Commerce mondial
Afrique : «Halte aux subventions agricoles !»
Président du Réseau des organisations paysannes et de producteur agricoles de l'Afrique de l'ouest, le Sénégalais Ndiogou Fall se veut le porte-voix des paysans africains à Doha. Il plaide pour une suppression des subventions à l'agriculture dans les pays du nord qui nuisent au développement de celle de l'Afrique.
De notre envoyé spécial à Doha
RFI : Quel est le message d'un paysan africain à une conférence de l'OMC ?
Ndiogou Fall : L'agriculture est ici au centre des discussions, d'autant plus qu'un certain nombre de dispositions prises jusqu'à présent constituent des drames pour notre agriculture. Elles ont plutôt aggravé la pauvreté en Afrique, l'un des continents les plus ouverts au monde. Il est absurde de lui demander de s'ouvrir davantage parce que cette ouverture fait qu'aujourd'hui nous avons du mal à vendre notre production sur notre propre marché.
Dans les années à venir, l'Afrique a très peu de chance de percer sur le marché mondial. Les rapports de productivité vont de un à cent entre l'agriculture africaine et celle des pays du nord. Lorsqu'on produit 50 tonnes à l'hectare en Europe, en Afrique, c'est 500 kg. Lorsqu'on obtient un crédit bancaire à 17% en Afrique, il est de 6 % dans les pays du nord. Nous sommes aussi en retard sur le conditionnement des produits. Les Etats-Unis battent tous les pays du monde sur le maïs parce qu'ils disposent d'une infrastructure de communication qui leur permet de mettre n'importe quelle quantité sur le marché en moins de 24 heures. Nous, nous avons des problèmes à acheminer nos produits du champ vers les villes. Nous avons donc intérêt à cibler nos marchés intérieurs que d'aller là où on n'a presque rien à gagner.
La priorité pour l'Afrique n'est pas d'aller sur le marché international, mais de trouver les moyens de mieux vendre sur son propre marché. Or, ce n'est plus possible avec la libéralisation. Prenez les huiles végétales importées d'Europe et d'Asie. En Côte d'ivoire, on en consomme plus que l'huile de palme locale. La viande bovine venue d'Europe pose également d'énormes problèmes à l'élevage africain. Nous ne pouvons plus rester les bras croisés face à cette situation. Tout accord qui exclut la possibilité d'une protection de l'agriculture dans chaque pays n'a pas de sens.
Après la guerre, l'Europe a protégé son agriculture et continue de le faire de façon déguisée derrière les normes sanitaires et phytosanitaires ainsi que les aides directes accordées à ses producteurs sous forme de subvention aux exportations. Ne pouvant pas être concurrentiels dans cette situation, nous demandons que la possibilité soit donnée à chaque Etat de définir sa propre politique agricole.
RFI : Plaidez-vous pour la suppression des subventions qui entravent la compétitivité de l'agriculture africaine ?
N. F. : Absolument ! Les pays du nord doivent reconnaître que leur politique de subvention pose des difficultés à l'agriculture des pays en voie de développement puisqu'elle permet à leurs produits de vendre à vil prix, c'est-à-dire en dessous des prix réels sur nos marchés. Si l'Europe par exemple a le droit de subventionner ses paysans, nous nous avons le droit de protéger nos marchés. Cela relève de la justice et de l'équité.
RFI : Mais ces bas prix ne bénéficient-ils pas aux consommateurs africains ?
N.F. : Il y a lieu de savoir d'abord qui est consommateur. En Afrique, en moyenne 70 % de la population et donc des consommateurs est paysanne et tire ses revenus de l'agriculture. Dès lors, l'argument qui tend à dire que les subventions arrangent l'Afrique ne tient pas. On comprendrait cette situation en Europe où les paysans représentent seulement 5 % de la population. Chez nous, c'est justement ceux qui ne peuvent acheter quoi que ce soit parce que leur activité est dans une situation de concurrence déloyale. Non, les subventions n'arrangent pas la majorité des consommateurs africains.
RFI : Quel est le message d'un paysan africain à une conférence de l'OMC ?
Ndiogou Fall : L'agriculture est ici au centre des discussions, d'autant plus qu'un certain nombre de dispositions prises jusqu'à présent constituent des drames pour notre agriculture. Elles ont plutôt aggravé la pauvreté en Afrique, l'un des continents les plus ouverts au monde. Il est absurde de lui demander de s'ouvrir davantage parce que cette ouverture fait qu'aujourd'hui nous avons du mal à vendre notre production sur notre propre marché.
Dans les années à venir, l'Afrique a très peu de chance de percer sur le marché mondial. Les rapports de productivité vont de un à cent entre l'agriculture africaine et celle des pays du nord. Lorsqu'on produit 50 tonnes à l'hectare en Europe, en Afrique, c'est 500 kg. Lorsqu'on obtient un crédit bancaire à 17% en Afrique, il est de 6 % dans les pays du nord. Nous sommes aussi en retard sur le conditionnement des produits. Les Etats-Unis battent tous les pays du monde sur le maïs parce qu'ils disposent d'une infrastructure de communication qui leur permet de mettre n'importe quelle quantité sur le marché en moins de 24 heures. Nous, nous avons des problèmes à acheminer nos produits du champ vers les villes. Nous avons donc intérêt à cibler nos marchés intérieurs que d'aller là où on n'a presque rien à gagner.
La priorité pour l'Afrique n'est pas d'aller sur le marché international, mais de trouver les moyens de mieux vendre sur son propre marché. Or, ce n'est plus possible avec la libéralisation. Prenez les huiles végétales importées d'Europe et d'Asie. En Côte d'ivoire, on en consomme plus que l'huile de palme locale. La viande bovine venue d'Europe pose également d'énormes problèmes à l'élevage africain. Nous ne pouvons plus rester les bras croisés face à cette situation. Tout accord qui exclut la possibilité d'une protection de l'agriculture dans chaque pays n'a pas de sens.
Après la guerre, l'Europe a protégé son agriculture et continue de le faire de façon déguisée derrière les normes sanitaires et phytosanitaires ainsi que les aides directes accordées à ses producteurs sous forme de subvention aux exportations. Ne pouvant pas être concurrentiels dans cette situation, nous demandons que la possibilité soit donnée à chaque Etat de définir sa propre politique agricole.
RFI : Plaidez-vous pour la suppression des subventions qui entravent la compétitivité de l'agriculture africaine ?
N. F. : Absolument ! Les pays du nord doivent reconnaître que leur politique de subvention pose des difficultés à l'agriculture des pays en voie de développement puisqu'elle permet à leurs produits de vendre à vil prix, c'est-à-dire en dessous des prix réels sur nos marchés. Si l'Europe par exemple a le droit de subventionner ses paysans, nous nous avons le droit de protéger nos marchés. Cela relève de la justice et de l'équité.
RFI : Mais ces bas prix ne bénéficient-ils pas aux consommateurs africains ?
N.F. : Il y a lieu de savoir d'abord qui est consommateur. En Afrique, en moyenne 70 % de la population et donc des consommateurs est paysanne et tire ses revenus de l'agriculture. Dès lors, l'argument qui tend à dire que les subventions arrangent l'Afrique ne tient pas. On comprendrait cette situation en Europe où les paysans représentent seulement 5 % de la population. Chez nous, c'est justement ceux qui ne peuvent acheter quoi que ce soit parce que leur activité est dans une situation de concurrence déloyale. Non, les subventions n'arrangent pas la majorité des consommateurs africains.
par propos recueillis par Alpha Barry
Article publié le 13/11/2001