Justice
La «double peine» en question
Face à la polémique sur la double peine, relancée avec le cas de Moussa Brihmat, le ministère de l’Intérieur a décidé de revoir le dossier. En attendant, cet Algérien né en France et menacé d’expulsion est assigné à résidence.
La levée de bouclier des opposants à la double peine contre l’expulsion de Moussa Brihmat a conduit le ministère français de l’Intérieur à surseoir à son expulsion et à «procéder à un examen approfondi de sa situation particulière». Cet Algérien de 49 ans est assigné à résidence, dans l’attente d’une décision.
«Surréaliste», selon le Syndicat de la Magistrature, le cas de Moussa Brihmat met en évidence les difficultés concrètes de l’application de la double peine, basée sur une ordonnance de 1945. Cette disposition prévoit qu’un étranger condamné pénalement peut également être expulsé définitivement du territoire français. Dans la pratique, l’expulsion d’étrangers vivant depuis de longues années en France, quand ils n’y sont pas nés, cause des drames humains, familiaux et sociaux dont l’opinion publique française, alertée par des associations, commence à prendre conscience.
C’est ainsi qu’en cette période de Noël la polémique est relancé avec la situation de Moussa Brihmat, 49 ans, de nationalité algérienne mais né en France et ne connaissant pas le pays dont il est légalement ressortissant. Condamné en 1995 à cinq ans de prison pour trafic de cannabis, Moussa Brihmat était alors également soumis à une interdiction définitive du territoire. Mais, sorti de prison en 1997, la mesure n’avait pas été appliquée, lui permettant de se réinsérer sur le plan social et professionnel : il est fondateur d'une association d'aide aux familles de détenus et à la réinsertion. Moussa Brihmat est aussi père de deux enfants, 14 et 11 ans, de nationalité française dont il a la garde depuis son divorce. Venu le 19 décembre à la préfecture du Rhône, à Lyon, pour faire renouveler sa carte de séjour, il a été interpellé et vit depuis sous la menace d’une expulsion vers l’Algérie, pays qui lui est inconnu.
«Une peine, point barre»
Pour la vingtaine d’associations des droits de l’homme et de l’aide aux étrangers et immigrés réunies dans la compagne contre la double peine, l’affaire est exemplaire. La ligue des droits de l’homme, membre de la campagne «Une peine, point barre» rappelle qu’aux termes de la loi française «nul ne peut être puni deux fois pour le même délit». Or, selon la LDH, «ces vingt dernières années la mesure aurait concerné 17000 personnes dont des jeunes gens ayant passé toute leur enfance en France, expulsés dans le «pays d’origine» avec lequel ils n’ont aucun contact, ou des pères de famille travaillant dans notre pays depuis quarante ans».
La campagne de protestation a reçu le soutien actif du réalisateur Bertrand Tavernier avec son documentaire sorti le 21 novembre dernier « Histoires de vies brisées ». Dans ce film-réquisitoire on suit le parcours de dix hommes qui ont observé, en 1998, une grève de la faim de 51 jours afin d'attirer l'attention sur le sort qui leur était fait. L'expulsion, en effet, touche en priorité des Maghrébins, nés en France ou arrivés très jeunes, qui se sentent français et dont les attaches, la famille sont en France.
Toutefois, la sécurité apparaît comme un des thèmes dominants de la prochaine campagne électorale en France, ce qui faisait dire à un éditorialiste de la presse régionale mercredi : «il serait étonnant que les hommes politiques fassent du problème de la double peine leur cheval de bataille. Il n'y a pas beaucoup de voix à gagner de ce côté-là, il y en a beaucoup à perdre».
Ecoutez également le Rendez-vous de la rédaction avec Catherine Ninin.
«Surréaliste», selon le Syndicat de la Magistrature, le cas de Moussa Brihmat met en évidence les difficultés concrètes de l’application de la double peine, basée sur une ordonnance de 1945. Cette disposition prévoit qu’un étranger condamné pénalement peut également être expulsé définitivement du territoire français. Dans la pratique, l’expulsion d’étrangers vivant depuis de longues années en France, quand ils n’y sont pas nés, cause des drames humains, familiaux et sociaux dont l’opinion publique française, alertée par des associations, commence à prendre conscience.
C’est ainsi qu’en cette période de Noël la polémique est relancé avec la situation de Moussa Brihmat, 49 ans, de nationalité algérienne mais né en France et ne connaissant pas le pays dont il est légalement ressortissant. Condamné en 1995 à cinq ans de prison pour trafic de cannabis, Moussa Brihmat était alors également soumis à une interdiction définitive du territoire. Mais, sorti de prison en 1997, la mesure n’avait pas été appliquée, lui permettant de se réinsérer sur le plan social et professionnel : il est fondateur d'une association d'aide aux familles de détenus et à la réinsertion. Moussa Brihmat est aussi père de deux enfants, 14 et 11 ans, de nationalité française dont il a la garde depuis son divorce. Venu le 19 décembre à la préfecture du Rhône, à Lyon, pour faire renouveler sa carte de séjour, il a été interpellé et vit depuis sous la menace d’une expulsion vers l’Algérie, pays qui lui est inconnu.
«Une peine, point barre»
Pour la vingtaine d’associations des droits de l’homme et de l’aide aux étrangers et immigrés réunies dans la compagne contre la double peine, l’affaire est exemplaire. La ligue des droits de l’homme, membre de la campagne «Une peine, point barre» rappelle qu’aux termes de la loi française «nul ne peut être puni deux fois pour le même délit». Or, selon la LDH, «ces vingt dernières années la mesure aurait concerné 17000 personnes dont des jeunes gens ayant passé toute leur enfance en France, expulsés dans le «pays d’origine» avec lequel ils n’ont aucun contact, ou des pères de famille travaillant dans notre pays depuis quarante ans».
La campagne de protestation a reçu le soutien actif du réalisateur Bertrand Tavernier avec son documentaire sorti le 21 novembre dernier « Histoires de vies brisées ». Dans ce film-réquisitoire on suit le parcours de dix hommes qui ont observé, en 1998, une grève de la faim de 51 jours afin d'attirer l'attention sur le sort qui leur était fait. L'expulsion, en effet, touche en priorité des Maghrébins, nés en France ou arrivés très jeunes, qui se sentent français et dont les attaches, la famille sont en France.
Toutefois, la sécurité apparaît comme un des thèmes dominants de la prochaine campagne électorale en France, ce qui faisait dire à un éditorialiste de la presse régionale mercredi : «il serait étonnant que les hommes politiques fassent du problème de la double peine leur cheval de bataille. Il n'y a pas beaucoup de voix à gagner de ce côté-là, il y en a beaucoup à perdre».
Ecoutez également le Rendez-vous de la rédaction avec Catherine Ninin.
par Francine Quentin
Article publié le 27/12/2001