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Bénin

Cinq «voleurs de sexe» brûlés vifs

Accusés d’avoir fait disparaître le sexe de leurs interlocuteurs, quatre Nigerians et un Congolais ont été traqués et tués par des conducteurs de taxi-moto de Cotonou. Le ministre de l’Intérieur tape du poing sur la table.
De notre correspondant à Cotonou

Si l’on en croit Daniel Tawéma, ministre béninois de l'intérieur et de la sécurité, dix cas de vindicte populaire ont été enregistrés à Cotonou pour les seules journées des 23 et 24 novembre dernier. Ces différents assauts ont provoqué la mort de cinq Nigerians dont les corps ont été retrouvés calcinés et charcutés. Il a fallu des interventions musclées de la police pour qu'une dizaine d'autres personnes soient sauvées de justesse.

A l’origine de ces agressions : des passants ont accusé les victimes d'avoir fait disparaître leur sexe, rien qu'en les touchant. Le procédé de mise à mort par le feu est des plus horribles. Dès que l'alerte au vol de sexe est donnée, une foule surexcitée lance l'assaut contre les suspects, à coups de gourdins, de bâtons, de machettes et finit par les brûler à l'aide de pneus enflammés.

Mais toutes ces personnes tuées ne sont que d'innocentes victimes de fausses alertes. Selon Daniel Tawéma, les constats effectués par les services de police révèlent que les personnes se disant victimes de disparition de sexe ont bel et bien leurs organes génitaux en place. Une chaîne de télévision privée du Bénin a dû montrer des images de sexe d'hommes qui prétendaient les avoir perdu, en désignant les Nigérians comme coupables.

Le ministre de l'intérieur et de la sécurité vient de taper du poing sur la table. Les forces de sécurité publiques sont instruits afin «prendre toutes les dispositions pour appréhender par tous les moyens, ces fauteurs de troubles ainsi que leurs complices afin de leur faire subir la rigueur de la loi». Décision dont se réjouit Ezéchiel Olaniyi Oladoji, ambassadeur du Nigéria près le Bénin. «Car si de l'autre côté de la frontière, on apprenait que des Ibo ont été brûlés vif, des échanges auraient eu lieu», a-t-il averti.

Chasse aux Ibos

Durant les jours de chasse à l'homme dont ils sont la cible, les Ibos (ethnie du Sud nigérian composée de gens remarquables par leur teint clair) ont déserté les hangars du célèbre marché de friperie de Cotonou. Ils sont les maîtres des lieux. Parmi les brûlés, on dénombre en effet quatre Ibo et un Congolais. Très nombreux à Cotonou où ils se sont installés depuis la guerre de Biafra (1967-1970), les Ibo sont les champions de l'importation des fripes au Bénin. Ils sont également très actifs dans le marché des véhicules d'occasion qui débarquent au port de Cotonou. Ils sont souvent accusés de vols à mains armées, de meurtres, de rapt d'enfant...

L'ambassadeur du Nigéria au Bénin ne nie pas que des Nigérians aient été arrêtés au Bénin pour vols à mains armées. Mais il déclare qu'ils sont laissés à la disposition de la justice béninoise. Il annonce pour février 2002, «la mise en vigueur d'une carte d'identité infalsifiable qui permettra de recenser les Nigérians résidant et faisant des affaires au Bénin».



par Jean-Luc  Aplogan

Article publié le 08/12/2001