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Proche-Orient

L’initiative saoudienne au cœur du sommet

Les chefs d'État arabes se réunissent pour deux jours à Beyrouth, les 27 et 28 mars, au moment où le Proche-Orient traverse une zone de fortes turbulences, secoué par un cycle infernal de violences dans les Territoires Palestiniens et trouble par les menaces américaines d'une prochaine campagne militaire contre l'Irak. Avec un grand absent: Yasser Arafat, toujours confiné à Ramallah.
De notre envoyé spécial à Beyrouth

«Les Arabes veulent la paix !». Sur Future, la chaîne de télévision du Premier ministre libanais, Rafic Hariri, ce slogan conclut une compilation d'images de la répression israélienne dans les Territoires palestiniens qui défilent en boucle. A l'instar de cette campagne médiatique choc, le 14ème sommet a bien l'intention de démontrer à la communauté internationale et à Israël que les pays arabes sont favorables à une solution pacifique du conflit israélo-arabe. Amr Moussa, le secrétaire général de la Ligue Arabe, a déjà donné le ton : soit la région se dirige vers «la justice, la paix et le progrès», soit elle sombre dans «le chaos total et une escalade dans la confrontation avec des conséquences imprévisibles».

Dans ce contexte, les idées proposées par le prince Abdallah d'Arabie Saoudite, prévoyant un retrait complet des territoires arabes occupés par Israël en échange d'une normalisation totale, constitue actuellement la seule planche de salut diplomatique crédible dans le camp arabe.

«L'initiative saoudienne sera au cœur des débats, commente un diplomate européen. Les idées d'Abdallah devraient être reformulées et adoptées par consensus pour devenir la vision arabe de la paix. Elle permettra de réaffirmer des engagements politiques vis-à-vis d´Israël et de détendre l´atmosphère. Elle aura aussi pour conséquence de placer l'État hébreu devant ses responsabilités.» Pour les pays arabes modérés, «le message doit être clair et directement adressé à l´opinion publique israélienne», poursuit ce diplomate.

Yasser Arafat, le grand absent

Mais pour cela, encore faudra-il que les leaders Arabes accordent leurs violons. Car la mise au point du projet de déclaration finale par les ministres des Affaires étrangères a d'ores et déjà révélé des divergences de vue entre les pays arabes modérés, comme l'Égypte, l'Arabie Saoudite et la Jordanie, d'une part, la Syrie et le Liban d'autre part. Ces deux derniers pays estiment qu'une certaine ambiguïté entoure l'initiative saoudienne, notamment sur le droit au retour des réfugiés palestiniens. Le Liban refuse toute implantation définitive de ces réfugiés sur son territoire. Selon Beyrouth, l'intégration des Palestiniens, dont l'écrasante majorité appartient à la branche sunnite de l'islam, pourrait remettre en cause l'équilibre confessionnel du pays. Quant à la Syrie, qui n'a jamais apprécié le terme de «normalisation», elle redoute d'être isolée, d'autant plus que les idées de Ryad ne mentionnent pas explicitement le retrait israélien du Golan occupé. Un «oubli» que le prince Abdallah a rectifié, mais qui a semé le trouble à Damas.

De leur côté, les pays arabes modérés considèrent que l'initiative de paix saoudienne est un cadre global qui permettra ensuite à chaque pays concerné de régler cette question des réfugiés. Les modérés sont donc favorables à une formulation réaliste et pragmatique, tout en reconnaissant la validité de la résolution 194 des Nations unies prévoyant un retour et/ou une compensation financière pour les réfugiés palestiniens.

Le projet de résolution finale qui sera soumis aux chefs d'État arabes reprend à son compte cette résolution de l'ONU et «salue la résistance du peuple palestinien, son héroïque Intifada ainsi que sa direction légitime et nationale dirigée par Yasser Arafat.» Mais pour la première fois, le chef de l'Autorité palestinienne ne sera pas physiquement présent à un sommet arabe. Ariel Sharon, le Premier ministre israélien, a en effet estimé que le leader palestinien n'avait pas rempli les conditions qu'il avait posé pour participer à cette réunion, malgré d'intenses pressions américaines et européennes. La délégation palestinienne sera donc présidée par Farouk Qaddoumi, le responsable du département politique de l'OLP. Toutefois, Yasser Arafat devrait s'adresser à ses pairs arabes via des moyens satellitaires de visioconférence depuis son QG de Ramallah.

A écouter aussi :
Javier Solana
Le rôle de l'Europe au Proche-Orient, au micro de Frédéric Domont. (27/03/2002)



par Christian  Chesnot

Article publié le 26/03/2002