Kosovo
Des élections dans un protectorat qui rêve d'indépendance
Les électeurs du Kosovo sont convoqué aux urnes samedi pour élire le premier parlement de la province, mais aussi pour désigner un président, dont les fonctions seront essentiellement représentatives. La campagne électorale oppose des formations qui, pourtant, ont sensiblement toutes le même programme : l'indépendance de la province placée sous protectorat international depuis juin 1999.
De notre correspondant dans les Balkans
Grande favorite, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) d'Ibrahim Rugova devrait probablement disposer de la majorité absolue au sein du futur Parlement. Elle subit la concurrence du Parti démocratique du Kosovo (PDK) d'Ashim Thaçi, qui regroupe les anciens guérilleros de l'UCK, et de l'Alliance pour l'avenir du Kosovo (Kosovo), une coalition assez hétéroclite de petits partis regroupés derrière un ancien commandant de l'UCK entré en dissidence, Ramush Haradinaj.
Le choix de Rizah Bilalli est déjà fait. Cet ancien directeur du lycée albanais « clandestin » de Vucitrn, une petite ville située à une trentaine de kilomètres de Pristina, s'apprête à voter pour la LDK. «Ibrahim Rugova est notre président, que nous avons démocratiquement choisi depuis 1990. La LDK a été la garante et l'expression de la lutte du peuple albanais du Kosovo durant dix ans».
Les adversaires de la LDK dénoncent justement la trop longue hégémonie de cette formation. L'AAK a ainsi réuni à regrouper des intellectuels et des figures politiques marquantes du Kosovo, comme le philosophe Shkelzen Maliqi ou l'ancien Premier secrétaire local du Parti communiste dans les années 1970, Mahmut Bakalli. A la présidentielle, le PDK présente la candidature de Flora Brovina, pédiatre et poète, détenue durant plus d'un an en Serbie. Tous ces intellectuels partagent le même rejet du «système Rugova», dépeint comme clanique, clientéliste et corrompu.
Violence et corruption
«Mais la violence et la corruption, ce sont les anciens guérilleros de l'UCK!», s'indigne Rizah Bilalli. «Ils ont mis le Kosovo en coupe réglée, avec la complicité de la communauté internationale. Pour occuper un poste important dans l'administration ou les services publics, il suffit de rappeler que l'on a passé quelques mois dans les montagnes avec un fusil en 1999. Conclusion : rien ne marche, parce que tous les responsables sont incompétents».
Les programmes de tous les partis se contentent de réclamer l'indépendance, sans jamais évoquer les questions économiques. Pourtant, le Kosovo ne survit qu'avec l'aide internationale et les versements financiers des Albanais émigrés en Europe occidentale. Principale richesse de la province, le complexe minier de Trepca n'a pour ainsi dire repris aucune activité, et l'hiver qui commence risque d'être le plus difficile depuis l'instauration du protectorat international. La centrale électrique d'Obilic, qui exportait du courant vers toute la Yougoslavie il y a quelques années, est toujours incapable de satisfaire les besoins énergétiques de la province. La reconstruction du Kosovo, désordonnée et chaotique n'a concerné que les habitations individuelles, tandis que les services publics achevaient leur désagrégation.
Des voix s'élèvent de plus en plus pour dénoncer l'impéritie de la Mission des Nations Unies au Kosovo, mais Rizah Bilalli reconnaît que l'enjeu économique risque de déterminer l'avenir de la province : «si des usines ne se remettent pas à produire, nous sommes fichus. Et le désespoir de générations sacrifiées qui n'auront comme seule perspective que l'émigration ou les trafics illégaux nourrira l'extrémisme politique».
Grande favorite, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) d'Ibrahim Rugova devrait probablement disposer de la majorité absolue au sein du futur Parlement. Elle subit la concurrence du Parti démocratique du Kosovo (PDK) d'Ashim Thaçi, qui regroupe les anciens guérilleros de l'UCK, et de l'Alliance pour l'avenir du Kosovo (Kosovo), une coalition assez hétéroclite de petits partis regroupés derrière un ancien commandant de l'UCK entré en dissidence, Ramush Haradinaj.
Le choix de Rizah Bilalli est déjà fait. Cet ancien directeur du lycée albanais « clandestin » de Vucitrn, une petite ville située à une trentaine de kilomètres de Pristina, s'apprête à voter pour la LDK. «Ibrahim Rugova est notre président, que nous avons démocratiquement choisi depuis 1990. La LDK a été la garante et l'expression de la lutte du peuple albanais du Kosovo durant dix ans».
Les adversaires de la LDK dénoncent justement la trop longue hégémonie de cette formation. L'AAK a ainsi réuni à regrouper des intellectuels et des figures politiques marquantes du Kosovo, comme le philosophe Shkelzen Maliqi ou l'ancien Premier secrétaire local du Parti communiste dans les années 1970, Mahmut Bakalli. A la présidentielle, le PDK présente la candidature de Flora Brovina, pédiatre et poète, détenue durant plus d'un an en Serbie. Tous ces intellectuels partagent le même rejet du «système Rugova», dépeint comme clanique, clientéliste et corrompu.
Violence et corruption
«Mais la violence et la corruption, ce sont les anciens guérilleros de l'UCK!», s'indigne Rizah Bilalli. «Ils ont mis le Kosovo en coupe réglée, avec la complicité de la communauté internationale. Pour occuper un poste important dans l'administration ou les services publics, il suffit de rappeler que l'on a passé quelques mois dans les montagnes avec un fusil en 1999. Conclusion : rien ne marche, parce que tous les responsables sont incompétents».
Les programmes de tous les partis se contentent de réclamer l'indépendance, sans jamais évoquer les questions économiques. Pourtant, le Kosovo ne survit qu'avec l'aide internationale et les versements financiers des Albanais émigrés en Europe occidentale. Principale richesse de la province, le complexe minier de Trepca n'a pour ainsi dire repris aucune activité, et l'hiver qui commence risque d'être le plus difficile depuis l'instauration du protectorat international. La centrale électrique d'Obilic, qui exportait du courant vers toute la Yougoslavie il y a quelques années, est toujours incapable de satisfaire les besoins énergétiques de la province. La reconstruction du Kosovo, désordonnée et chaotique n'a concerné que les habitations individuelles, tandis que les services publics achevaient leur désagrégation.
Des voix s'élèvent de plus en plus pour dénoncer l'impéritie de la Mission des Nations Unies au Kosovo, mais Rizah Bilalli reconnaît que l'enjeu économique risque de déterminer l'avenir de la province : «si des usines ne se remettent pas à produire, nous sommes fichus. Et le désespoir de générations sacrifiées qui n'auront comme seule perspective que l'émigration ou les trafics illégaux nourrira l'extrémisme politique».
par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 15/11/2001