Monnaie unique européenne
L'euro va coûter cher aux Allemands
En Allemagne, ou tout bouleversement monétaire suscite l'inquiétude, on n'est guère satisfait d'abandonner le mark, symbole de stabilité et de prospérité, au profit de l'euro. D'autant que les banques annoncent qu'elles feront payer le transfert.
De notre correspondant à Berlin
Il y a environ un mois, un beau dimanche matin, les Allemands ont été mis en état de choc dès leur réveil : l'hebdomadaire dominical Bild am Sonntag, le plus grand du pays, annonçait que la Banque postale, qui gère les comptes courants et l'épargne de plusieurs dizaines de millions de citoyens d'outre-Rhin, prendrait une «commission de change» lors du passage à l'euro à partir du 1er janvier 2002. Radios et télévisions emboîtaient le pas aussitôt, matraquant la nouvelle à qui mieux mieux. Résultat : en quelques jours, la popularité de l'euro, déjà bien faible au pays du deutschmark tout puissant, fléchissait encore dans les sondages.
Deux jours plus tard, Irma, 71 ans, Berlinoise de l'Est, tempêtait devant le guichet des comptes postaux de la grande poste de l'Alexanderplatz : «C'est la troisième fois en une vie que l'Etat me croque mes économiesà En 1949, je n'étais pas bien vieille, mais mon petit carnet d'épargne libellé en reichsmarks a été déprécié quand la RDA a répondu à la création du deutschemark occidental en se dotant d'une propre monnaieà une monnaie de singe dont on sait ce qu'il est advenuà En 1990, lors de la réunification, quoiqu'on en dise, j'ai aussi laissé des plumes. C'est seulement 4 000 marks par personne qui ont été changés en DM au taux de un pour un. Tout le reste n'a été changé qu'à deux marks-est contre un DM». Furieuse, Irma fulmine : «Et maintenant, la Poste veut me faire payer cinq euros chaque fois que j'amènerai des marks pour avoir des eurosà C'est une honteà C'est les Grecs et les Italiens qu'on devrait taxer quand ils changeront leurs billets de Monopoly en argent européenà Sans l'Allemagne, l'euro ne serait plus face au dollar qu'un petit tas de cendres !...»
Méfiance naturelle
La Banque postale allemande s'est dépêchée de démentir toute velléité de faire payer «à ses clients» quelque opération de change que ce soit entre le mark et l'euro. A condition, est-il précisé dans un communiqué conjoint de tous les grands instituts financiers du pays, «qu'il s'agisse de quantités de monnaie usuellement gardées en liquide dans un ménage». «Qu'est-ce à dire ?» demandent les médias avec insistance. La question n'est pas superflue dans un pays, où l'on reprochait certes aux Français de thésauriser des pièces d'or dans des lessiveuses et d'empêcher ainsi le développement de l'économie, mais où l'on est apparemment tout aussi «collectionneur». Dans les bas de laine et les tirelires d'Allemagne, dorment 8,5 milliards de pièces allant de un pfennig à cinq DM, soit environ 18 % de toutes les pièces en circulation dans le pays !
A la Fédération des banques allemandes, on tient sur une éventuelle commission de change entre le mark et l'euro un discours ambigu. «Toutes les banques changeront sans frais les avoirs de leurs clients. Elles changeront également gratuitement les liquidités de leurs clients, dans les conditions précitées. Mais, il est évident que si quelqu'un qui n'a pas de compte chez nous arrive avec une brouette remplie de liasses de billets de 100 DM et de sacs de pièces, l'opération ne sera pas gratuite. De toute façon, la législation sur la lutte contre la criminalité limite très fortement toute transaction en liquide».
Le cas d'Irma illustre l'habitude qu'ont les Allemands de souffrir des bouleversements monétaires. Et leur méfiance naturelle, face à ce genre de changement, est encore accrue par le fait que tous les établissements bancaires du pays s'arrogent le droit de réclamer un véritable tribut à leurs clients, quand ceux-ci effectuent une transaction par carte de crédit, même dans la zone euro, alors que la valeur de la monnaie européenne est invariable. Quant à l'échange de monnaies étrangères de la zone euro (francs français ou belges, lires, drachmes ou pesetas ramenées de vacances) les banques allemandes le feront bel et bien payer. Touristes, attention ! Vos banques pourraient bien avoir les mêmes idées...
