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Côte d''Ivoire

Plainte en Belgique contre Gbagbo et Gueï

Rescapé du massacre de Yopougon à l'automne 2000, un jeune Ivoirien de 19 ans réfugié en Belgique porte plainte notamment contre l'actuel chef de l'Etat Laurent Gbagbo, et contre son prédecesseur Robert Gueï pour «crimes contre l'humanité».

De notre correspondante à Bruxelles

La justice belge a été saisie jeudi matin de plaintes déposées par des Ivoiriens à l'encontre du président de la Côte d'Ivoire Laurent Gbagbo, des ministres de la Défense Moïse Lida Kouassi et de l'Intérieur Emile Boga Doudou ainsi que de l'ancien chef de l'Etat le général Robert Gueï.

Les demandes de mise en accusation portent sur des:
-crimes contre l'humanité, au titre de la loi de 1999 qui prévoit la compétence universelle des tribunaux belges pour ce genre de crimes.
-crimes de tortures et actes de barbarie tels que visés par la Convention des Nations-Unies de décembre 1984, ratifiée par la Belgique en juin 1999 et par la Côte d'Ivoire en septembre 95.
-crimes d'arrestations arbitraires, enlèvements, séquestrations et viols.

Avec l'aide de l'ONG belge "Prévention génocide", une personne, Brahima Touré, s'est constituée partie civile au nom de l'ensemble des 150 plaignants, victimes ou proches de victimes de tortures, viols, assassinats commis par les forces de l'ordre ivoiriennes en octobre, novembre, et décembre 2000.

Sur place l'enquête est au point mort

Brahima Touré habite actuellement en Belgique où il a obtenu le statut de réfugié politique. Il est le seul rescapé du charnier de Yopougon qui fit 57 morts -essentiellement des étrangers et des membres de l'ethnie Dioula -en octobre 2000.Les rapports des organisations de défense des droits de l'Homme comme Human Rights Watch, la FIDH, Reporters sans frontières, ont conclu à la responsabilité des forces de l'ordre dans ce massacre et "s'interrogent sur les lenteurs et les lacunes de l'enquête".

Préventions génocide nouvellement créée en Belgique par des chercheurs en sciences humaines, a effectué une enquête de plusieurs mois en Côte d'Ivoire. L'ONG y a réalisé un film long-métrage Côte d'ivoire, poudrière identitaire. Basé sur de nombreux témoignages, il retrace la dynamique du concept d'ivoirité qui classe la socièté «en trois catégories, les Ivoiriens purs à 100%, les Ivoiriens douteux ou de circonstance et les étrangers». Pour le fondateur de Préventions génocides, Benoît Scheuer, «la Côte d'Ivoire est au bord du gouffre et il existe un risque d'épuration ethnique de très grande ampleur qu'il faut enrayer».

Dans ce contexte, le dépot de plaintes et la demande d'ouverture d'un procès à l'encontre des quatre personnalités visées a également un caractére préventif. Il s'agit, explique M. Scheuer, d'envoyer un signal clair aux candidats tortionnaires et génocidaires qu'ils ne pourront pas continuer à agir impunément. Mais aussi d'encourager la réconciliation en Côte d'Ivoire qui ne peut pas se faire sans justice.

Pour l'avocat des parties civiles Maitre Georges-Henri Beauthier, il est indispensable que des enquêteurs belges se rendent rapidement sur place pour y mener des investigations comme cela a été le cas dans le cadre du procès en Belgique des quatre génocidaires rwandais.



par Anne-Marie  Mouradian

Article publié le 28/06/2001