Italie
Assassinat d’un expert du travail
Marco Biagi, un collaborateur clé du ministre du Travail Roberto Maroni (Ligue du Nord), a été assassiné mardi soir à Bologne, très probablement par un groupe de «terroristes irréductibles» des Brigades rouges. Comme en 1999, lorsque Massimo D’Antona avait été littéralement «exécuté» à Rome dans des circonstances presque identiques.
Le terrorisme politique d’extrême gauche n’est pas mort en Italie. Un économiste italien travaillant pour le ministère du Welfare (Travail), Marco Biagi, a été tué mardi soir à Bologne de deux balles dans la nuque, alors qu’il s’apprêtait à rentrer chez lui. Peu connu du grand public, Marco Biagi était très apprécié par les différents ministres - de droite comme de gauche - qui se sont succédé à la tête d’un ministère aux prises avec une reforme aussi délicate que celle du droit de travail. Et c’est sans doute pour son travail autour de la flexibilité - et donc du droit de licencier - qu’il est vite devenu une cible presque naturelle de certains groupes extrémistes se réclamant toujours des Brigades Rouges (BR-PCC), qui ont revendiqué il y a près de trois ans un assassinat qui ressemble comme une goutte à celui de Marco Biagi.
Le 20 mai 1999 en effet, Massimo D’Antona, un autre consultant du ministre du Travail de l’époque - Antonio Bassolino, centre-gauche - avait été assassiné à Rome. Cette «exécution» avait été aussitôt revendiquée par une «cellule brigadiste» des BR-PCC, l’un des groupes qui n’a jamais abandonné la lutte armée lancée aux débuts des années 70, et qui continue de privilégier des actions terroristes de type «ouvriériste» visant à éliminer les responsables du «pacte social néo-corporatiste» qui lie, à ses yeux, les syndicats, les partis traditionnels et le gouvernement. D’autres groupes de «terroristes irréductibles» se réclamant eux aussi des Brigades Rouges se sont manifestés, notamment durant la guerre du Kosovo, par des attentats visant les bases de l’OTAN situées dans le nord de l’Italie, mais sans aller jusqu’à des assassinats.
Les terroristes étaient bien renseignés
Comme dans le passé, cette nouvelle action terroriste est directement liée au climat social et politique qui prévaut actuellement en Italie. Le débat qui oppose depuis des mois le gouvernement de Silvio Berlusconi aux trois centrales syndicales italiennes (CGIL, CISL et UIL) porte sur la modification d’un important article de la constitution, permettant aux entreprises de licencier presque sans aucune contrainte. Cette modification constitutionnelle a d’abord fait l’objet d’une longue concertation entre le gouvernement et les syndicats ; mais Silvio Berlusconi a finalement décidé de passer outre et de ne pas tenir compte de l’opposition des syndicats, qui, en dépit de leurs divisions, ont lancé un mot d’ordre de grève générale pour le mois prochain.
Mais l’assassinat de Marco Biagi a aussi relancé la polémique à propos de la décision du gouvernement de Berlusconi de supprimer certaines escortes des éventuelles cibles des organisations mafieuses ou terroristes. Tout récemment Marco Biagi s’était plaint auprès de certains amis, parce qu’il continuait d’être constamment protégé lors de ses séjours à Rome ou à Milan, mais pas lorsqu’il rentrait chez lui à Bologne. Ce qui laisse supposer que les terroristes qui ont perpétré cet assassinat étaient bien renseignés non seulement sur le rôle exact joué par Biagi au ministère du Welfare, mais aussi sur ses déplacements officiels et personnels.
Ce nouvel acte terroriste a provoqué un grand émoi en Italie. Le ministre de l’Intérieur a aussitôt écourté son séjour aux Etats-Unis pour s’adresser au Parlement, où il a dû faire face à une opposition de centre-gauche déterminée à dénoncer le fait que ce type d’assassinat était plus que prévisible : en effet, le dernier rapport officiel des services de sécurité parlait explicitement des «cibles» suivantes : «les personnalités du milieu politique, syndical et patronal le plus engagées dans les reformes économiques et sociales et du marché du travail, et tout particulièrement celles ayant un rôle clé en tant que techniciens ou consultants».
