Afghanistan
Un chef de l'opposition exécuté
Ancien héros de la lutte contre l'occupant soviétique, le commandant Abdul Haq a été arrêté puis exécuté par les Taliban dans la nuit de jeudi à vendredi, à proximité de la ville d'Azra, à 35 kilomètres au sud de Kaboul. Une arrestation survenue au terme de deux jours de traque malgré les tentatives américaines pour lui venir en aide.
De notre envoyé spécial à Islamabad
L'ancien chef de guerre Abdul Haq, âgé de 43 ans, a pourtant résisté jusqu'au bout. Il a appelé les forces américaines à la rescousse grâce à un téléphone satellitaire. Celles-ci ont alors bombardé la région où il se trouvait pour empêcher les Taliban de progresser, puis ont tenté de l'exfiltrer par hélicoptère. Sans succès. Abdul Haq -qui a perdu un pied lors de sa lutte contre l'Armée rouge- a voulu fuir à cheval. Mais il a été rapidement rattrapé par les Taliban. Ces derniers -qui ont qualifié sa capture de victoire majeure- l'ont exécuté immédiatement. Ils n'ont pas jugé bon de l'interroger, voulant probablement faire un exemple et jugeant les documents trouvés sur lui suffisamment probant. A en croire l'agence afghane Islamic Press, Abdul Haq était, en effet, en possession de moyens de communications sophistiqués, de liasses de dollars et de documents prouvant ses liens avec les Etats-Unis. Aucune source indépendante ne permet de confirmer ces dires, et selon son neveu, Mohammed Yousouf, installé dans la ville pakistanaise de Peshawar, Abdul Haq était arrivé en Afghanistan une semaine auparavant pour «une mission de paix».
Un revers pour les Américains
Il semble néanmoins qu'Abdul Haq -petit, trapu, un visage joufflu entouré d'un collier de barbe- soit venu en Afghanistan négocier le soulèvement des tribus pachtounes contre les Taliban, pour le compte des Etats-Unis. Son échec constitue donc un sérieux revers pour la tactique américaine dans la région. De l'avis de tous les experts, il sera, en effet, impossible aux troupes américaines de gagner seules une guerre terrestre en Afghanistan. D'où l'idée de créer une «troisième colonne», composée de Taliban modérés -mais ceux-ci ne se sont toujours pas manifestés- et des tribus pachtounes, dont certaines, notamment celles affiliées à la famille Durrani, n'ont aucune sympathie pour les Taliban. Cette troisième colonne serait financée et armée par les Etats-Unis et se battrait au nom de l'ancien roi, Zaher Shah.
Mais l'opération est délicate à réaliser. L'antipathie de certaines tribus pour les Taliban n'est pas synonyme de soutien à Washington et l'exécution d'Abdul Haq ne devrait pas améliorer les choses. Les chefs pachtounes vont désormais hésiter à s'engager et il va devenir difficile de trouver des candidats pour mener ce type de mission exploratoire. L'incapacité des troupes américaines à exfiltrer Abdul Haq n'est pas faite non plus pour rassurer. A Islamabad, certains suggèrent qu'Abdul Haq a été trahi par des membres des tribus pachtounes avec lesquelles il était en contact. Comment les Talibans ont-il pu, sinon, retrouver si facilement sa trace et celle des 50 hommes qui l'accompagnaient ? Cela signifie que, même à l'intérieur des clans pachtounes opposés aux Taliban, un éventuel choix pro-américain ne fait pas l'unanimité. Pour beaucoup de Pachtounes, en effet, les frappes américaines ne visent pas Oussama Ben Laden et le réseau Al-Quaeda, mais l'islam en tant que religion et organisation sociale. Plus le conflit se prolongera, plus ce sentiment sera fort.
Doté d'un charisme exceptionnel, Abdul Haq avait été brièvement ministre aux côtés du commandant Massoud après le retrait soviétique de l'Afghanistan. Mais il s'était rapidement retiré de la scène politique pour créer une importante société d'import-export dans les pays du Golfe. La dernière campagne afghane de celui qui, dix ans durant, avait tenu tête aux forces d'occupation soviétiques, lui aura donc été fatale.
