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Mondialisation

Porto Alegre éclipse Davos

«Ne dites pas à ma secrétaire que je suis à New York, elle me croit à Porto Alegre»: en deux ans seulement le Forum social mondial de Porto Alegre, au Brésil, s’est hissé de rassemblement anti-Davos au rang de sommet anti-mondialisation, éclipsant largement le traditionnel Forum économique mondial.
Le premier Forum social mondial de Porto Alegre en janvier 2001 avait la folle prétention, en se tenant en même temps que le 31e Forum économique mondial de Davos, d’opposer symboliquement deux visions du monde, le libéralisme mondialisateur en Suisse, sa mise en accusation dans ce pays en développement qu’est le Brésil.

En 2002, le 2e Forum social mondial qui se tient du 31 janvier au 5 février a inversé la donne. C’est le forum économique qui fait figure de «contre-Porto Alegre». D’ailleurs, cette année, les représentants des gouvernements, organisations internationales, du monde des affaires et de la société civile ne se retrouveront pas dans la petite station suisse des Grisons mais à New York. Les incidents violents de l’année passée avaient refroidi les autorités helvétiques, peu habituées à la contestation anti-mondialiste. C’est donc New York, touchée par les attentats du 11 septembre, qui a été choisie pour débattre de la «gouvernance en ces temps incertains», thème général de la rencontre.

Preuve s’il en est que le Forum social mondial est devenu «incontournable», la venue annoncée de nombreux responsables politiques et représentants d’organisations internationales, parmi les 60 000 personnes originaires de 130 pays, dont la plupart issues de la société civile (ONG, syndicats, associations de développement du tiers-monde).

Woodstock de l’anti-mondialisation

On ne comptera pas moins de trois prix Nobel, dont Rigoberta Menchu, Guatémaltèque militante des droits des indiens, le linguiste Noam Chomsky, engagé en faveur de l’ultra-gauche américaine et de nombreux représentants d’Attac (promoteurs de la taxe Tobin sur les transactions financières) et l’inévitable José Bové, déjà présent en 2001. Mais aussi Mary Robinson, haut commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, ou le Premier ministre libéral belge Guy Verhofstadt qui, comme d’autres participants, se rendront successivement aux deux rencontres de Porto Alegre et New York.

Plus significatifs encore du fait qu’il est bon d’être vu à Porto Alegre, les nombreux français qui prennent le chemin du Brésil : trois candidats à l’élection présidentielle, six ministres et de nombreux dirigeants des formations politiques hexagonales, du parti communiste au RPR (néo-gaulliste), et une délégation de députés. La variété des opinions représentées va toutefois bien dans le sens de ce que certains nomment le «Woodstock de l’anti-mondialisation» puisqu’on y verra des personnalités aussi opposées que les deux candidats à l’élection présidentielle d’avril-mai prochains, le souverainiste Jean-Pierre Chevènement et le vert Noël Mamère.

Les thèmes de discussion retenus pour le Forum économique mondial marquent également l’influence croissante des thèses développées par les opposants à la mondialisation ultra-libérale depuis l’échec de la conférence de l’OMC en 1999 et confrontées à Porto Alegre. A New York il sera question cette année de lutte contre la pauvreté et de justice sociale, de promotion du développement durable et de respect des différences.



par Francine  Quentin

Article publié le 29/01/2002