Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Attentats: la riposte

Wade, porte-voix africain de l'antiterrorisme

Depuis les attentats du 11 septembre, le président sénégalais s'est imposé comme l'un des plus fidèles alliés africain des Etats-Unis. Quitte à froisser son opinion publique et à énerver certains de ses pairs, qui raillent son omniprésence sur la scène diplomatique continentale.
Alors que le soutien africain aux Etats-Unis se fait plus discret, depuis le début des frappes contre le régime taliban d'Afghanistan, une voix continue à s'élever au sud du Sahara : celle d'Abdoulaye Wade. Avec son franc parler habituel, le président sénégalais maintient une position sans ambiguïté. Dans un entretien au quotidien dakarois Sud, il y a quelques jours, il estimait ainsi «normal que les Etats-Unis réagissent fermement», après les attaques contre le World Trade Center et le Pentagone.

En outre, il a immédiatement réagi à l'appel à la guerre sainte, lancé en début de semaine par Oussama Ben Laden. «Des gens prétendent nous donner une interprétation de l'islam et du Jihad, je dis non !», a-t-il déclaré, en défendant le modèle sénégalais d'un «pays musulman à 95%» et dirigé «pendant plus de vingt ans par un président chrétien», Léopold Sédar Senghor.

Félicitations de George W. Bush

Depuis un mois, le numéro un sénégalais multiplie en fait les signes de solidarité avec Washington. Au lendemain des événements du 11 septembre, il a été le premier président africain à condamner les attaques de New York et Washington, avant de proposer la tenue à Dakar d'un sommet des chefs d'Etat du continent noir contre le terrorisme. En milieu de semaine, il a même fait convoquer une session extraordinaire de l'Assemblée nationale consacrée à cette question, au cours de laquelle son ministre de la Fonction publique a lu une déclaration gouvernementale soulignant la nécessité d'engager un combat contre le terrorisme «sous toutes ses formes».

Pour Abdoulaye Wade, qui critique l'attentisme de ses pairs africains, le Sénégal doit être le porte-parole de l'antiterrorisme sur le continent noir. George W. Bush ne s'y est d'ailleurs pas trompé. Soucieux d'obtenir le maximum d'appui dans le monde musulman, le président américain aurait décroché son téléphone, ce mercredi, afin de le féliciter pour «ses positions courageuses».

Sur le plan interne, les déclarations du président sénégalais ne font pourtant pas l'unanimité. L'opinion publique est partagée sur la riposte américaine. Une importante organisation non-gouvernementale locale, Rencontre africaine de défense des droits de l'homme (RADDHO), a dénoncé «les frappes» contre l'Afghanistan, évoquant les risques de faire «des victimes innocentes au sein des populations civiles». De son côté, la presse locale, tout en condamnant les actions meurtrières des partisans de Ben Laden, n'en est pas moins généralement critique sur le rôle des Etats-Unis au Proche-Orient.

Le chef de l'Etat sénégalais n'en a cure. Malgré les réticences des autres dirigeants africains, dont beaucoup s'irritent de son omniprésence sur la scène diplomatique continentale, il maintient sa proposition d'un sommet contre le terrorisme, prévu en principe pour le 17 octobre prochain. «Les Africains ne mesurent pas les changements qui s'opèrent dans le monde», a-t-il estimé dans une déclaration à l'AFP. Et le président sénégalais de faire part de ses craintes de voir l'Afrique marginalisée, après les événements du mois dernier.



par Christophe  Champin

Article publié le 11/10/2001