Zimbabwe
Harare accepte un compromis sur la terre
Au terme de négociations menées, à Abuja, sous l'égide du président nigérian, le gouvernement zimbabwéen s'est engagé à mettre fin aux occupations illégales de terres appartenant aux fermiers blancs, contre un soutien financier international à une redistribution négociée. L'opposition, comme de nombreux observateurs de la crise, est sceptique.
Va-t-on pour la première fois vers une résolution de la crise des terres ? Ou assiste-t-on à une nouvelle pirouette du régime Mugabe destinée à renouer avec la communauté internationale à six moins de l'élection présidentielle ? Dans la capitale zimbabwéenne, le débat est déjà ouvert après l'annonce, jeudi soir à Abuja, d'un accord entre le gouvernement et les ministres de plusieurs pays du Commonwealth sur la fin des occupations illégales de fermes blanches.
Après dix-huit mois de crise, marquée par l'occupation de centaines d'exploitation agricole appartenant à des Zimbabwéens d'origine européenne et une répression féroce contre l'opposition, la conférence ministérielle du Commonwealth organisée, ces derniers jours, dans la capitale nigériane, était un peu celle de la dernière chance. Or, au terme de huit heures de discussions, l'esquisse d'une sortie de crise se profile. D'après les premières informations disponibles, le Zimbabwe s'est engagé à mettre fin à la redistribution non concertée des terres ainsi qu'à faire cesser les violences politiques et les atteintes à la liberté de la presse. En retour, la Grande Bretagne, le Kenya, le Canada, le Nigeria, l'Afrique du Sud et la Jamaïque, dont les représentants participaient aux discussions, se sont dit prêts à faire avancer la mise en place d'un fonds géré par les Nations Unies destiné à dédommager les fermiers blancs prêts à abandonner leurs exploitations.
«Un retour trois ans en arrière»
Dans l'entourage du président nigérian Obasanjo, qui n'a pas ménagé ses efforts de médiation entre Harare et Londres, on assure qu'il s'agit d'une promesse ferme. Mais bien des observateurs, coutumiers des effets d'annonce des autorités zimbabwéennes non suivis d'effets, sont sceptique. «Il s'agit d'un retour trois ans en arrière, lorsque le gouvernement et les bailleurs de fonds s'étaient mis d'accord sur un plan similaire. Tout ça pour en arriver là!», ironise, Masipula Sithole, professeur à l'université de Harare et observateur attentif de la situation politique dans son pays. Tendai Biti, responsable des Affaires étrangère du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), le principal parti d'opposition, va plus loin. Pour lui, le président Mugabe «a besoin d'un répit» et d'un «accord qui le légitimise sur la scène internationale jusqu'à l'élection présidentielle et qui lui permette d'obtenir des crédits».
L'analyse n'est pas saugrenue. Robert Mugabe est, depuis de longues années, passé maître dans l'art du double discours. Dans le passé, le président zimbabwéen a maintes fois alterné les diatribes anti-Blancs, destinées à l'audience populaire noire, suivies de discours conciliants destinés à apaiser les inquiétudes de ses partenaires occidentaux. Or, il ne procéderait pas autrement s'il souhaitait regagner quelque soutien, alors que son pays traverse une très grave crise économique, doublée d'une sécheresse l'obligeant à demander une aide alimentaire d'urgence.
En outre, l'accord d'Abuja intervient à la veille d'échéances diplomatiques importantes. Harare accueille ainsi, lundi 10 septembre, sept présidents de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont le sud-africain Thabo Mbeki. Mais le gouvernement zimbabwéen est surtout sous la menace d'une suspension du Commonwealth, réclamées par l'Australie, qui accueille au mois d'octobre, le sommet bi-annuel de l'organisation regroupant les anciennes colonies britanniques.
Deux semaines après les révélations du journal britannique Sunday Telegraph sur un plan secret visant à accélérer par tous les moyens le départ des Blancs et à infiltrer l'opposition, suivies de nouvelle déclarations de Robert Mugabe sur sa volonté d'achever coûte que coûte sa réforme, l'engagement pris dans la capitale nigériane suscite logiquement la suspicion. A près de 80 ans, le vieux dirigeant a, certes, fait de la redistribution foncière, son «dernier combat», comme il le dit lui-même. Mais un combat politique, qui vise essentiellement à contrecarrer la montée du MDC, premier parti à menacer sa suprématie depuis l'indépendance, alors que son gouvernement n'a jamais réglé la question agraire en vingt ans de pouvoir. Malgré sa méfiance, Masipula Sithole veut pourtant croire aux résultats de la rencontre d'Abuja: «Cette crise a profondément meurtri le Zimbabwe a été blessé. La situation est dramatique, l'économie s'écroule. Le président serait vraiment fou de ne pas tenir ses promesses.»
