Bioéthique
Le croisé de la «reprogrammation génétique» parle
Interview- exclusive – du gynécologue- kamikaze romain, le dr Severino Antinori, 56 ans, directeur d’un centre de recherche associé pour la reproduction assistée (le Raprui, ouvert en 1980). Très contesté pour ses techniques qui ne riment pas vraiment avec éthique, ce croisé de la fertilité qui a permis a des grands-mères de devenir mères – le cas le plus célèbre étant celui de Rosanna della Corte une Italienne qui à 62 ans a donné vie à un petit garçon en 1994- et qui a reçu des milliers de couples stériles dans son cabinet cossu de la via Tacito située à deux pas du Vatican avec lequel il ne cesse de croiser le fer, réitère son intention de franchir encore plus les frontières de la fertilité grâce au clonage d’embryons humains.
De notre correspondante à Rome
RFI : Comment réagissez-vous à l’annonce de la fabrication du premier d’embryon humain, obtenu par clonage, réalisée par la firme de biotechnologie américaine Advanced Cell Technology (ACT) ?
Severino Antinori: Je suis à la très fois heureux de cette nouvelle et triste car je me sens le père spirituel de ce succès. José Cibelli, le directeur adjoint d’ACT, a largement tiré profit des nombreux échanges que nous avons eus, notamment au mois d’août dernier, lorsque je l’ai rencontré à l’occasion d’un congrès sur le clonage organisé à Washington par l’Académie nationale des sciences américaine. Au fond, je me sens un peu dérobé d’un projet personnel que j’aurai pu réaliser en Italie. Mais cela ne m’a pas été permis, je risquais 20 ans de prison et la radiation à vie de l’Ordre des médecins.
RFI: Que comptez vous faire maintenant ?
SA: J’ai plus que jamais l’intention de porter à terme mon projet de clonage humain que je préfère appeler «reprogrammation» génétique. Le groupe de chercheurs disposé à collaborer avec mon équipe ne cesse d’augmenter, nous sommes maintenant une trentaine. Mardi prochain, je quitterai l’Italie «talibane» ce pays à l’esprit étriqué, pour un autre pays dont je ne peux révéler le nom, ce serait me tirer une balle dans le pied! Nous irons quelque part en Méditerranée…
RFI: Pourquoi parlez-vous d’Italie «Talibane»
SA: Parce que l’Italie, comme tant d’autres pays européens, me rend la vie impossible. On veut faire des chercheurs de nouveaux Giordano Bruno, moi je me compare souvent à Galilée qui fut victime d’intolérance! La science italienne est désormais aux mains des Taliban catholiques je vous l’assure!
D’un côté on lutte contre le fondamentalisme islamiste, de l’autre on adopte des comportements dignes de ceux de la Gestapo. L’obscurantisme de l’Église catholique m’effraie. Tout comme certaines personnalités me font vraiment très peur. je pense à Romano Prodi, au président Bush, au ministre français de la santé Bernard Kouchner – un homme cruel! – et surtout à Tony Blair qui veut lui aussi interdire le clonage therpeutique. Tous les jours on l’entend hurler contre le fondamentalisme islamiste mais au fond il veut réaliser le fondamentalisme chrétien et protestant, alors je lui dit «Si vous vous opposez au clonage thérapeutique, Mister Tony Blair, vous serez comme les Taliban vous serez comme Ben Laden!».
RFI: Vous rendez-vous compte que la majeure partie de l’opinion publique, sans parler du monde scientifique, est tout à fait opposée aux photocopies de bébés, ce qui fait partie de vos projets ?
SA: Il règne une grande confusion au sein de l’opinion publique, on fait passer des chercheurs, des précurseurs pour des monstres, on leur fait croire que cloner c’est copier, c’est faux. Moi je parle de reprogrammation génétique, il ne s’agit pas de créer des enfants-photocopie, il s’agit de produire des embryons humains pour obtenir des cellules souches qui vont servir à soigner un large spectre de maladies, je pense à différentes formes de cancers, au sida, à l’infarctus du myocarde, au diabète mais aussi à des pathologies dégénératives du cerveau telles que l’Alzheimer ou la maladie de Parkinson. Il faut vraiment démythifier le clonage. Il s’agit simplement d’une technique reproductive.
Même s’ils partagent le même code génétique, les enfants qui naîtront par clonage ne seront pas nécessairement une réplique du donneur. Il n’y aura jamais deux personnes exactement semblables. Je défends le clonage aussi parce que cela représente le seul espoir pour les 120 millions d’hommes dans le monde qui souffrent de stérilité et qui veulent néanmoins devenir des pères naturels. On ne peut tout de même pas accuser de crime contre l’humanité ceux qui opèrent pour le bien de l’humanité ! Avoir le droit de transmettre ses propres gènes est un droit constitutionnel et c’est aussi pour me battre en faveur de ce droit que je vais quitter l’Italie pendant quelque temps. Il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’accepter le clonage pour le clonage, ni de proposer le clonage à la carte. Quel mal y a-t-il à vouloir faire naître de beaux bébés en bonne santé ?
RFI: Votre question me rappelle une récente déclaration du cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui vous a accusé de vouloir imiter Hitler…
SA: J’entends les anathèmes du Vatican depuis que j’ai commencé a travaillé dans le domaine de la procréation assistée. Il faut prendre plus au sérieux les recherches du docteur Antinori ! Mes traitements ont permis qu’une femme qui a donné la vie à 62 ans entre dans le Livre Guinness des records. N’oublions pas qu’il y a 22 ans lorsque Louise Brown est née, la fécondation in vitro, a provoqué de multiples polémiques, y compris chez les biologistes de la reproduction et les médecins spécialisés dans le traitement de la stérilité. Aujourd’hui plus personne ne voit d’objection à cette technique.
