Balkans
Macédoine: combats à l'heure de la trêve
Alors qu'une trêve signée sous l'égide de l'Otan est théoriquement entrée en vigueur le 5 juillet à minuit, les combats se poursuivent dans l'ouest de la Macédoine et le dialogue politique esquissé par les médiateurs s'annonce difficile.
De notre correspondant dans les Balkans
Jamais la Macédoine n'aura autant hésité entre la guerre et la paix. Alors même que la guérilla albanaise acceptait le principe d'un cessez-le-feu, de violents combats faisaient rage à Tetovo, la principale ville de population albanaise du pays. Des obus de mortier se sont abattus sur le centre ville, et l'on a dénombré plus d'une dizaine de blessés. Avec ce dernier «baroud d'honneur», les belligérants voulaient sûrement conforter leurs positions respectives avant la trêve entrée en vigueur à minuit et une minute, dans la nuit de jeudi à vendredi.
L'émissaire américain James Pardew et le représentant européen François Léotard peuvent cependant se targuer d'avoir obtenu en peu de temps un joli succès. Le dialogue politique, au point mort depuis deux semaines, a été remis sur ses rails, et le Président macédonien Boris Trajkovski a explicitement déclaré que ce dialogue pouvait porter sur une modification de la constitution. Les Albanais de Macédoine réclament une modification du préambule de cette constitution, qui définit le pays comme l'Etat-nation des seuls Slaves macédoniens. Les discussions pourraient se baser sur les suggestions formulées par Robert Badinter, ancien président du Conseil constitutionnel français, qui recommande notamment une définition «citoyenne» et non plus nationale de l'Etat. L'article 19 de la constitution, qui fait de l'Eglise orthodoxe macédonienne la religion «nationale» du pays, pourrait aussi être remis en cause, tandis que le statut légal de la langue albanaise serait revalorisé et que le pays s'engagerait dans la voie d'une décentralisation renforçant les compétences des autonomies locales. Les partis albanais continuent pour autant de s'adonner aux joies dangereuses de la surenchère, exigeant par exemple un droit de veto au parlement.
L'impossible dialogue politique
Sur le plan militaire, la guérilla a non seulement accepté le cessez-le-feu, directement négociée avec elle par le représentant de l'Otan dans les Balkans, Pieter Feith, mais elle pourrait même accepter le principe d'un désarmement contrôlé par les troupes de l'Alliance atlantique. L'Otan envisage de déployer 3000 hommes en Macédoine. Encore faudra-t-il que le cessez-le-feu soit respecté et que le dialogue politique enregistre des avancées significatives avant le 15 juillet, pour envisager le début de la procédure de désarmement «dès la troisième semaine de juillet». La mission de l'Otan durerait trente jours. Pieter Feith a rencontré le chef de l'UCK, Ali Ahmeti, mercredi soir, dans la ville de Prizren, au Kosovo. Le gouvernement de Skopje a tout lieu de se féliciter de la médiation internationale, qui lui a permis d'éviter toute rencontre directe avec des représentants de la guérilla.
On peut cependant rester sceptique quant aux chances de voir le cessez-le-feu réellement respecté. Les différents groupes de guérilla qui opèrent sous le label commun d'UCK sont en effet fort mal coordonnés entre eux, et il n'est pas certain que les décisions prises par l'état-major de la guérilla soient forcément respectées par tous ces groupes. Le dialogue politique, pour sa part, risque d'être menacé par le jusqu'au-boutisme des partis albanais, tandis que la population slave macédonienne est moins disposée que jamais à accepter les compromis indispensables. «Si l'on remet en cause le préambule de la constitution, l'espérance nationale des Macédoniens aura été trahie, et nous serons prêts à prendre les armes à notre tour, s'il le faut, pour chasser nos propres dirigeants», menacent ainsi des militants nationalistes du VMRO de Kocani, dans l'est de la Macédoine. Après plus de quatre mois d'une bien étrange guerre, jamais le fossé de peur, de méfiance et d'incompréhension qui sépare les différentes communautés nationales de Macédoine n'aura été aussi grand.
