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Union africaine

De l'OUA à l'UA

Le sommet de l'Organisation de l'unité africaine qui débute ce lundi à Lusaka (Zambie) consacrera la naissance d'une nouvelle organisation panafricaine : l'Union africaine. Un projet ambitieux que tous les états ne semblent pas partager.
Le 37ème sommet de l'Organisation de l'unité africaine qui s'ouvre ce lundi 9 juillet à Lusaka (Zambie) sera aussi le dernier. Car l'OUA n'a plus d'existence juridique depuis la naissance officielle de l'Union africaine (UA), la nouvelle organisation panafricaine créée le 26 mai dernier à l'initiative du colonel libyen Mouammar Kadhafi et qui est appelée à la remplacer définitivement, après une année de transition, lors de son premier sommet, en 2002, en Afrique du sud.

Mais la lente mutation de l'OUA en UA est d'ores et déjà aussi douloureuse et ambiguë que la longue existence de l'Organisation de l'unité africaine : née en 1963 à Addis Abeba l'OUA a souvent fait la preuve de son inefficacité notamment face aux conflits qui déchirent depuis les années 60 le continent africain et aux principaux problèmes qu'il doit affronter actuellement (marginalisation, sous-développement, Sida). C'est d'ailleurs pour cela que le colonel Kadhafi n'a cessé ces dernières années de prôner une véritable réunification du continent, et la création des Etats-Unis d'Afrique, sur le modèle des Etats-Unis d'Amérique. Mais, faute d'accord et d'enthousiasme de la part des autres états africains, le chef d'Etat libyen a dû réviser quelque peu ses ambitions et se contenter d'un projet qui ressemble comme une goutte d'eau au projet plus ou moins fédéraliste en cours sur le continent européen.

Comme l'Union européenne, en effet, l'Union africaine devrait se doter peu à peu d'une Commission, d'un Conseil des ministres, d'un Parlement, d'une Banque centrale, d'un Fonds monétaire et d'une Cour de Justice. Un «modèle» qui a vite montré ses limites, notamment lorsque l'UE est passée à quinze états membres. Pour cela, elle tente actuellement par tous les moyens de changer son propre mode de fonctionnement à la veille de l'entrée dans l'UE d'une quinzaine de pays d'Europe centrale ou orientale. Question : comment ce modèle pourra-t-il fonctionner sur le continent africain, qui compte plus de cinquante pays indépendants ?

Wade: "Il y a des moments où il faut faire un saut politique, comme l'a fait l'Europe".

Lors de leur propre sommet préparatoire, les ministres des Affaires étrangères ont été unanimes à déclarer qu'il fallait bâtir au plus vite «les fondations» de l'Union africaine. Mais il faudra aussi choisir de nouveaux dirigeants, à commencer par le futur Président de la Commission africaine, qui pourrait prendre la place du secrétaire général de l'OUA. A moins que l'actuel secrétaire général Ahmed Salim Ahmed ne soit appelé à assurer l'intérim d'une transition nécessairement difficile et délicate, en raison surtout des divergences profondes qui divisent les pays africains.

L'UA naît handicapée par les mêmes clivages entre partisans et adversaires d'un véritable fédéralisme qui ont constamment accompagné l'OUA comme l'UE et son «ancêtre», la Communauté européenne. Des clivages qui semblent diviser notamment la plupart des pays francophones et anglophones, à l'image de ce qui s'était passé lors de l'accession à l'indépendance de pays issus de deux colonisations fort différentes : Paris avait alors privilégié la µbalkanisation' de ses territoires (AEF et AOF) et découragé toute tentative de regroupement, tandis que Londres avait toujours préféré un cadre unitaire pour un pays aussi grand et peuplé que le Nigeria - y compris lors de la guerre du Biafra - et favorisé le regroupement de ses territoires est-africains.

Sans doute conscients des difficultés à venir, deux leaders africains parmi les plus importants du moment - le Sénégalais Wade et le Sud-africain Mbeki - ont décidé de mettre en commun leurs plans respectifs, Omega et MAP, qui visent à lancer le redémarrage politique et économique du continent africain. Ce mariage de raison est intervenu vendredi dernier, à Pretoria : il s'appelle Initiative africaine (IA) et devrait voir le jour officiellement à l'issue du sommet de l'OUA de Lusaka. «Par ce programme les dirigeants africains s'engagent envers le peuple africain et le monde à oeuvrer ensemble pour reconstruire le continent, lit-on dans son préambule. L'Afrique reconnaît qu'elle détient la clef de son propre développement». Cette initiative identifie clairement quatre «priorités immédiates» : les maladies transmissibles (Sida, paludisme, tuberculose), les technologies de l'information, la réduction de la dette et l'accès aux marchés.

De son côté le président Wade a lancé un véritable plaidoyer pour une «stratégie globale», estimant que «le développement séparé ne marche plus». Le président sénégalais et ceux d'Afrique du sud, du Nigéria, d'Algérie et d'Egypte devaient se réunir dimanche soir à Lusaka pour peaufiner cette Initiative africaine, avant de la soumettre aux autres chefs d'Etat. «Je ne crois pas à l'intégration progressive, par approximations successives, a précisé Abdoulaye Wade. Il y a des moments où il faut faire un saut politique, comme l'a fait l'Europe. On a fait un saut politique en créant l'Union africaine ».



par Elio  Comarin

Article publié le 08/07/2001 Dernière mise à jour le 27/01/2005 à 14:20 TU