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France: présidentielle 2002

Chaud bain de foule pour Chirac à Mantes-la-Jolie

Le président-candidat Jacques Chirac poursuit sa campagne sur le thème de l’insécurité. Lundi, entre vivats et quolibets, il s’est rendu dans la ville de Mantes-la-Jolie, symbole de la banlieue «chaude». Reportage.
Mantes-la-Jolie. A une quarantaine de kilomètres de Paris, dans le département des Yvelines, cette ville de quelque 44.000 habitants, en bord de Seine, est classée zone sensible. Le quartier de Val-Fourré a fait les gros titres de la presse, après des scènes d’émeutes entre jeunes et forces de l’ordre. Et c’est cette cité devenue l’emblème des problèmes de violence urbaine qu’a choisie le président-candidat Jacques Chirac pour sa troisième sortie de campagne, après Garges-les-Gonesse et Saint-Cyr-sur-Loire.

Gare RER de Mantes-la-Jolie. En ce début d’après midi printanier, les usagers du train de banlieue n’en reviennent pas. L’accès à la gare connaît une fébrilité inhabituelle. Derrière le bureau de police jouxtant la gare et face à la voie, Jacques Chirac se fait expliquer, devant une foule de journalistes, les difficultés d’assurer la sécurité dans les transports. C’est d’ailleurs le thème de sa campagne ce lundi. Interloqués, certains passagers du RER le saluent. Bon prince, Jacques Chirac renvoie le salut de la main. «Bon courage», lui lance une dame. Mais un automobiliste, qui traverse le pont, est moins révérencieux. Klaxonnant, il crie : «Chirac voleur!» et poursuit sa route sans demander son reste.

Le cortège prend ensuite la direction de Val-Fourré où les journalistes sont invités à garer leurs véhicules dans un parking sécurisé. En clair, sous protection policière. Invité par le maire RPR Pierre Bédier, Jacques Chirac est attendu à la mairie de ce quartier chaud. L’annonce de la venue présidentielle a fait le tour de la ville comme une traînée de poudre. Les jeunes et les moins jeunes affluent. «Il arrive par où ?» lance une jeune fille. Déjà, on joue des coudes et enfin, le bus dans lequel a pris place le candidat, arrive sous les acclamations. «Chirac, Chirac!». L’ambiance est bon enfant, les services de sécurité sont stressés. C’est le premier «vrai» bain de foule depuis le début de la campagne chiraquienne. On court chercher les appareils photos dans l’immeuble voisin. Dans la cohue, le candidat serre des mains à tour de bras, sourit. Un mot par ci, un sourire par là.

«Terrasser le dragon»

Dans la foule, Moussa, treize ans, crie: «Hé Supermenteur, t’as oublié ta cape!», en référence à la marionnette des Guignols de l’Info, l’émission satirique de Canal Plus. «C’est un truand mais je l’aime bien», clame un autre adolescent, juché sur un vélo pour ne rien rater. Une femme parait émue : «Ca me fait bizarre, il est beau. Je ne l’avais jamais vu en vrai».

Après la mairie, direction le centre culturel Charlie Chaplin, place Mendès-France, à quelques mètres de là. Il faudra près d’un quart d’heure pour faire le chemin inverse, sous les vivats. Une réunion de travail sur la sécurité dans les transports attend le candidat. Autour de la table, des usagers des transports, des responsables de la sécurité, un chauffeur de taxi. Tous racontent leur quotidien, tous expriment leurs inquiétudes.

«Il faut lutter contre l’impunité, c’est le seul moyen de lutter contre la délinquance», leur répond Jacques Chirac. «Il n’y a pas de fatalité à ce que les gens soient agressés», poursuit-il affirmant, dans une pique à la gauche, qu’une partie des responsables de la vie publique «ont développé une culture du laxisme, de la permissivité». Dans un vibrant hommage à ceux «qui sont confrontés directement à ces problèmes d’insécurité», Jacques Chirac estime qu’ils «sont un peu comme les gladiateurs dans les jeux de cirque, dépourvus des moyens réels de terrasser le dragon».

Des cris à l’extérieur viennent troubler le débat. Des enfants sont massés dehors et interpellent bruyamment Jacques Chirac. Un organisateur propose poliment de fermer la fenêtre, restée ouverte pour rafraîchir la température ambiante. Chirac décline en riant: «ce ne sont que des enfants!».

Mais l’issue de cette journée sera moins riante et plus tendue pour le candidat du RPR. Des dizaines de jeunes, à peine adolescents pour la plupart, l’attendent devant les portes du centre culturel Charlie Chaplin depuis maintenant plus de deux heures. Ils l’accueillent à sa sortie par des slogans peu élogieux: «Chirac, voleur, Chirac, menteur!», «On n’a plus de pièces jaunes!» ou «Vive Schuller!». Une bousculade s’ensuit. Les jeunes franchissent allégrement les barrières de sécurité. On court dans tous les sens. Des crachats volent. Les services de sécurité font écran. Le véhicule monospace du candidat RPR n’est pas épargné par les jets de salive. On presse le pas. La journée du candidat Chirac à Mantes-la-Jolie est terminée.



par Sylvie  Berruet

Article publié le 05/03/2002