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Union africaine

Deux favoris et un outsider

Le prochain secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) sera élu lors du sommet de Lusaka, début juillet. La course s'annonce serrée entre les trois candidats restés en piste.
Qui succédera à Salim Ahmed Salim au secrétariat général de l'OUA ? A la veille du sommet de l'Organisation de l'unité africaine, du 9 au 11 juillet prochain à Lusaka (Zambie), les tractations vont bon train pour le poste que doit en principe quitter le Tanzanien après deux mandats successifs. L'enjeu est important. Car le futur secrétaire général est appelé à devenir le président de la Commission de l'Union africaine, une fois ses institutions mises en place. Or, l'étendue de ses pouvoirs n'est pas encore déterminée.

Trois candidat restent en lice, après le retrait récent du Sénégalais Ibrahima Fall, actuel secrétaire général adjoint des Nations Unies : l'Ivoirien Amara Essy, le Namibien Theo Ben Gurirab et le Guinéen Lansana Kouyaté.

Le premier a plus d'un atout. Ancien ministre des Affaires étrangères de Côte d'Ivoire, diplomate de renommée internationale, il bénéficie du soutien sans faille de son gouvernement et d'un impressionnant carnet d'adresse. Président de l'Assemblée générale des Nations Unies en 1994-95, il a conservé de nombreuses relations à travers le monde, parmi lesquelles Amr Moussa, ancien ministre des Affaires étrangères égyptien et nouveau secrétaire général de la Ligue Arabe. Une amitié qui peut se révéler utile pour obtenir les voix des Etats arabes.

Amara Essy en bonne position

Selon nos informations, le président Omar Bongo, dont on connaît l'influence, a par ailleurs déjà fait son choix, à l'instar du chef de l'Etat sénégalais Abdoulaye Wade. Si on y ajoute le soutien affiché du guide de la révolution libyenne, «père» de l'Union africaine, dont la voix pèse actuellement lourd, très lourd, en Afrique, Amara Essy fait figure de favori. A moins que l'option, vraisemblablement écartée, de la reconduction de Salim Ahmed Salim pour un mandat de transition d'un ou deux ans, jusqu'à la mise en place des institutions de l'Union africaine, soit retenue, afin d'ouvrir la voie au bientôt retraité président malien Alpha Oumar Konaré.

Seule ombre au tableau, soulignent certains observateurs, le candidat ivoirien vient d'un pays dont l'image a été ternie ces derniers mois par des violences post-électorales, visant notamment des musulmans. Sauf qu'il est lui-même de confession islamique. Autant dire que pour des autorités ivoiriennes en quête de reconnaissance, l'élection d'Amara Essy constituerait un formidable atout.

Son concurrent le plus sérieux, Theo Ben Gurirab, est également une personnalité haute en couleur. Ministre des Affaires étrangères de Namibie, il était le principal négociateur des accords qui ont mené, en 1990, à l'indépendance de cette ancienne «colonie» de l'Afrique du Sud. Diplomate de renom, il a comme Amara Essy présidé l'Assemblée générale des Nations Unies, en 1999-2000. «Coaché» par le grand voisin sud-africain, il peut logiquement compter sur l'appui des pays d'Afrique australe.

L'Afrique australe estime que son tour est arrivé», souligne un diplomate d'Afrique centrale. Néanmoins si les autres pays membres de la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), comme la RDC, Maurice et les Seychelles, votent pour le candidat namibien, il faudra encore convaincre le reste des Etats africains. Avec un handicap de taille : la Namibie est actuellement impliquée dans la guerre en République démocratique du Congo.

Face aux deux poids lourds que sont Amara Essy et Theo Ben Gurirab, Lansana Kouyaté, autre candidat de l'Afrique de l'Ouest, fait presque figure d'outsider. Secrétaire général de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), il met certes en avant son expérience à la tête d'une organisation pionnière en matière d'intégration régionale au sud du Sahara et son rôle dans la résolution des conflits au Liberia et en Sierra Leone. Il bénéficie par ailleurs du soutien non négligeable du Nigeria. Mais outre un réseau personnel moins étendu qu'un Amara Essy, il risque de payer les relations exécrables du président guinéen Lansana Conté avec plusieurs pays de la région.

Il n'empêche, Lansana Kouyaté s'imagine parfaitement dans le fauteuil de secrétaire général. Ce qui pourrait gêner Amara Essy. «Le maintien éventuel de sa candidature, à défaut d'un accord pour une candidature unique de l'Afrique de l'Ouest, pourrait coûter des voix à son challenger ivoirien», analyse un diplomate africain. Autant dire que d'ici le sommet de Lusaka, le ballet des émissaires va se poursuivre et les coups de téléphones entre chefs d'Etat vont redoubler.



par Christophe  Champin

Article publié le 27/06/2001