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Madagascar

Les médiateurs à pied d’oeuvre

Le bras-de-fer post électoral se poursuit entre l’opposant Marc Ravalomanana qui maintient son mot d’ordre de manifestations dans les rues, et le président Didier Ratsiraka qui se prépare pour le deuxième tour théoriquement prévu le 24 février. Mais les positions de chaque camp pourraient évoluer grâce aux efforts des différents médiateurs.
De notre correspondant à Madagascar

La scène se déroule samedi matin. Marc Ravalomanana est sur la route de Iavoloha. C’est là, dans le Palais présidentiel, qu’il se rend pour une entrevue avec son adversaire, le chef de l’État, Didier Ratsiraka. Le maire d’Antananarivo reçoit un coup de téléphone sur son portable. Au bout de la ligne, un de ses collaborateurs politiques, qui le convainc de ne pas aller au rendez-vous. Marc Ravalomanana décide donc de faire demi-tour. La rencontre avait été organisée par une délégation de 4 parlementaires francophones, venus pour une mission de bons offices. L’échec de la rencontre est un désaveu pour cette délégation qui quitte le sol malgache le samedi après-midi.

«J’étais prêt à le rencontrer, explique alors Marc Ravalomanana. Mais après sa déclaration d’hier (vendredi 8, NDLR),j’ai estimé que ce n’était plus nécessaire de dialoguer avec lui.» La veille, effectivement, Didier Ratsiraka n’avait pas ménagé ses propos vis-à-vis de son adversaire. Sans le nommer, il l’avait comparé à un «fasciste» et à un «nazi». Par ailleurs, le président candidat avait exclu toute idée de report de la date du deuxième tour.

Dès lors, les positions de chaque camp se sont radicalisées. Mais cela n’a pas empêché la poursuite des efforts de médiation. Avec l’entrée en scène d’une délégation de l’OUA (Organisation de l’unité africaine), emmenée par son secrétaire général, Amara Essy. «Je viens pour essayer de contribuer au dégel de la situation actuelle», déclare-t-il à sa descente d’avion le samedi après-midi. Et comme pour toute médiation, il faut d’abord consulter les différents protagonistes. C’est ainsi qu’Amara Essy et sa délégation s’entretiennent successivement avec le candidat Marc Ravalomanana, les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale, les responsables du Consortium des observateurs, les bailleurs de fonds, le corps diplomatique, les chefs des Églises chrétiennes, le Premier ministre et également, le président Didier Ratsiraka.

«Un des objectifs de notre mission, c’est la rencontre entre le maire et le président, afin que ce soit un signal fort pour les supporters des deux parties, a expliqué le «facilitateur» Amara Essy lors d’une conférence de presse, ce mardi. Ce sont des adversaires politiques, ce ne sont pas des ennemis.» Reste que les deux candidats ont du mal à changer leur position, au moins publiquement. Didier Ratsiraka poursuit sa campagne électorale pour le deuxième tour. Et Marc Ravalomanana déclare à ses partisans rassemblés par dizaines de milliers sur la Place du 13 Mai, que «nous ne nous préparons pas pour l’élection que les autres (le camp Ratsiraka, NDLR) préparent

Vers un report du deuxième tour ?

«Il n’y a pas de problème sans solution», martèle pourtant Amara Essy. Et de préconiser la tenue d’un deuxième tour. «Il faut que l'on mette en place toutes les conditions pour des garanties crédibles de transparence. Cela demande du temps. Donc de facto, cela nécessite un report du scrutin (…) J’ai le sentiment que personne n’est fermé à cette idée de report, pourvu qu’on suive les procédures légales.» Reporter la date du deuxième tour, seule la Haute cour constitutionnelle peut le décider. Reste qu’il faut persuader définitivement les candidats eux-mêmes et surtout leurs entourages, leurs partisans. En tout cas, l’OUA ouvre une voie pour une possible sortie de crise.

Et pour baliser encore davantage cette voie, d’autres médiateurs sont attendus, ce mercredi, sur la Grande Ile. On annonce l’arrivée d’un envoyé spécial de Kofi Annan, Ibrahima Fall, n°2 du Département des Affaires politiques de l'ONU. En renfort également, le ministre mauricien des Affaires étrangères, Anil Gayan, également président de la Commission de l’Océan Indien.

Cela fait beaucoup de bonnes volontés. Il faut dire que c’est l’avenir de Madagascar qui est en jeu, à court, moyen et long terme, au niveau national, régional et international.



par Olivier  Péguy

Article publié le 13/02/2002