L'ancien chef de guerre Abdul Haq, âgé de 43 ans, a pourtant résisté jusqu'au bout. Il a appelé les forces américaines à la rescousse grâce à un téléphone satellitaire. Celles-ci ont alors bombardé la région où il se trouvait pour empêcher les Taliban de progresser, puis ont tenté de l'exfiltrer par hélicoptère. Sans succès. Abdul Haq -qui a perdu un pied lors de sa lutte contre l'Armée rouge- a voulu fuir à cheval. Mais il a été rapidement rattrapé par les Taliban. Ces derniers -qui ont qualifié sa capture de victoire majeure- l'ont exécuté immédiatement. Ils n'ont pas jugé bon de l'interroger, voulant probablement faire un exemple et jugeant les documents trouvés sur lui suffisamment probant. A en croire l'agence afghane Islamic Press, Abdul Haq était, en effet, en possession de moyens de communications sophistiqués, de liasses de dollars et de documents prouvant ses liens avec les Etats-Unis. Aucune source indépendante ne permet de confirmer ces dires, et selon son neveu, Mohammed Yousouf, installé dans la ville pakistanaise de Peshawar, Abdul Haq était arrivé en Afghanistan une semaine auparavant pour «une mission de paix».
Un revers pour les Américains
Il semble néanmoins qu'Abdul Haq -petit, trapu, un visage joufflu entouré d'un collier de barbe- soit venu en Afghanistan négocier le soulèvement des tribus pachtounes contre les Taliban, pour le compte des Etats-Unis. Son échec constitue donc un sérieux revers pour la tactique américaine dans la région. De l'avis de tous les experts, il sera, en effet, impossible aux troupes américaines de gagner seules une guerre terrestre en Afghanistan. D'où l'idée de créer une «troisième colonne», composée de Taliban modérés -mais ceux-ci ne se sont toujours pas manifestés- et des tribus pachtounes, dont certaines, notamment celles affiliées à la famille Durrani, n'ont aucune sympathie pour les Taliban. Cette troisième colonne serait financée et armée par les Etats-Unis et se battrait au nom de l'ancien roi, Zaher Shah.
Mais l'opération est délicate à réaliser. L'antipathie de certaines tribus pour les Taliban n'est pas synonyme de soutien à Washington et l'exécution d'Abdul Haq ne devrait pas améliorer les choses. Les chefs pachtounes vont désormais hésiter à s'engager et il va devenir difficile de trouver des candidats pour mener ce type de mission exploratoire. L'incapacité des troupes américaines à exfiltrer Abdul Haq n'est pas faite non plus pour rassurer. A Islamabad, certains suggèrent qu'Abdul Haq a été trahi par des membres des tribus pachtounes avec lesquelles il était en contact. Comment les Talibans ont-il pu, sinon, retrouver si facilement sa trace et celle des 50 hommes qui l'accompagnaient ? Cela signifie que, même à l'intérieur des clans pachtounes opposés aux Taliban, un éventuel choix pro-américain ne fait pas l'unanimité. Pour beaucoup de Pachtounes, en effet, les frappes américaines ne visent pas Oussama Ben Laden et le réseau Al-Quaeda, mais l'islam en tant que religion et organisation sociale. Plus le conflit se prolongera, plus ce sentiment sera fort.
Doté d'un charisme exceptionnel, Abdul Haq avait été brièvement ministre aux côtés du commandant Massoud après le retrait soviétique de l'Afghanistan. Mais il s'était rapidement retiré de la scène politique pour créer une importante société d'import-export dans les pays du Golfe. La dernière campagne afghane de celui qui, dix ans durant, avait tenu tête aux forces d'occupation soviétiques, lui aura donc été fatale.
par Jean Piel
Article publié le 27/10/2001