Attentats : la riposte
Le testament de Ben Laden
Al Jazira a diffusé l’intégralité des 33 minutes de la «cassette Ben Laden». Affaibli physiquement, le chef d’Al Qaïda développe en revanche un discours très structuré. Décryptage.
«Par la volonté de Dieu, la fin de l'Amérique est proche. Elle n'est pas liée à ma présence. Qu'Oussama soit tué ou reste vivant, l'ère du réveil de l'islam a sonné». Si l’homme apparaît fatigué, peut-être même blessé, le discours, lui, est particulièrement structuré.
L’ancien ingénieur qu’est Ben Laden truffe son message de chiffres et de détails : George Bush père est responsable de la mort d’un million d’enfants irakiens, ce sont 19 étudiants qui ont provoqué les attentats du 11 septembre ayant causé des pertes estimées par les Américains eux-mêmes à 1 trillion de dollars. Il suffit de 7 grammes d’explosif pour tuer quelqu’un mais les Américains ont lâché des bombes de 7 tonnes, soit 7 millions de grammes, précise Oussama Ben Laden en faisant la conversion. Plus généralement, tout dans la charpente de ce texte, visiblement très travaillé, vise à démontrer que Ben Laden maîtrise le déroulement des événements nés des attentats du 11 septembre et laisse entendre qu’il a anticipé la suite, y compris au-delà de sa mort. Sur un mode didactique, Oussama Ben Laden tire les enseignements de l’après-11 septembre et tente d’élargir son audience au-delà de ses sympathisants actuels.
Les premiers discours de Ben Laden s’adressaient principalement aux musulmans anciens combattants de la guerre d’Afghanistan contre les Russes, dénonçant la corruption des régimes arabes et la présence américaine dans le Golfe. Désormais, il y a une inflexion très nette de son discours. Oussama Ben Laden évoque la Palestine, faisant l’éloge du Hamas, du Jihad islamique, et d’autres organisations non précisées mais dont on suppose qu’elles n’appartiennent pas forcément à la mouvance islamiste. Il parle de l’Irak, du Soudan, évoque une possible invasion de l’Arabie saoudite par Israël avec la complicité de la famille régnante. Enfin, à l’adresse des Pakistanais, il parle du Cachemire et de l’Assam, deux États indiens en proie à une contestation islamique armée.
Mais surtout, pour la première fois, le fondateur d’Al Qaïda ne se contente plus d’évoquer la lutte des musulmans contre les juifs et les «croisés» (chrétiens), mais il introduit la notion de race, en parlant de «ces peuples arrogants qui n’accordent de sens à la liberté que lorsqu’il s’agit de la race blanche». Ce faisant, Ben Laden prend la posture d’un défenseur du tiers monde en général face aux États-Unis et à l’Europe. Voire des minorités ethniques et raciales opprimées en Europe et aux États-Unis par les Européens de race blanche.
Frapper l’économie américaine par tous les moyens
Espérant y trouver des réserves de nouveaux militants, l’ingénieur Ben Laden leur donne la recette en prenant exemple sur les pirates de l’air du 11 septembre : «par des moyens simples, les étudiants ont utilisé des avions de l’ennemi étudié dans des écoles de l’ennemi sans avoir eu besoin de camps d’entraînement». Certes, personne ne fait le poids face à la puissance militaire américaine mais pour Oussama Ben Laden, la solution est simple : «il est possible de s’attaquer aux fondements économiques qui sont le pivot de la puissance militaire. Il est très important de frapper l’économie américaine par tous les moyens possibles».
Au fond, dans son intervention quasi-messianique, le chef d’Al Qaïda appelle ses partisans à poursuivre le combat après sa mort. Le message d’amour en moins, la «cassette Ben Laden» n’est pas sans évoquer le Christ réunissant les apôtres avant l’Ascension pour leur transmettre le flambeau. D’une certaine façon, par ce message, Oussama Ben Laden fait savoir qu’il a achevé son œuvre. Mais la lutte d’Al Qaïda, elle, ne fait que commencer, et son arène, c’est le monde.