C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a une semaine seulement, le numéro deux du ministère du travail avait demandé explicitement aux journalistes italiens de ne plus citer le nom de Marco Biagi dans leurs articles consacrés à la réforme du droit de travail en cours. Et surtout de ne pas écrire que c’était lui le principal artisan de la nouvelle rédaction de l’article de la constitution consacré au droit de travail.
Le 20 mai 1999 en effet, Massimo D’Antona, un autre consultant du ministre du Travail de l’époque - Antonio Bassolino, centre-gauche - avait été assassiné à Rome. Cette «exécution» avait été aussitôt revendiquée par une «cellule brigadiste» des BR-PCC, l’un des groupes qui n’a jamais abandonné la lutte armée lancée aux débuts des années 70, et qui continue de privilégier des actions terroristes de type «ouvriériste» visant à éliminer les responsables du «pacte social néo-corporatiste» qui lie, à ses yeux, les syndicats, les partis traditionnels et le gouvernement. D’autres groupes de «terroristes irréductibles» se réclamant eux aussi des Brigades Rouges se sont manifestés, notamment durant la guerre du Kosovo, par des attentats visant les bases de l’OTAN situées dans le nord de l’Italie, mais sans aller jusqu’à des assassinats.
Les terroristes étaient bien renseignés
Comme dans le passé, cette nouvelle action terroriste est directement liée au climat social et politique qui prévaut actuellement en Italie. Le débat qui oppose depuis des mois le gouvernement de Silvio Berlusconi aux trois centrales syndicales italiennes (CGIL, CISL et UIL) porte sur la modification d’un important article de la constitution, permettant aux entreprises de licencier presque sans aucune contrainte. Cette modification constitutionnelle a d’abord fait l’objet d’une longue concertation entre le gouvernement et les syndicats ; mais Silvio Berlusconi a finalement décidé de passer outre et de ne pas tenir compte de l’opposition des syndicats, qui, en dépit de leurs divisions, ont lancé un mot d’ordre de grève générale pour le mois prochain.
Mais l’assassinat de Marco Biagi a aussi relancé la polémique à propos de la décision du gouvernement de Berlusconi de supprimer certaines escortes des éventuelles cibles des organisations mafieuses ou terroristes. Tout récemment Marco Biagi s’était plaint auprès de certains amis, parce qu’il continuait d’être constamment protégé lors de ses séjours à Rome ou à Milan, mais pas lorsqu’il rentrait chez lui à Bologne. Ce qui laisse supposer que les terroristes qui ont perpétré cet assassinat étaient bien renseignés non seulement sur le rôle exact joué par Biagi au ministère du Welfare, mais aussi sur ses déplacements officiels et personnels.
Ce nouvel acte terroriste a provoqué un grand émoi en Italie. Le ministre de l’Intérieur a aussitôt écourté son séjour aux Etats-Unis pour s’adresser au Parlement, où il a dû faire face à une opposition de centre-gauche déterminée à dénoncer le fait que ce type d’assassinat était plus que prévisible : en effet, le dernier rapport officiel des services de sécurité parlait explicitement des «cibles» suivantes : «les personnalités du milieu politique, syndical et patronal le plus engagées dans les reformes économiques et sociales et du marché du travail, et tout particulièrement celles ayant un rôle clé en tant que techniciens ou consultants».
C’est d’ailleurs pour cela qu’il y a une semaine seulement, le numéro deux du ministère du travail avait demandé explicitement aux journalistes italiens de ne plus citer le nom de Marco Biagi dans leurs articles consacrés à la réforme du droit de travail en cours. Et surtout de ne pas écrire que c’était lui le principal artisan de la nouvelle rédaction de l’article de la constitution consacré au droit de travail.
par Elio Comarin
Article publié le 20/03/2002