout a assurant que des efforts sont faits en ce sens, il a évoqué le rôle de l'armée, qui reste une source d'inquiétude sept mois après la fin d'une transition militaire désastreuse. «Quand je suis arrivé l'armée était devenue une armée mexicaine. Il y avait un officier pour 1,5 soldat», a-t-il affirmé aux députés français, avant d'évoquer la nécessaire mise à la retraite de certains gradés.




par Christophe  Champin

Article publié le 20/06/2001