France: présidentielle 2002
Jean-Marie Le Pen peine à recueillir les 500 signatures
Jean-Marie Le Pen risque de ne pas pouvoir se présenter à l’élection présidentielle. C’est du moins ce que le candidat du Front national (FN) affirme, dans le quotidien Le Figaro du 7 mars. Il a déclaré que s’il n’obtient pas les 500 parrainages d’élus nécessaires pour participer à l’élection présidentielle d’avril prochain, cela «causerait la chute de la maison Chirac». L’analyse de Stéphane Rozès, politologue et directeur de l’institut de sondage CSA.
RFI : Il y a quelques semaines, Jean-Marie Le Pen avait annoncé avoir les 500 signatures requises pour se présenter à l’élection présidentielle. Pourquoi déclare-t-il aujourd’hui ne plus les avoir ?
Stéphane Rozès : Je présume : comme souvent dans ce genre de cas, qu’il y a sans doute eu des phénomènes de mauvaises remontées du terrain de la part des personnes chargées de collecter pour Jean-Marie Le Pen ses 500 signatures. Je crois qu’il n’a pas procédé uniquement de façon militante pour faire remonter ses parrainages (ndlr : des rémunérations étaient proposées à ceux qui lui rapporteraient des signatures). D’autre part, il y a sans doute eu des phénomènes de rétractation de maires ayant pu, dans un premier temps, donner leur accord pour ensuite se rétracter. Je pense qu’il en est pour Jean-Marie Le Pen comme il en est pour les autres candidats : chaque formation politique souhaite pouvoir contrôler, maîtriser ce que font leurs représentants au niveau local. En fait, le vivier pour les candidats des petites formations politiques, c’est plutôt soit les élus divers-droite, soit ceux de divers-gauche sans attache partisane forte.
RFI : Si Jean-Marie Le Pen ne participe pas à la course à l’Elysée, quelles vont être les conséquences dans la campagne ?
SR : Les conséquences seront forcément quantitativement importantes. Jean-Marie Le Pen, dans les intentions de vote, représente 10% des électeurs. Si le président du Front national n’accédait pas à l’offre politique, ces 10% seraient répartis entre l’abstention et l’éclatement vers d’autres candidats. Ce que l’on sait, c’est que les électeurs d’extrême-droite, parmi ceux qui s’exprimeraient, il y aurait sans doute deux tiers d’entre eux qui voteraient pour la droite et un tiers pour la gauche. Cette situation profiterait, à droite, à Jacques Chirac de façon importante, mais aussi à Alain Madelin, à Charles Pasqua et évidemment à Bruno Mégret, si ce dernier recueille les 500 signatures.
RFI : Cette procédure électorale favorise-t-elle la démocratie ?
SR : Il en est de cette procédure comme des modes de scrutin. Il faut trouver un équilibre entre des contraires. Depuis 1981, des législateurs ont appliqué cette nouvelle procédure pour écarter des candidatures baroques et originales. A l’époque et encore aujourd’hui, il s’agit de trouver un juste équilibre entre le fait de permettre à des représentants d’accéder au vote et d’empêcher, d’un autre côté, des candidatures burlesques. En 1981, Jean-Marie Le Pen et Alain Krivine (Ligue communiste révolutionnaire) n’ont pas obtenu les 500 signatures et n’ont donc pas pu se présenter à l’élection présidentielle. Ce qui est vrai, c’est que pour les formations d’extrême-droite comme pour celles d’extrême-gauche, alors même qu’elles peuvent représenter une sensibilité dans le pays, cette procédure est lourde et handicapante. Par exemple, on sait aujourd’hui qu’Arlette Laguiller (Force ouvrière) a sans doute ses signatures, on n’est pas forcément certain qu’Olivier Besancenot (Ligue communiste révolutionnaire) aura les siennes au même titre que Bruno Mégret (Mouvement national républicain).
RFI : Si Jean-Marie Le Pen est hors course, est-ce une bonne nouvelle pour Jacques Chirac ?
SR : Dans un premier temps, cela peut être une bonne nouvelle pour Jacques Chirac parce que Jean-Marie Le Pen, ces dernières semaines, a fait du président sortant son ennemi principal. Mais Jacques Chirac pourra compter sur la force de nuisance de Jean-Marie Le Pen, par tous les moyens, pour essayer de peser sur le cours des élections, sans être candidat.
RFI : En admettant que Jacques Chirac sera au second tour, pensez-vous que les votes du FN se porteront sur le président sortant ?