RFI : Comment réagissez-vous à l’annonce de la fabrication du premier d’embryon humain, obtenu par clonage, réalisée par la firme de biotechnologie américaine Advanced Cell Technology (ACT) ?
Severino Antinori: Je suis à la très fois heureux de cette nouvelle et triste car je me sens le père spirituel de ce succès. José Cibelli, le directeur adjoint d’ACT, a largement tiré profit des nombreux échanges que nous avons eus, notamment au mois d’août dernier, lorsque je l’ai rencontré à l’occasion d’un congrès sur le clonage organisé à Washington par l’Académie nationale des sciences américaine. Au fond, je me sens un peu dérobé d’un projet personnel que j’aurai pu réaliser en Italie. Mais cela ne m’a pas été permis, je risquais 20 ans de prison et la radiation à vie de l’Ordre des médecins.
RFI: Que comptez vous faire maintenant ?
SA: J’ai plus que jamais l’intention de porter à terme mon projet de clonage humain que je préfère appeler «reprogrammation» génétique. Le groupe de chercheurs disposé à collaborer avec mon équipe ne cesse d’augmenter, nous sommes maintenant une trentaine. Mardi prochain, je quitterai l’Italie «talibane» ce pays à l’esprit étriqué, pour un autre pays dont je ne peux révéler le nom, ce serait me tirer une balle dans le pied! Nous irons quelque part en Méditerranée…
RFI: Pourquoi parlez-vous d’Italie «Talibane»
SA: Parce que l’Italie, comme tant d’autres pays européens, me rend la vie impossible. On veut faire des chercheurs de nouveaux Giordano Bruno, moi je me compare souvent à Galilée qui fut victime d’intolérance! La science italienne est désormais aux mains des Taliban catholiques je vous l’assure!
D’un côté on lutte contre le fondamentalisme islamiste, de l’autre on adopte des comportements dignes de ceux de la Gestapo. L’obscurantisme de l’Église catholique m’effraie. Tout comme certaines personnalités me font vraiment très peur. je pense à Romano Prodi, au président Bush, au ministre français de la santé Bernard Kouchner – un homme cruel! – et surtout à Tony Blair qui veut lui aussi interdire le clonage therpeutique. Tous les jours on l’entend hurler contre le fondamentalisme islamiste mais au fond il veut réaliser le fondamentalisme chrétien et protestant, alors je lui dit «Si vous vous opposez au clonage thérapeutique, Mister Tony Blair, vous serez comme les Taliban vous serez comme Ben Laden!».
RFI: Vous rendez-vous compte que la majeure partie de l’opinion publique, sans parler du monde scientifique, est tout à fait opposée aux photocopies de bébés, ce qui fait partie de vos projets ?
SA: Il règne une grande confusion au sein de l’opinion publique, on fait passer des chercheurs, des précurseurs pour des monstres, on leur fait croire que cloner c’est copier, c’est faux. Moi je parle de reprogrammation génétique, il ne s’agit pas de créer des enfants-photocopie, il s’agit de produire des embryons humains pour obtenir des cellules souches qui vont servir à soigner un large spectre de maladies, je pense à différentes formes de cancers, au sida, à l’infarctus du myocarde, au diabète mais aussi à des pathologies dégénératives du cerveau telles que l’Alzheimer ou la maladie de Parkinson. Il faut vraiment démythifier le clonage. Il s’agit simplement d’une technique reproductive.
Même s’ils partagent le même code génétique, les enfants qui naîtront par clonage ne seront pas nécessairement une réplique du donneur. Il n’y aura jamais deux personnes exactement semblables. Je défends le clonage aussi parce que cela représente le seul espoir pour les 120 millions d’hommes dans le monde qui souffrent de stérilité et qui veulent néanmoins devenir des pères naturels. On ne peut tout de même pas accuser de crime contre l’humanité ceux qui opèrent pour le bien de l’humanité ! Avoir le droit de transmettre ses propres gènes est un droit constitutionnel et c’est aussi pour me battre en faveur de ce droit que je vais quitter l’Italie pendant quelque temps. Il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’accepter le clonage pour le clonage, ni de proposer le clonage à la carte. Quel mal y a-t-il à vouloir faire naître de beaux bébés en bonne santé ?
RFI: Votre question me rappelle une récente déclaration du cardinal Joseph Ratzinger, préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi, qui vous a accusé de vouloir imiter Hitler…
SA: J’entends les anathèmes du Vatican depuis que j’ai commencé a travaillé dans le domaine de la procréation assistée. Il faut prendre plus au sérieux les recherches du docteur Antinori ! Mes traitements ont permis qu’une femme qui a donné la vie à 62 ans entre dans le Livre Guinness des records. N’oublions pas qu’il y a 22 ans lorsque Louise Brown est née, la fécondation in vitro, a provoqué de multiples polémiques, y compris chez les biologistes de la reproduction et les médecins spécialisés dans le traitement de la stérilité. Aujourd’hui plus personne ne voit d’objection à cette technique.
par A Rome, propos recueillis par Anne Le Nir
Article publié le 03/12/2001