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Balkans

Macédoine: reprise du dialogue politique

La Macédoine semble avoir réussi, une fois de plus, à éviter de sombrer dans une guerre civile généralisée. Alors que les autorités de Skopje avaient violemment accusé l'OTAN et l'Union européenne de «partialité» en faveur des Albanais, les efforts de médiation internationale ont porté leurs fruits.
De notre correspondant dans les Balkans

Sur le plan militaire, l'émissaire de l'OTAN, Pieter Feith, a réussi à arracher un accord de cessez-le-feu à l'UCK. La guérilla albanaise a même accepté de revenir aux positions qu'elle occupait le 5 juillet dernier, lors de la conclusion du précédent cessez-le-feu. Jeudi matin, les guérilleros albanais avaient quitté toutes leurs positions dans le centre de Tetovo, où la vie reprenait un cours presque normal. Seuls des barricades de sacs de sable abandonnées au travers des rues rappelait l'intensité des combats des derniers jours. L'UCK a également abandonné les points de contrôle qu'elle avait établis sur la route menant de Tetovo à la frontière du Kosovo. De la sorte, les villageois macédoniens chassés au cours des affrontements des derniers jours ont pu commencer à regagner leurs domiciles, dans la soirée de jeudi, sous escorte des Nations unies.

Sur le plan politique, le responsable de la politique étrangère européenne, Javier Solana, a annoncé que le dialogue entre les partis macédoniens et albanais, interrompu depuis une semaine, devait reprendre incessamment. Les autorités macédoniennes semblent se satisfaire du retrait de l'UCK et n'auraient pas mis de conditions supplémentaires à la reprise de ce dialogue. On ignore pourtant encore quelles bases le dialogue pourra reprendre, puisque les Macédoniens avaient rejeté le document proposé par le médiateur européen François Léotard et l'émissaire américain James Pardew, qui ferait la part trop belle aux revendications albanaises.

Un mandat d'arrêt contre le chef de l'UCK

Le ministère de l'Intérieur macédonien a pourtant annoncé qu'un mandat d'arrêt international avait été émis contre Ali Ahmeti, le chef de l'UCK de Macédoine, et dix autres dirigeants de la guérilla. Disposant de la nationalité helvétique, Ali Ahmeti réside la plupart du temps au Kosovo. Ce mandant d'arrêt est donc un pavé jeté dans la cour de l'administration internationale de la province. Si Skopje ne menace plus de rejeter toute médiation internationale, les dirigeants macédoniens n'en somment pas moins l'OTAN et la Mission des nations unies au Kosovo de s'engager concrètement contre la guérilla. Il est vrai qu'Ali Ahmeti était déjà interdit de séjour aux USA et qu'il y a quelques mois, Georges Robertson avait traité les dirigeants de l'UCK de «voyous criminels». Ce mandat d'arrêt risque également d'être perçu comme une nouvelle provocation par la communauté albanaise. Les partis politiques albanais réclament en effet depuis des semaines une amnistie pour tous les combattants de l'UCK.

Malgré la satisfaction affichée jeudi soir par les représentants internationaux, les chances d'un véritable règlement pacifique de la crise restent bien fragiles. A Tetovo, tout le monde se proclame ainsi favorable à une solution négociée, mais Abdurrahim, le propriétaire d'un petit magasin de photos reconnaît volontiers que la peur a changé de camp. «Les Macédoniens ont des avions et des canons, mais l'UCK a montré sa puissance militaire». Le dialogue politique? Abdurrahim est beaucoup plus sceptique que la majorité des Albanais: «il est trop tard, beaucoup trop tard. Dix années ont été perdues depuis l'indépendance de ce pays. Les Macédoniens n'accepteront jamais de faire de véritables concessions. Alors, oui, ce sera la guerre, et les frontières seront modifiées».



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 27/07/2001