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Sida

Un espoir pour les enfants africains

Considérés comme la frange de population la plus vulnérable, les enfants payent un lourd tribut dans le drame du sida en Afrique subsaharienne. Le nombre d’enfants de moins de 15 ans infectés par le VIH atteint, selon Onusida, 2,4 millions dans cette région et le nombre d’orphelins dépasse les 12 millions. Comment garantir un avenir à des personnes apparemment condamnées dès leur plus jeune âge ? Cinq ONG viennent de lancer officiellement, à Ouagadougou, en marge de la XIIe Conférence internationale sur le sida et les maladies sexuellement transmissibles en Afrique (9-13 décembre), un programme dénommé «Espoir pour les enfants d’Afrique» dont le but est de procurer des soins et une réinsertion familiale à des enfants du continent. Entretien avec la sénégalaise Charlotte Faty Ndiaye, présidente de l’Association pour les femmes africaines face au sida (SWAA).
De notre correspondant au Burkina Faso

RFI : Pourquoi lancer un programme spécifique destiné aux enfants ?

Charlotte Fati Ndiaye :
En Afrique, la situation des enfants liée au sida est catastrophique. L’ensemble du continent compte 14 millions d’orphelins dus au sida. Ce sont des enfants qui subitement ne peuvent plus aller à l’école, ne peuvent plus se nourrir ni se vêtir. Le drame est d’autant plus lourd que ce sont souvent des enfants malades parce qu’infectés par le VIH.Ça c’est terrible. Je crois que l’avenir même de l’Afrique se joue dans la mobilisation autour de la situation de ces enfants parce que toutes les régions du continent sont durement touchées.

RFI : Quelle solution, le programme «Espoir pour les enfants d’Afrique» entend-il apporter au drame du sida ?

C.F.N.:
Mon ONG SWAA international s’est associée à quatre autres ONG (Plan international, Care, Save the Children et la Conférence des religieux pour la paix) pour mettre en place ce programme dénommé HACI : Hope for African children initiative. L’objectif est de permettre à un enfant victime du sida de ne pas être stigmatisé mais, au contraire, de pouvoir aller à l’école, d’être maintenu dans un contexte familial. Sur le terrain, l’initiative a déjà démarré depuis deux mois. Elle concerne six pays : Ouganda, Malawi, Kenya, Sénégal, Mozambique et Cameroun. Mais le projet démarre d’abord dans les trois premiers pays qui ont une forte séroprévalence. Le choix du Sénégal, où le taux de prévalence du VIH est faible vise, par contre, à maintenir les acquis pour donner de l’espoir aux autres pays et leur dire qu’il y a des programmes qui réussissent en Afrique. Nous espérons couvrir plus de six millions d’enfants avec le programme qui va s’étendre sur plus cinq ans. L’initiative a l’ambition de mobiliser des ressources et de les mettre à la disposition des communautés pour aider les enfants à avoir un avenir. Le gros problème de l’Afrique est la pauvreté et le sida appauvrit davantage. Donc, nous pensons que si on peut aider ces enfants en leur donnant les moyens et les ressources financières possibles pour leur permettre de rester dans un contexte familial, de grandir et d’aller à l’école, on leur donne alors de l’espoir et un avenir. Concrètement, le programme va financer des petites organisations communautaires de base qui vont faire des soins à domicile. Nous allons également financer des prises en charge ambulatoires de ces enfants malades et leur donner la possibilité d’avoir accès aux médicaments. Au-delà du volet sanitaire, l’initiative va, mieux encore, favoriser une prise en charge psychosociale pour permettre à l’enfant de vivre dans un milieu qui ne le stigmatise pas parce qu’il est porteur du virus ou simple victime du sida.

RFI : Comment peut-on réussir à créer un cadre familial pour un enfant qui a perdu ses parents ?

C.F.N. :
Il existe un système de solidarité en Afrique. Un enfant qui perd son père et sa mère est souvent recueilli par une tante, un cousin, un oncle ou par sa grand-mère. Nous allons renforcer ce nouveau cadre familial. Nous allons aller retrouver, par exemple la grand-mère, lui donner les moyens de s’occuper de l’enfant qu’elle recueille afin que ce dernier soit dans une ambiance familiale à laquelle il a droit. Le programme s’adresse à tous les enfants marqués par le sida. Soit ceux qui sont affectés parce que leurs parents sont morts de sida alors que, eux ne sont pas atteints, soit ceux qui sont eux-même infectés.
Pour le financement, nous disposons déjà de plus de 10 millions de dollars. Nous sommes toujours à la recherche de fonds parce que nous avions estimé nos besoins à 100 millions de dollars. Mais ce que nous avons eu nous permet de démarrer le programme dans trois pays.

RFI : Pourquoi les orphelins du sida méritent-ils plus d'attention que les autres ?

C.F.N. :
On choisit le sida parce que c’est un drame, une tragédie. Ce qui est dramatique, c’est qu’on peut vivre avec l’infection du VIH et disparaître demain par exemple. Donc, l’enfant vit avec des parents dont il sait qu’ils sont appelés à mourir. C’est vrai que tout le monde est appelé à mourir, mais dans le cadre du sida, la certitude est tellement forte que ça crée un traumatisme psychosocial extrêmement grave. Si bien qu’on doit aider et encadrer ces enfants au maximum.



par propos recueillis par Alpha  Barry

Article publié le 13/12/2001