Jamais la Macédoine n'aura autant hésité entre la guerre et la paix. Alors même que la guérilla albanaise acceptait le principe d'un cessez-le-feu, de violents combats faisaient rage à Tetovo, la principale ville de population albanaise du pays. Des obus de mortier se sont abattus sur le centre ville, et l'on a dénombré plus d'une dizaine de blessés. Avec ce dernier «baroud d'honneur», les belligérants voulaient sûrement conforter leurs positions respectives avant la trêve entrée en vigueur à minuit et une minute, dans la nuit de jeudi à vendredi.
L'émissaire américain James Pardew et le représentant européen François Léotard peuvent cependant se targuer d'avoir obtenu en peu de temps un joli succès. Le dialogue politique, au point mort depuis deux semaines, a été remis sur ses rails, et le Président macédonien Boris Trajkovski a explicitement déclaré que ce dialogue pouvait porter sur une modification de la constitution. Les Albanais de Macédoine réclament une modification du préambule de cette constitution, qui définit le pays comme l'Etat-nation des seuls Slaves macédoniens. Les discussions pourraient se baser sur les suggestions formulées par Robert Badinter, ancien président du Conseil constitutionnel français, qui recommande notamment une définition «citoyenne» et non plus nationale de l'Etat. L'article 19 de la constitution, qui fait de l'Eglise orthodoxe macédonienne la religion «nationale» du pays, pourrait aussi être remis en cause, tandis que le statut légal de la langue albanaise serait revalorisé et que le pays s'engagerait dans la voie d'une décentralisation renforçant les compétences des autonomies locales. Les partis albanais continuent pour autant de s'adonner aux joies dangereuses de la surenchère, exigeant par exemple un droit de veto au parlement.
L'impossible dialogue politique
Sur le plan militaire, la guérilla a non seulement accepté le cessez-le-feu, directement négociée avec elle par le représentant de l'Otan dans les Balkans, Pieter Feith, mais elle pourrait même accepter le principe d'un désarmement contrôlé par les troupes de l'Alliance atlantique. L'Otan envisage de déployer 3000 hommes en Macédoine. Encore faudra-t-il que le cessez-le-feu soit respecté et que le dialogue politique enregistre des avancées significatives avant le 15 juillet, pour envisager le début de la procédure de désarmement «dès la troisième semaine de juillet». La mission de l'Otan durerait trente jours. Pieter Feith a rencontré le chef de l'UCK, Ali Ahmeti, mercredi soir, dans la ville de Prizren, au Kosovo. Le gouvernement de Skopje a tout lieu de se féliciter de la médiation internationale, qui lui a permis d'éviter toute rencontre directe avec des représentants de la guérilla.
On peut cependant rester sceptique quant aux chances de voir le cessez-le-feu réellement respecté. Les différents groupes de guérilla qui opèrent sous le label commun d'UCK sont en effet fort mal coordonnés entre eux, et il n'est pas certain que les décisions prises par l'état-major de la guérilla soient forcément respectées par tous ces groupes. Le dialogue politique, pour sa part, risque d'être menacé par le jusqu'au-boutisme des partis albanais, tandis que la population slave macédonienne est moins disposée que jamais à accepter les compromis indispensables. «Si l'on remet en cause le préambule de la constitution, l'espérance nationale des Macédoniens aura été trahie, et nous serons prêts à prendre les armes à notre tour, s'il le faut, pour chasser nos propres dirigeants», menacent ainsi des militants nationalistes du VMRO de Kocani, dans l'est de la Macédoine. Après plus de quatre mois d'une bien étrange guerre, jamais le fossé de peur, de méfiance et d'incompréhension qui sépare les différentes communautés nationales de Macédoine n'aura été aussi grand.
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 06/07/2001