Après dix-huit mois de crise, marquée par l'occupation de centaines d'exploitation agricole appartenant à des Zimbabwéens d'origine européenne et une répression féroce contre l'opposition, la conférence ministérielle du Commonwealth organisée, ces derniers jours, dans la capitale nigériane, était un peu celle de la dernière chance. Or, au terme de huit heures de discussions, l'esquisse d'une sortie de crise se profile. D'après les premières informations disponibles, le Zimbabwe s'est engagé à mettre fin à la redistribution non concertée des terres ainsi qu'à faire cesser les violences politiques et les atteintes à la liberté de la presse. En retour, la Grande Bretagne, le Kenya, le Canada, le Nigeria, l'Afrique du Sud et la Jamaïque, dont les représentants participaient aux discussions, se sont dit prêts à faire avancer la mise en place d'un fonds géré par les Nations Unies destiné à dédommager les fermiers blancs prêts à abandonner leurs exploitations.
«Un retour trois ans en arrière»
Dans l'entourage du président nigérian Obasanjo, qui n'a pas ménagé ses efforts de médiation entre Harare et Londres, on assure qu'il s'agit d'une promesse ferme. Mais bien des observateurs, coutumiers des effets d'annonce des autorités zimbabwéennes non suivis d'effets, sont sceptique. «Il s'agit d'un retour trois ans en arrière, lorsque le gouvernement et les bailleurs de fonds s'étaient mis d'accord sur un plan similaire. Tout ça pour en arriver là!», ironise, Masipula Sithole, professeur à l'université de Harare et observateur attentif de la situation politique dans son pays. Tendai Biti, responsable des Affaires étrangère du Mouvement pour le changement démocratique (MDC), le principal parti d'opposition, va plus loin. Pour lui, le président Mugabe «a besoin d'un répit» et d'un «accord qui le légitimise sur la scène internationale jusqu'à l'élection présidentielle et qui lui permette d'obtenir des crédits».
L'analyse n'est pas saugrenue. Robert Mugabe est, depuis de longues années, passé maître dans l'art du double discours. Dans le passé, le président zimbabwéen a maintes fois alterné les diatribes anti-Blancs, destinées à l'audience populaire noire, suivies de discours conciliants destinés à apaiser les inquiétudes de ses partenaires occidentaux. Or, il ne procéderait pas autrement s'il souhaitait regagner quelque soutien, alors que son pays traverse une très grave crise économique, doublée d'une sécheresse l'obligeant à demander une aide alimentaire d'urgence.
En outre, l'accord d'Abuja intervient à la veille d'échéances diplomatiques importantes. Harare accueille ainsi, lundi 10 septembre, sept présidents de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont le sud-africain Thabo Mbeki. Mais le gouvernement zimbabwéen est surtout sous la menace d'une suspension du Commonwealth, réclamées par l'Australie, qui accueille au mois d'octobre, le sommet bi-annuel de l'organisation regroupant les anciennes colonies britanniques.
Deux semaines après les révélations du journal britannique Sunday Telegraph sur un plan secret visant à accélérer par tous les moyens le départ des Blancs et à infiltrer l'opposition, suivies de nouvelle déclarations de Robert Mugabe sur sa volonté d'achever coûte que coûte sa réforme, l'engagement pris dans la capitale nigériane suscite logiquement la suspicion. A près de 80 ans, le vieux dirigeant a, certes, fait de la redistribution foncière, son «dernier combat», comme il le dit lui-même. Mais un combat politique, qui vise essentiellement à contrecarrer la montée du MDC, premier parti à menacer sa suprématie depuis l'indépendance, alors que son gouvernement n'a jamais réglé la question agraire en vingt ans de pouvoir. Malgré sa méfiance, Masipula Sithole veut pourtant croire aux résultats de la rencontre d'Abuja: «Cette crise a profondément meurtri le Zimbabwe a été blessé. La situation est dramatique, l'économie s'écroule. Le président serait vraiment fou de ne pas tenir ses promesses.»
par Christophe Champin
Article publié le 07/09/2001