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Philippines

Les soldats américains débarquent

Les Etats-Unis ont commencé à envoyer des troupes aux Philippines. Après l’Afghanistan, c’est dans ce pays que les Américains ont décidé de continuer la guerre contre le terrorisme international, engagée à la suite des attentats du 11 septembre. Il ne s’agit officiellement que de former les troupes philippines «au contre-terrorisme». Mais les opérations, qui sont déjà prévues pour durer au moins six mois, ont pour objectif l’éradication du groupe islamiste Abou Sayyaf qui serait lié à Oussama Ben Laden.
Deux-cent-cinquante soldats américains sont d'ores et déjà déployés sur le territoire philippin. Certains d'entre eux ont même participé, dès jeudi, à une mission de repérage sur l'île de Basilan, l'une des bases des terroristes du groupe Abou Sayyaf, la nouvelle cible des Américains dans leur guerre contre le terrorisme international. Les Etats-Unis ont confirmé qu’il ne s’agissait là que d’un début. L’envoi de troupes va, en effet, se poursuivre dans les jours et les semaines à venir. Au moins 700 soldats doivent être acheminés vers les Philippines, notamment à partir des bases d’Okinawa et d’Hawaï. Parmi eux, figureront 150 bérets verts, ces commandos des forces spéciales qui sont intervenus en Afghanistan.

Pour le porte-parole de la Maison Blanche, Ari Fleischer, cette intervention est «un nouvel exemple de la volonté du président George W. Bush de poursuivre la guerre contre le terrorisme en coopération avec d’autres gouvernements car le terrorisme présente un problème ailleurs qu’en Afghanistan». Irak, Yémen, Somalie, Indonésie, plusieurs pays semblent être dans le collimateur des Américains qui ont finalement choisi d’engager, aux Philippines, la deuxième étape militaire de leur chasse aux terroristes.

A ce stade, les militaires américains ne doivent officiellement jouer qu’un rôle de «conseillers» et «d’observateurs». Ils sont censés entraîner les forces gouvernementales, leur apporter un soutien logistique et les accompagner durant les manœuvres qui devraient avoir lieu sur deux îles, Basilan et Jolo. Mais il semble clair qu’ils ne s’en tiendront pas là et qu’ils participeront effectivement aux combats éventuels dans le cadre de ces manœuvres baptisées Aigle de la liberté 2002. D’ailleurs, il a été précisé que les soldats américains seront armés et autorisés à se servir de leurs armes «s’ils sont attaqués». Le général philippin Emmanuel Teodosio, responsable de plus de 1000 hommes qui participent à cette opération, a ainsi mis les choses au point concernant le degré d’implication des troupes américaines. «Nous ne voulons pas les exposer à des risques inutiles mais ils seront sur la ligne de front».

Eradiquer Abu Sayyaf

L’arrivée des troupes américaines, qui a l’assentiment de la présidente Gloria Arroyo, provoque un débat dans le pays même s’il a été précisé qu’il n’y aurait pas d’engagement immédiat de ces soldats sur le terrain. La présence de forces étrangères sur le territoire national pose un problème de nature constitutionnel. Le vice-président et ministre des Affaires étrangères, Teofisto Guingona, a d’ailleurs manifesté une certaine réticence face à cette opération en refusant de l’approuver avant la réunion d’un Conseil national de sécurité, qui doit avoir lieu la semaine prochaine pour étudier, avec l’opposition, tous les questions qu’elle pose. Pour justifier l’attitude du gouvernement, le ministre de la Défense, Angelo Reyes, a affirmé qu’il s’agissait d’une remise à jour du traité de défense mutuelle signé entre Manille et Washington en 1951. Ce document prenait en compte l’éventualité d’une agression extérieure alors qu’aujourd’hui, selon le ministre, la principale menace provient du terrorisme international. «Le terrorisme a frappé le territoire des Etats-Unis. Il peut frapper les provinces du sud des Philippines, aussi des mesures doivent être prises contre cette menace.»

Le groupe Abou Sayyaf, la cible clairement désignée par les Américains pour justifier leur intervention, fait partie des mouvements terroristes islamistes qui affichent leur fanatisme religieux. Il aurait, selon Washington, des liens directs avec Al-Qaïda, le réseau terroriste dirigé par Oussama Ben Laden, dont la trace a été perdue depuis la prise des caches situées dans les montagnes de Tora Bora, en Afghanistan, et qui pourrait s’être enfui de ce pays dès le début du mois de décembre en brouillant les pistes derrière lui [une information démentie par la CIA].

Abou Sayyaf s’est illustré depuis plusieurs années par ses prises d’otages occidentaux, de nombreux meurtres (décapitations, tortures) mais aussi des massacres de villageois dans les îles où ses membres ont élu domicile au sud du pays. Le groupe détient encore à l’heure actuelle un couple de missionnaires américains. Plusieurs milliers de soldats philippins sont engagés dans la lutte contre ces terroristes mais paraissent impuissants. Cachés dans la jungle, les membres d’Abu Sayyaf semblent hors d’atteinte. Le renfort apporté par les troupes américaines pourrait donc être décisif pour éliminer cette poche de résistance dont le gouvernement philippin n’a pas réussi à venir à bout.



par Valérie  Gas

Article publié le 18/01/2002