Ecoutez également Olivier Da Lage, invité du Rendez-vous de la rédaction.
L’ancien ingénieur qu’est Ben Laden truffe son message de chiffres et de détails : George Bush père est responsable de la mort d’un million d’enfants irakiens, ce sont 19 étudiants qui ont provoqué les attentats du 11 septembre ayant causé des pertes estimées par les Américains eux-mêmes à 1 trillion de dollars. Il suffit de 7 grammes d’explosif pour tuer quelqu’un mais les Américains ont lâché des bombes de 7 tonnes, soit 7 millions de grammes, précise Oussama Ben Laden en faisant la conversion. Plus généralement, tout dans la charpente de ce texte, visiblement très travaillé, vise à démontrer que Ben Laden maîtrise le déroulement des événements nés des attentats du 11 septembre et laisse entendre qu’il a anticipé la suite, y compris au-delà de sa mort. Sur un mode didactique, Oussama Ben Laden tire les enseignements de l’après-11 septembre et tente d’élargir son audience au-delà de ses sympathisants actuels.
Les premiers discours de Ben Laden s’adressaient principalement aux musulmans anciens combattants de la guerre d’Afghanistan contre les Russes, dénonçant la corruption des régimes arabes et la présence américaine dans le Golfe. Désormais, il y a une inflexion très nette de son discours. Oussama Ben Laden évoque la Palestine, faisant l’éloge du Hamas, du Jihad islamique, et d’autres organisations non précisées mais dont on suppose qu’elles n’appartiennent pas forcément à la mouvance islamiste. Il parle de l’Irak, du Soudan, évoque une possible invasion de l’Arabie saoudite par Israël avec la complicité de la famille régnante. Enfin, à l’adresse des Pakistanais, il parle du Cachemire et de l’Assam, deux États indiens en proie à une contestation islamique armée.
Mais surtout, pour la première fois, le fondateur d’Al Qaïda ne se contente plus d’évoquer la lutte des musulmans contre les juifs et les «croisés» (chrétiens), mais il introduit la notion de race, en parlant de «ces peuples arrogants qui n’accordent de sens à la liberté que lorsqu’il s’agit de la race blanche». Ce faisant, Ben Laden prend la posture d’un défenseur du tiers monde en général face aux États-Unis et à l’Europe. Voire des minorités ethniques et raciales opprimées en Europe et aux États-Unis par les Européens de race blanche.
Frapper l’économie américaine par tous les moyens
Espérant y trouver des réserves de nouveaux militants, l’ingénieur Ben Laden leur donne la recette en prenant exemple sur les pirates de l’air du 11 septembre : «par des moyens simples, les étudiants ont utilisé des avions de l’ennemi étudié dans des écoles de l’ennemi sans avoir eu besoin de camps d’entraînement». Certes, personne ne fait le poids face à la puissance militaire américaine mais pour Oussama Ben Laden, la solution est simple : «il est possible de s’attaquer aux fondements économiques qui sont le pivot de la puissance militaire. Il est très important de frapper l’économie américaine par tous les moyens possibles».
Au fond, dans son intervention quasi-messianique, le chef d’Al Qaïda appelle ses partisans à poursuivre le combat après sa mort. Le message d’amour en moins, la «cassette Ben Laden» n’est pas sans évoquer le Christ réunissant les apôtres avant l’Ascension pour leur transmettre le flambeau. D’une certaine façon, par ce message, Oussama Ben Laden fait savoir qu’il a achevé son œuvre. Mais la lutte d’Al Qaïda, elle, ne fait que commencer, et son arène, c’est le monde.
Ecoutez également Olivier Da Lage, invité du Rendez-vous de la rédaction.par Olivier Da Lage
Article publié le 28/12/2001