Il y a environ un mois, un beau dimanche matin, les Allemands ont été mis en état de choc dès leur réveil : l'hebdomadaire dominical Bild am Sonntag, le plus grand du pays, annonçait que la Banque postale, qui gère les comptes courants et l'épargne de plusieurs dizaines de millions de citoyens d'outre-Rhin, prendrait une «commission de change» lors du passage à l'euro à partir du 1er janvier 2002. Radios et télévisions emboîtaient le pas aussitôt, matraquant la nouvelle à qui mieux mieux. Résultat : en quelques jours, la popularité de l'euro, déjà bien faible au pays du deutschmark tout puissant, fléchissait encore dans les sondages.
Deux jours plus tard, Irma, 71 ans, Berlinoise de l'Est, tempêtait devant le guichet des comptes postaux de la grande poste de l'Alexanderplatz : «C'est la troisième fois en une vie que l'Etat me croque mes économiesà En 1949, je n'étais pas bien vieille, mais mon petit carnet d'épargne libellé en reichsmarks a été déprécié quand la RDA a répondu à la création du deutschemark occidental en se dotant d'une propre monnaieà une monnaie de singe dont on sait ce qu'il est advenuà En 1990, lors de la réunification, quoiqu'on en dise, j'ai aussi laissé des plumes. C'est seulement 4 000 marks par personne qui ont été changés en DM au taux de un pour un. Tout le reste n'a été changé qu'à deux marks-est contre un DM». Furieuse, Irma fulmine : «Et maintenant, la Poste veut me faire payer cinq euros chaque fois que j'amènerai des marks pour avoir des eurosà C'est une honteà C'est les Grecs et les Italiens qu'on devrait taxer quand ils changeront leurs billets de Monopoly en argent européenà Sans l'Allemagne, l'euro ne serait plus face au dollar qu'un petit tas de cendres !...»
Méfiance naturelle
La Banque postale allemande s'est dépêchée de démentir toute velléité de faire payer «à ses clients» quelque opération de change que ce soit entre le mark et l'euro. A condition, est-il précisé dans un communiqué conjoint de tous les grands instituts financiers du pays, «qu'il s'agisse de quantités de monnaie usuellement gardées en liquide dans un ménage». «Qu'est-ce à dire ?» demandent les médias avec insistance. La question n'est pas superflue dans un pays, où l'on reprochait certes aux Français de thésauriser des pièces d'or dans des lessiveuses et d'empêcher ainsi le développement de l'économie, mais où l'on est apparemment tout aussi «collectionneur». Dans les bas de laine et les tirelires d'Allemagne, dorment 8,5 milliards de pièces allant de un pfennig à cinq DM, soit environ 18 % de toutes les pièces en circulation dans le pays !
A la Fédération des banques allemandes, on tient sur une éventuelle commission de change entre le mark et l'euro un discours ambigu. «Toutes les banques changeront sans frais les avoirs de leurs clients. Elles changeront également gratuitement les liquidités de leurs clients, dans les conditions précitées. Mais, il est évident que si quelqu'un qui n'a pas de compte chez nous arrive avec une brouette remplie de liasses de billets de 100 DM et de sacs de pièces, l'opération ne sera pas gratuite. De toute façon, la législation sur la lutte contre la criminalité limite très fortement toute transaction en liquide».
Le cas d'Irma illustre l'habitude qu'ont les Allemands de souffrir des bouleversements monétaires. Et leur méfiance naturelle, face à ce genre de changement, est encore accrue par le fait que tous les établissements bancaires du pays s'arrogent le droit de réclamer un véritable tribut à leurs clients, quand ceux-ci effectuent une transaction par carte de crédit, même dans la zone euro, alors que la valeur de la monnaie européenne est invariable. Quant à l'échange de monnaies étrangères de la zone euro (francs français ou belges, lires, drachmes ou pesetas ramenées de vacances) les banques allemandes le feront bel et bien payer. Touristes, attention ! Vos banques pourraient bien avoir les mêmes idées...
par Marc Leroy-Beaulieu
Article publié le 27/08/2001