Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Iran

Khatami obtient la confiance du Parlement

Après quatre jours de débats intenses, le Parlement (Majlis) très largement dominé par les réformateurs qui contrôlent 70% des sièges, a finalement accordé sa confiance aux vingt ministres pressentis par le président Khatami.
De notre correspondant à Téhéran

Ces derniers jours, on avait entendu des notes discordantes dans le camp réformateur. En effet, plusieurs députés réformateurs radicaux avaient critiqué la composition du gouvernement, affirmant que le cabinet ne répondait pas aux attentes des électeurs réformateurs qui ont permis le 8 juin dernier au président Khatami de remporter une large victoire avec 78% des suffrages. Mais le principal groupe parlementaire, qui réunit près de 130 députés du Front de la participation, présidé par le frère du président iranien, s'est efforcé de mobiliser les parlementaires pour, finalement, obtenir gain de cause.

Prenant la parole à la fin des débats, le président Khatami a pris la défense des candidats pressentis. Il a aussi défendu sa politique de réformes, notamment la liberté de la presse et la nécessité d'enraciner la démocratie. Selon la plupart des analystes, le discours du président a convaincu au dernier moment une partie des députés réformateurs qui voulaient voter contre certains des ministres pressentis. Ainsi, à part deux ministres, dont celui des Renseignements, aucun des candidats ne fait le plein des voix des députés réformateurs.

«Je continuerai le programme de réformes sur le plan politique, culturel et économique, a souligné le président Khatami. Deux groupes étaient hostiles à mon gouvernement. Ceux qui par hostilité au pouvoir islamique affirmaient que mon élection renforçait les bases de la République islamique et ceux qui m'accusaient d'affaiblir les valeurs islamiques de la société. Si ces valeurs sont synonymes de violence et de pression pour imposer la religion et le non-respect de l'avis des gens, je le dis clairement je ne suis pas d'accord avec ce genre de valeur. Je défends la démocratie, la liberté de pensée et la sécurité pour tous y compris pour les opposants qui acceptent le cadre de la Constitution», a-t-il ajouté.

Reste que le président Khatami et ses amis réformateurs doivent compter avec les conservateurs qui n'ont pas désarmé. En effet, à la veille du vote de confiance, la justice a condamné la plus jeune députée du parlement à vingt-deux mois de prison ferme. Elle avait critiqué la justice à propos de l'arrestation d'une journaliste modérée. Dans ces conditions, le bras de fer entre réformateurs et conservateurs va continuer sans répit.

En tout cas, sur le plan international, le second cabinet du président Khatami va accentuer la politique de détente engagée il y a quatre ans. Kamal Kharazi, le chef de la diplomatie iranienne , a assuré que la «politique de détente sera menée plus sérieusement». Il s'est félicité «du rapprochement, opéré lors du premier mandat de quatre ans de M. Khatami, avec l'Arabie saoudite et avec l'Union européenne», mais n'a dit mot d'une éventuelle reprise du dialogue avec Washington, avec qui les relations diplomatiques sont rompues depuis 21 ans. De même, il annoncé la nomination de femmes dans le corps diplomatique. Une première depuis la révolution islamique de 1979.

Accélération des réformes économiques

Sur le plan économique le nouveau ministre de l'économie, Tahmasb Mazahéri, a annoncé une accélération des réformes structurelles. «L'action en matière économique et notamment monétaire a été faible et non-adaptée aux besoins du pays et aux réformes promises par le président Khatami», a-t-il affirmé. «Je suis favorable à l'économie du marché, mais dans le même temps, nous devons appliquer des mesures compensatoires pour aider les couches défavorisées», a-t-il déclaré devant le parlement.

Le nouveau ministre a soutenu publiquement la suppression des subsides. En effet, chaque année, l'Etat dépense plusieurs milliards de dollars de subventions (plus de 10 milliards, selon certaines estimations) pour certains produits de base comme le pain, l'énergie, l'électricité, etc. Ainsi, un litre d'essence coûte en Iran seulement 35 centimes. Le gouvernement veut supprimer ces subventions, mais en contrepartie aider financièrement les couches défavorisées. Un autre objectif du troisième plan quinquennal est d'unifier les différents taux de change, ce qui a longtemps crée des rentes financières à certains groupes proches du pouvoir. Cette unification devrait intervenir d'ici un an. De même, le gouvernement est en train de modifier la législation pour favoriser les investissements étrangers dont le pays a grandement besoin.

Depuis deux ans, le gouvernement du président s'est attelé à assainir l'économie du pays. Ainsi, la dette extérieure a été ramenée de plus de 25 milliards de dollars il y a quatre ans à seulement 8 milliards actuellement. De même, l'inflation a baissé de moitié, passant en dessous de la barre des 12%. Enfin, grâce à l'augmentation des prix du pétrole, le gouvernement a constitué une caisse de réserve en devises de plus de 15 milliards de dollars. Aujourd'hui, l'assainissement de l'économie permet au second gouvernement du président Khatami de s'attaquer à la question du chômage et à la chute du pouvoir d'achat des couches populaires. Le taux officiel du chômage dépasse actuellement les 15% et touche trois millions de personnes. Pour résorber le chômage, le troisième plan quinquennal prévoit un taux annuel de croissance de 6% pour permettre de créer chaque année 850 000 emplois. «Pour atteindre ce taux, nous devons recourir aux investissements étrangers et accélérer la privatisation», a estimé Tahmasb Mazahéri.

Enfin, sur le plan énergétique, malgré l'hostilité des conservateurs, le ministre du Pétrole, Bijan Namdar Zanghaneh, a annoncé l'accélération de la politique de collaboration avec les compagnies pétrolières internationales. D'ici à la fin de l'année, plusieurs nouveaux contrats pétroliers sous forme de buy-back devront être signés pour permettre au pays d'augmenter sa capacité de production de 4 millions de barils par jour actuellement à plus de 5,5 millions d'ici trois ans.



par Siavosh  Ghazi

Article publié le 22/08/2001