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Bosnie

Milosevic, en attendant les autres...

L'ancien n°1 serbe pourrait être rejoint prochainement dans les cellules du Tribunal pénal international de La Haye par des Serbes de Bosnie soupçonnés de crimes de guerre. «L'entité» serbe de Bosnie annonce en effet son intention de collaborer avec le Tribunal.
De notre correspondant dans les Balkans

Les bonnes surprises s'accumulent pour le Tribunal pénal international de La Haye. Le Parlement de la Republika Srpska, «l'entité» serbe de Bosnie-Herzégovine, a adopté une proposition de loi sur sa coopération avec la juridiction internationale, et le Premier ministre de cette «entité» Mladen Ivanic, doit rencontrer ce jeudi la procureure générale Carla del Ponte après avoir déclaré mercredi soir qu'il était «prêt au transfèrement» de Radovan Karadzic et de Ratko Mladic au Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie..

Le membre serbe de la présidence tripartite de Bosnie, Zivko Radisic, a reconnu que «la Republika Srspka peut et doit remplir les obligations imposées par les accords de paix de Dayton, y compris envers le TPI». Jusqu'à présent, les autorités de Banja Luka avaient pourtant montré bien peu d'empressement à collaborer avec la Cour de La Haye. Le bureau du Haut représentant international en Bosnie, et la mission de l'OSCE à Sarajevo se montrent sceptiques, en estimant qu'il faudrait une «action de terrain» pour convaincre de la bonne volonté des autorités serbes. En effet, jusqu'à présent, toutes les arrestations d'inculpés sur le territoire de la Republika Srpska sont à mettre à crédit des forces internationales déployées en Bosnie. En avril 2000, les soldats de la SFOR avaient ainsi interpellé Momcilo Krajisnik, l'ancien bras droit de Radovan Karadzic, le chef des Serbes de Bosnie durant la guerre, à son domicile de Pale. Il y a quelques mois, c'était au tour de Biljana Plavsic, la présidente de la Republika Srpska après le retour à la paix, de se constituer prisonnière.

Les chefs de guerre serbes de Bosnie en ligne de mire

Les regards sont bien évidemment désormais braqués sur le sort de Radovan Karadzic et du général Ratko Mladic, l'ancien chef de guerre. La nouvelle volonté de coopération des autorités de Banja Luka ne scelle pas pour autant automatiquement le sort des deux hommes, qui se cachent depuis la conclusion des accords de Dayton, en 1995. Ratko Mladic a longtemps résidé dans une caserne de Han Pijesak, son ancien quartier général, et l'homme jouit de puissantes protection dans l'armée de Republika Srpska et dans celle de la Fédération yougoslave, ainsi que dans les services secrets militaires. Ratko Mladic partageait probablement son temps entre la Republika Srpska et la Serbie, du moins jusqu'à la chute de Slobodan Milosevic. Il aurait encore été vu dans la capitale serbe quelques jours avant l'arrestation de l'ancien maître de Belgrade par la police serbe, le 1er avril dernier.

Pour sa part, Radovan Karadzic ne compte pas sur la protection de l'armée mais sur celle de l'Eglise serbe orthodoxe. Il aurait envisagé, peu après les accords de Dayton, de demander l'asile au Mont Athos, la «république monastique» du nord de la Grèce, qui proclame son extra-territorialité par rapport à l'Etat grec mais, plus probablement, Radovan Karadzic a dû se contenter de trouver refuge et soutien auprès des monastères de Bosnie, voire de Serbie et du Monténégro. Le métropolite serbe du Monténégro, Mgr Amfilohije Radovic, pourrait ainsi compter au rang des principaux protecteurs de l'ancien président des Serbes de Bosnie.

La décision politique des autorités de Banja Luka pourrait précipiter la chute d'autres inculpés moins connus, mais les protections particulières dont jouissent Karadzic et Mladic leur assurent sûrement encore un peu d'impunité. Si les dirigeants politiques serbes de Bosnie ont compris que la coopération avec le TPI était désormais inéluctable, il est par contre peu probable que l'opinion accepte ce «réalisme» imposé. Dans les campagnes de l'est de la Bosnie, le portrait de Radovan Karadzic trône toujours en bonne place dans les maisons, aux côtés des icônes des saints protecteurs.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 05/07/2001