Développement
Comment l'Occident est devenu riche
Comment, et pourquoi, les pays aujourd'hui «riches» le sont-ils devenus ? Quels sont les obstacles qui ont freiné les autres ? Bien loin des analyses à court terme et des prévisions révisables de semaine en semaine, l'économiste britannique Angus Maddison scrute, pour le Centre de développement de l'OCDE, deux mille ans d'économie mondiale. Quelques idées reçues sur le caractère inéluctable de la situation contemporaine sont mises à mal.
Se basant sur les travaux des historiens pour les périodes les plus éloignées l'économiste Angus Maddison fait parler les chiffres : population, richesse, croissance, écart de développement entre les régions du monde. Dès lors un constat s'impose. Au début de l'ère chrétienne, le développement apparaît d'un niveau sensiblement égal à la surface de la terre peuplée : Europe, Asie, Afrique, Amérique latine. En l'an Mil, la progression est faible, la population a peu augmenté et le revenu par habitant stagné. Il y a même, au niveau mondial, une diminution de la richesse en raison des désordres liés à l'effondrement de l'Empire romain en Occident et sur le pourtour méditerranéen. A cette époque, la différence entre le continent le plus riche, l'Asie, et le plus pauvre, l'Europe, est très faible.
En 1500, tout change, l'Europe occidentale renaît, le seizième siècle n'est pas pour rien appelé Renaissance. Elle rattrape la Chine, alors première puissance mondiale sous la houlette des grandes dynasties. L'écart de richesse entre l'Europe de l'Ouest, en tête, et l'Afrique, en queue, passe de 2 à 1. L'histoire désormais s'accélère. Alors que la richesse par habitant n'avait que peu progressé au cours du millénaire écoulé, elle augmente, dans le monde, de 50% entre 1500 et 1820 et elle est multipliée par plus de dix entre 1500 et 2000. Au 19ème siècle, qui marque le réel décollage de l'Europe et des pays d'immigration européenne (Etats-Unis, Australie, Canada), l'écart de revenu par habitant entre les plus riches et les plus pauvres se creuse de trois pour un en 1820 à neuf pour un en 1913, quinze pour un en 1950 et près de 20 pour un aujourd'hui.
Des circonstances favorables
Pourtant, rien d'inéluctable dans l'avancée économique de l'Europe à partir de 1500 et, plus largement de l'Occident, à partir de 1820. Une combinaison de circonstances historiques favorables explique, selon Angus Maddison, la croissance économique qui a abouti à la situation actuelle : la conquête ou la colonisation, les échanges internationaux, le progrès scientifique, la création d'institutions politiques économiques et sociales de type capitalistique, orientées vers l'augmentation des richesses.
La conquête de nouvelles terres est à l'origine du développement de la Chine autour de l'An Mil. Mais pour l'Europe, c'est la découverte de l'Amérique qui constitue le point de départ. Terres peu peuplées et fertiles, ressources minérales et végétales nouvelles, voilà qui dope durablement les échanges, le commerce et les mouvements de capitaux. D'autant qu'à cette époque, la Chine se retire du commerce particulièrement actif en Asie, laissant la place aux Portugais et aux Hollandais.
Les progrès de la technologie sont pour beaucoup dans le processus de croissance qu'il s'agisse de l'amélioration des rendements agricoles, de la technologie maritime. Or, jusqu'au 15ème siècle, les progrès réalisés en Europe dépendaient des transferts de savoirs venus d'Asie et du monde arabe. A cette époque, la supériorité des Chinois dans le domaine de la navigation est évidente. Deux cents ans plus tard, les technologies européennes ont supplanté leurs rivales et se diffusent rapidement sur le continent, mais fort peu hors d'Europe. Dans le même temps la banque, le crédit, les marchés des changes, la gestion financière et budgétaire, la comptabilité, les assurances deviennent en Europe les plus sophistiquées du monde. Tout cela explique l'ascension exponentielle de l'Occident jusqu'en 1973.
Car, depuis cette date, Angus Maddison affirme que le ralentissement du progrès technologique explique la décélération de la croissance économique mondiale. Pour preuve, entre 1950 et 1973 le PIB mondial a doublé sur une période de 24 ans. Au rythme observé depuis 1973 il doublerait en 54 ans. L'économiste britannique avoue ne pas partager les «attentes euphoriques» des adeptes de la nouvelle économie qui récusent l'idée de ralentissement du progrès.
En 1500, tout change, l'Europe occidentale renaît, le seizième siècle n'est pas pour rien appelé Renaissance. Elle rattrape la Chine, alors première puissance mondiale sous la houlette des grandes dynasties. L'écart de richesse entre l'Europe de l'Ouest, en tête, et l'Afrique, en queue, passe de 2 à 1. L'histoire désormais s'accélère. Alors que la richesse par habitant n'avait que peu progressé au cours du millénaire écoulé, elle augmente, dans le monde, de 50% entre 1500 et 1820 et elle est multipliée par plus de dix entre 1500 et 2000. Au 19ème siècle, qui marque le réel décollage de l'Europe et des pays d'immigration européenne (Etats-Unis, Australie, Canada), l'écart de revenu par habitant entre les plus riches et les plus pauvres se creuse de trois pour un en 1820 à neuf pour un en 1913, quinze pour un en 1950 et près de 20 pour un aujourd'hui.
Des circonstances favorables
Pourtant, rien d'inéluctable dans l'avancée économique de l'Europe à partir de 1500 et, plus largement de l'Occident, à partir de 1820. Une combinaison de circonstances historiques favorables explique, selon Angus Maddison, la croissance économique qui a abouti à la situation actuelle : la conquête ou la colonisation, les échanges internationaux, le progrès scientifique, la création d'institutions politiques économiques et sociales de type capitalistique, orientées vers l'augmentation des richesses.
La conquête de nouvelles terres est à l'origine du développement de la Chine autour de l'An Mil. Mais pour l'Europe, c'est la découverte de l'Amérique qui constitue le point de départ. Terres peu peuplées et fertiles, ressources minérales et végétales nouvelles, voilà qui dope durablement les échanges, le commerce et les mouvements de capitaux. D'autant qu'à cette époque, la Chine se retire du commerce particulièrement actif en Asie, laissant la place aux Portugais et aux Hollandais.
Les progrès de la technologie sont pour beaucoup dans le processus de croissance qu'il s'agisse de l'amélioration des rendements agricoles, de la technologie maritime. Or, jusqu'au 15ème siècle, les progrès réalisés en Europe dépendaient des transferts de savoirs venus d'Asie et du monde arabe. A cette époque, la supériorité des Chinois dans le domaine de la navigation est évidente. Deux cents ans plus tard, les technologies européennes ont supplanté leurs rivales et se diffusent rapidement sur le continent, mais fort peu hors d'Europe. Dans le même temps la banque, le crédit, les marchés des changes, la gestion financière et budgétaire, la comptabilité, les assurances deviennent en Europe les plus sophistiquées du monde. Tout cela explique l'ascension exponentielle de l'Occident jusqu'en 1973.
Car, depuis cette date, Angus Maddison affirme que le ralentissement du progrès technologique explique la décélération de la croissance économique mondiale. Pour preuve, entre 1950 et 1973 le PIB mondial a doublé sur une période de 24 ans. Au rythme observé depuis 1973 il doublerait en 54 ans. L'économiste britannique avoue ne pas partager les «attentes euphoriques» des adeptes de la nouvelle économie qui récusent l'idée de ralentissement du progrès.
par Francine Quentin
Article publié le 25/10/2001