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Proche-Orient

L'armée israélienne s'installe dans la guerre

L'Intifada pourrait durer jusqu'en 2006 et risque de déboucher sur un conflit régional. Ces sombres perspectives figurent dans un document de l'état-major israélien.
A en croire l'état-major israélien, l'Intifada pourrait durer jusqu'en 2006 et dégénérer en conflit armé régional. Cette sombre prédiction figure dans un document élaboré par le service de planification des armées pour le compte de l'état-major. Pourquoi 2006 et non pas 2005 ou 2007 ? Tout simplement parce que les auteurs de l'étude avaient en tête le plan quinquennal de programmation militaire qui court de 2001 à 2006 qui est actuellement examiné par les chefs de l'armée israélienne avant d'être soumis pour approbation à l'échelon politique.

La dimension budgétaire de ce document, publié ce jeudi par le quotidien Haaretz, ne doit donc pas être ignorée. Comme toutes les armées du monde, celle d'Israël se bat pour conserver, et si possible, augmenter son budget et la recette est universelle : noircir le tableau pour justifier les moyens financiers demandés pour contrer la menace.

Pourtant, on aurait sans doute tort de n'y voir qu'un exercice de lobbying budgétaire. L'analyse présentée reflète parfaitement les déclarations successives des chefs de l'armée, à commencer par le chef d'état-major Shaul Mofaz qui n'a cessé de répéter, ces derniers mois, que l'Autorité palestinienne était devenue une «entité terroriste» qu'il fallait détruire, et que le retrait israélien du sud du Liban en mai 2000 n'avait en rien diminué les périls à la frontière nord d'Israël. Dans l'évaluation de la situation par l'armée israélienne, on peut lire que ces deux fronts sont «stables mais fragiles». Les analystes militaires ne croient pas à une reprise du dialogue politique avec Yasser Arafat. Selon eux, tout ce que l'on peut espérer est un accord sur une pause dans la violence, tout en précisant qu'ils n'y croient pas car Arafat estime que le temps joue en sa faveur. Ils ne pensent pas davantage que le président palestinien ait perdu la main, mais reconnaissent qu'il doit désormais compter avec une influence croissante des extrémistes palestiniens.

Risque de guerre régionale

Au plan régional, le rapport estime que le risque d'une attaque-surprise comme celle d'octobre 1973, a diminué, sans avoir disparu, mais recommande néanmoins de se préparer au pire, c'est-à-dire à une guerre avec plusieurs de ses voisins, sans écarter les risques émanant de pays comme l'Irak et l'Iran dotés de missiles à longue portée.

Si vis pacem, para bellum («si tu veux la paix, prépare la guerre») dit l'adage romain, et se préparer au pire ne signifie donc pas nécessairement qu'il va advenir. Néanmoins, on ne peut manquer de remarquer la cohérence de ces recommandations avec la politique suivie par le gouvernement d'Ariel Sharon consistant à délégitimer l'Autorité palestinienne d'Arafat. Ce dernier est en effet désormais rejeté comme interlocuteur, ses forces de sécurité sont méthodiquement détruites, son impuissance renforçant par contrecoup les islamistes du Hamas dont Israël exige parallèlement l'arrestation. Certes, Sharon a autorisé Shimon Peres à reprendre langue avec les Palestiniens mais à trois conditions : qu'il ne rencontre pas Yasser Arafat lui-même, que le dialogue porte sur la sécurité à l'exclusion de tout sujet politique, et qu'il soit flanqué en toute occasion d'un général pour le chaperonner.

Dans ce contexte, le scénario pour le pire envisagé par les stratèges de Tsahal prend une forte valeur prédictive.



par Olivier  Da Lage

Article publié le 16/08/2001