SR : Aujourd’hui, quand les instituts de sondage établissent les intentions de vote au second tour, un tiers des électeurs de Jean-Marie Le Pen, au premier tour, refusent de donner une intention de vote au second, et parmi ceux qui acceptent de répondre, les deux tiers se reportent sur Jacques Chirac et un tiers sur Lionel Jospin. C’est quand même un comportement, qui pour l’heure, favorise plutôt Jacques Chirac au second tour que Lionel Jospin. Autant un électorat d’extrême-droite peut voter pour Jean-Marie Le Pen en instrumentalisant ce dernier pour exprimer un mécontentement, autant je pense qu’ils sont assez peu, quantitativement, à voter Jean-Marie Le Pen pour battre Jacques Chirac.
Stéphane Rozès : Je présume : comme souvent dans ce genre de cas, qu’il y a sans doute eu des phénomènes de mauvaises remontées du terrain de la part des personnes chargées de collecter pour Jean-Marie Le Pen ses 500 signatures. Je crois qu’il n’a pas procédé uniquement de façon militante pour faire remonter ses parrainages (ndlr : des rémunérations étaient proposées à ceux qui lui rapporteraient des signatures). D’autre part, il y a sans doute eu des phénomènes de rétractation de maires ayant pu, dans un premier temps, donner leur accord pour ensuite se rétracter. Je pense qu’il en est pour Jean-Marie Le Pen comme il en est pour les autres candidats : chaque formation politique souhaite pouvoir contrôler, maîtriser ce que font leurs représentants au niveau local. En fait, le vivier pour les candidats des petites formations politiques, c’est plutôt soit les élus divers-droite, soit ceux de divers-gauche sans attache partisane forte.
RFI : Si Jean-Marie Le Pen ne participe pas à la course à l’Elysée, quelles vont être les conséquences dans la campagne ?
SR : Les conséquences seront forcément quantitativement importantes. Jean-Marie Le Pen, dans les intentions de vote, représente 10% des électeurs. Si le président du Front national n’accédait pas à l’offre politique, ces 10% seraient répartis entre l’abstention et l’éclatement vers d’autres candidats. Ce que l’on sait, c’est que les électeurs d’extrême-droite, parmi ceux qui s’exprimeraient, il y aurait sans doute deux tiers d’entre eux qui voteraient pour la droite et un tiers pour la gauche. Cette situation profiterait, à droite, à Jacques Chirac de façon importante, mais aussi à Alain Madelin, à Charles Pasqua et évidemment à Bruno Mégret, si ce dernier recueille les 500 signatures.
RFI : Cette procédure électorale favorise-t-elle la démocratie ?
SR : Il en est de cette procédure comme des modes de scrutin. Il faut trouver un équilibre entre des contraires. Depuis 1981, des législateurs ont appliqué cette nouvelle procédure pour écarter des candidatures baroques et originales. A l’époque et encore aujourd’hui, il s’agit de trouver un juste équilibre entre le fait de permettre à des représentants d’accéder au vote et d’empêcher, d’un autre côté, des candidatures burlesques. En 1981, Jean-Marie Le Pen et Alain Krivine (Ligue communiste révolutionnaire) n’ont pas obtenu les 500 signatures et n’ont donc pas pu se présenter à l’élection présidentielle. Ce qui est vrai, c’est que pour les formations d’extrême-droite comme pour celles d’extrême-gauche, alors même qu’elles peuvent représenter une sensibilité dans le pays, cette procédure est lourde et handicapante. Par exemple, on sait aujourd’hui qu’Arlette Laguiller (Force ouvrière) a sans doute ses signatures, on n’est pas forcément certain qu’Olivier Besancenot (Ligue communiste révolutionnaire) aura les siennes au même titre que Bruno Mégret (Mouvement national républicain).
RFI : Si Jean-Marie Le Pen est hors course, est-ce une bonne nouvelle pour Jacques Chirac ?
SR : Dans un premier temps, cela peut être une bonne nouvelle pour Jacques Chirac parce que Jean-Marie Le Pen, ces dernières semaines, a fait du président sortant son ennemi principal. Mais Jacques Chirac pourra compter sur la force de nuisance de Jean-Marie Le Pen, par tous les moyens, pour essayer de peser sur le cours des élections, sans être candidat.
RFI : En admettant que Jacques Chirac sera au second tour, pensez-vous que les votes du FN se porteront sur le président sortant ?
SR : Aujourd’hui, quand les instituts de sondage établissent les intentions de vote au second tour, un tiers des électeurs de Jean-Marie Le Pen, au premier tour, refusent de donner une intention de vote au second, et parmi ceux qui acceptent de répondre, les deux tiers se reportent sur Jacques Chirac et un tiers sur Lionel Jospin. C’est quand même un comportement, qui pour l’heure, favorise plutôt Jacques Chirac au second tour que Lionel Jospin. Autant un électorat d’extrême-droite peut voter pour Jean-Marie Le Pen en instrumentalisant ce dernier pour exprimer un mécontentement, autant je pense qu’ils sont assez peu, quantitativement, à voter Jean-Marie Le Pen pour battre Jacques Chirac.
par Propos recueillis par Clarisse VERNHES
Article publié le 07/03/2002