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Côte d''Ivoire

Polémique sur le Forum de réconciliation

A trois semaines de l'ouverture officielle, le Forum de réconciliation nationale suscite à nouveau un vif débat. L'ancien parti unique, le PDCI, et le RDR d'Alassane Ouattara dénoncent d'une même voix la composition des délégations invitées et la liste des thèmes à aborder.
Le Forum de réconciliation nationale, qui doit en principe clore la période sombre qu'a connu la Côte d'Ivoire l'année dernière, n'en finit pas de susciter la polémique. Alors qu'il semblait avoir progressé dans ses efforts pour obtenir la participation des trois principaux opposants au président Gbagbo, le «facilitateur» de cette rencontre, censée débuter le 9 octobre prochain, est quasiment revenu à la case départ. Au c£ur du débat : deux communiqués du directoire du Forum, publiés les 18 et 19 septembre, précisant la composition des délégations invitées et les principaux thèmes d'une grande messe devant réunir pas moins de 700 personnes.

En théorie, la composition des délégations, telle qu'elle est proposée, vise à respecter «l'équilibre des opinions, la large ouverture aux partis politiques et l'équilibre entre les différentes composantes du corps social». Mais à l'exception du FPI au pouvoir, les principaux partis s'insurgent contre la portion congrue qui leur est réservée. Au PDCI, l'ancien parti unique, qui participe au gouvernement, le chiffre de quarante cinq personnes pour représenter l'ensemble des mouvements politiques est jugé nettement insuffisant. «Les partis politiques qui sont les organisations de toute la société et qui parlent au nom du peuple sont insuffisamment représentés par rapport au nombre de participants», s'est insurgé sur RFI
Laurent Dona Fologo, son secrétaire général.

L'opposition dénonce la sous-représentation des partis politiques

Dans l'opposition radicale, le porte-parole du Rassemblement des républicains (RDR), Ali Coulibaly dénonce, outre la place réservée au partis, celle que s'arrogerait, de fait, le camp du président ivoirien : «Le pouvoir, bien que nettement minoritaire , est sur-représenté à travers le FPI et ses satellites, à savoir ses associations, le gouvernement et les parlementaires. Et dans le même temps, il y a des omissions graves. L'Association ivoirienne pour le droit des femmes (AIDF), l'association des chefs traditionnels et le collectif des victimes des violences ne sont pas conviés.» Et
Ali Coulibaly d'estimer que «la seule solution qui vaille dans un pays qui se dit démocratique, face à une telle accumulation de problèmes c'est de consulter le peuple».

Interrogé sur RFI, le Premier ministre et président du FPI,
Pascal Affi Nguessan , défend les propositions de Seydou Diarra : «Nous, les partis politiques, nous sommes censés représenter certains courants d'opinion. Mais nous devons être suffisamment ouverts pour que les personnes que nous représentons aient l'occasion d'intervenir directement dans les débats nationaux

Les adversaires du camp au pouvoir ont toutefois d'autres motifs de mécontentement, en particulier à propos de la liste, certes «indicative», des thèmes qui doivent être abordés au cours des débats. On y trouve, notamment, le coup d'Etat de Noël 1999, qui provoqua la chute du président Bédié et l'arrivée au pouvoir de la junte militaire dirigée par le général Gueï, l'unité nationale et la réconciliation des principaux leaders politiques, la question de "l'Ivoirité", mais aussi toute une série de sujets, allant de la crise du système d'éducation à l'insécurité en passant par la place des femmes dans la société. En clair, les principaux adversaires de Laurent Gbagbo, à commencer par le RDR, craignent de voir les thèmes sensibles, tels que les violences de la fin de l'année 2000 et le statut de leur leader Alassane Ouattara, noyés au milieu d'un flot d'autres questions plus générales. «Espérons que d'autres sujets pourront enrichir ce qu'on nous propose aujourd'hui, soupire Laurent Dona Fologo. Par exemple, je ne vois pas apparaître de façon claire les graves événements d'octobre 2000, ceux qui ont ensanglanté le plus la Côte d'Ivoire à l'issue de l'élection présidentielle».

Une partie du PDCI va plus loin, comparant le Forum à un «coup politique du pouvoir FPI pour se faire absoudre par l'ensemble des Ivoiriens et s'octroyer une légitimité que les élections de 2000 ne lui ont pas conférées». Pour sa part, le gouvernement nie toute manipulation et renvoie la balle dans le camp de ses adversaires. «Laurent Gbagbo a fait la moitié du chemin, il leur appartient de faire le reste», confie-t-on dans son entourage. Notre Voie,le quotidien du FPI, renchérit mettant notamment les critiques sur le compte «de la peur du succès de Laurent Gbagbo».

L'opposition se livre-t-elle à une surenchère afin d'obtenir davantage de garanties ou craint-elle qu'un succès du rendez-vous du 9 octobre s'apparente à un plébiscite pour Laurent Gbagbo ? Seydou Diarra aura en tous cas fort à faire, dans les jours à venir, pour convaincre les uns et les autres de participer à un rencontre déjà maintes fois reportée.



par Christophe  Champin

Article publié le 21/09/2001