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Attentats : la riposte

Guantanamo, prison afghane

Les premiers prisonniers de guerre afghans viennent d’arriver sur la base navale américaine de Guantanamo. Située à l’extrémité sud-est de Cuba, la base américaine est un véritable camp retranché. Alors que depuis l’arrivée au pouvoir de Fidel Castro la base de Guantanamo est au cœur du conflit qui oppose Cuba aux États-Unis, il semble qu’aujourd’hui le lider maximo soit prêt à accepter l’arrivée des prisonniers afghans.
De notre correspondante à La Havane

Entourée de collines à la végétation aride et les pieds plongés dans le bleu turquoise de la mer des Caraïbes, la base de Guantanamo est un bout de territoire américain, complètement coupé du reste de l’île. Entourée d’un champ de plus de 50 000 mines, d’une ceinture de barbelés de 28 kilomètres et de plusieurs dizaines de miradors, on ne peut pénétrer dans la base que par bateau ou avion.

A l’intérieur, Gitmo bay, comme l’appellent les Américains, a un petit air de village de vacances. Avec ses quartiers, jaune pour les marines, bleu pour les officiers et ocre pour les hommes de troupe, la base militaire américaine dénote de l’architecture coloniale de la ville cubaine de Guantanamo, située à quelques kilomètres. Plus d’un millier de militaires et leurs familles vivent dans ce camp retranché, qui ressemble à une véritable petite ville américaine, avec une chapelle blanche, des barbecues près des pavillons, des pistes de bowling, un golf, deux supermarchés et bien sûr, l’inévitable McDonald.

Depuis 1964 la base vit en circuit fermé. Les autorités cubaines lui ayant coupé l’eau et l’électricité, elle possède sa propre usine de dessalement d’eau et un bateau en provenance de Floride assure son ravitaillement deux fois par semaine. Isolée sur une île ennemie, et totalement autonome, cela fait deux atouts de taille pour une prison de haute sécurité.

Guantanamo, véritable cas d’espèce

Cédée en 1903 par Cuba, pour remercier son puissant voisin de son aide lors de la guerre d’indépendance contre les Espagnols, Guantanamo est la première base américaine installée outre-mer. Mais c’est aussi l’unique base américaine établie dans un pays communiste, et la seule base au monde dont l’usage ait été concédé à titre gracieux par le pays hôte. A peine 4 085 dollars par an, que le gouvernement de Fidel Castro refuse obstinément d’encaisser, considérant la base de Guantanamo comme un avatar du colonialisme. Depuis 43 ans, de nombreuses marches populaires sont régulièrement organisées pour réclamer, entre autre, la restitution de ce bout de terre cubaine. Mais il semble qu’aujourd’hui le lider maximo ait choisit la discrétion plutôt que l’affrontement.

L’arrivée des prisonniers afghans n’a pas été mentionnée par la presse cubaine, totalement soumise au pouvoir. Les temps ont bien changé, et aujourd’hui, les deux vieux ennemis semblent davantage intéressés par un futur rapprochement économique que par de vieilles guerres idéologiques. Le mois dernier, le premier bateau de marchandise américain est entré dans le port de La Havane, rompant ainsi 42 ans d’embargo commercial, alors que sénateurs, congressistes et étudiants américains, viennent de plus en plus fréquemment à Cuba, où ils sont reçus par Castro en personne. Honneur qui en dit long sur l’importance qu’attache Fidel à ce début de rapprochement.

Il aura même été l’un des premiers chefs d’État à dénoncer les attentats du 11 septembre, et à se déclarer solidaire, car a-t-il précisé, «cela fait 43 ans que Cuba souffre du terrorisme». En effet, plus de 500 tentatives d’assassinat contre le chef de la révolution, le détournement d’un avion cubain en 1976 qui avait fait plus de 70 morts, et plus récemment une série d’attentats dans des hôtels de La Havane, ayant causé la mort d’un touriste italien, sont les plus connus des actes terroristes perpétrés par la frange extrémiste des exilés cubains de Miami. Cuba ne devrait donc pas poser de problèmes quant à l’envoi des prisonniers afghans à Guantanamo mais espère certainement en retour que Washington sévisse dans les rangs des extrémistes cubano-américains.



par Karen  DONADEL

Article publié le 12/01/2002