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Proche-Orient

Le plan saoudien adopté malgré tout

Après une première journée de confusion et d'accrocs, les 22 Etats arabes ont adopté à l'unanimité l'initiative de paix proposée par le prince Abdallah d'Arabie Saoudite. Ce 14ème sommet arabe a été aussi le théâtre d'un spectaculaire rapprochement entre l'Irak et le Koweit.
De notre envoyé spécial à Beyrouth

L'initiative de paix saoudienne a finalement accouché mais dans la douleur. Un analyste politique libanais parlant même de «d'accouchement par césarienne». Car le premier jour de ce sommet arabe fut marqué par une incroyable confusion. La presse arabe a d'ailleurs eu la dent dure contre les chefs d'Etat et de gouvernement réunis dans la capitale libanaise. L'hebdomadaire jordanien The Star qualifiant le sommet de «fiasco politique extraordinaire» tandis que le quotidien libanais Al-Nahar constatait que «l'absence des présidents égyptien Hosni Moubarak et palestinien Yasser Arafat, et du roi de Jordanie Abdallah II a porté un coup au sommet (...) et le retrait de la délégation palestinienne a semé la confusion.»

Finalement, les Palestiniens sont revenus à la table de la conférence après une nuit de médiations. Farouk Qaddoumi, chef du département politique de l'OLP, a pu donc lire le discours de Yasser Arafat avec lequel il s'est entretenu par téléphone. Le président palestinien a fait savoir à ses pairs arabes que l'armée israélienne avait massé environ 150 chars autour de Ramallah et qu'il s'attendait à «une opération israélienne d'envergure dans les prochaines heures, et ce, malgré la présence de Zinni», l'envoyé spécial américain.

«Yasser Arafat a bien fait de ne pas venir»

Mais au final, les Arabes ont adopté à l'unanimité l'initiative de paix saoudienne. Tous ont voté pour, y compris l'Irak ou encore la Libye. Celle-ci prévoit l'instauration de «relations normales» entre Israël et le monde arabe ainsi que la garantie de la sécurité pour l'Etat hébreu, en échange du retrait de l'armée israélienne de tous les territoires arabes occupés et du retour des réfugiés palestiniens. «Les Arabes sont repartis dans la bonne direction», commente Nabil Al-Chérif, rédacteur en chef du quotidien jordanien Al-Doustour. «Les idées du prince Abdallah sont devenues une initiative de paix pan-arabe proposée à Israël et montrent clairement que les Arabes sont favorables à une solution pacifique. Car aujourd'hui, il ne reste plus que deux options : celle de la paix ou celle de la guerre. Les prochaines semaines seront cruciales.» Regrettant l'attentat-suicide de Netanyia, Nabil Al-Chérif, note rétrospectivement que «Yasser Arafat a bien fait de ne pas venir à Beyrouth, car après ce drame, Ariel Sharon ne l'aurait certainement pas autorisé à revenir à Ramallah.»

La résolution finale réaffirme que «la paix est une option stratégique» pour les Arabes. Radwan Abou Ayash, le président de la Télévision et Radio Palestinienne, estime de son côté que «l'adoption de l'initiative de paix saoudienne pousse Israël dans ses retranchements et que la balle est désormais dans son camp.» «Certes, poursuit-il, les résultats du sommet apparaissent en décalage avec la situation sur le terrain et la déclaration finale n'appelle pas à l'envoi d'une force internationale, mais les Arabes ont dit aux Israéliens qu'ils voulaient la paix, mais que l'option de la confrontation était toujours aussi possible.»

Enfin sur une autre sujet sensible, l'accolade entre le chef de la délégation irakienne, Ezzat Ibrahim, et le prince saoudien Abdallah aura été l'une des images fortes de ce sommet. Par ce geste symbolique, l'Irak montre sa volonté de réconciliation avec les monarchies du Golfe. D'aurant plus que dans un discours très remarqué, Ezzat Ibrahim a déclaré que l'Irak s'engageait à «respecter la souveraineté du Koweït, son indépendance, sa stabilité au sein de ses frontières reconnues internationalement.» Dans le texte du communiqué final, intitulé «la Déclaration de Beyrouth», la reconnaissance irakienne du Koweït «garantira d'éviter tout ce qui a pourrait mener à une répétition des événements de 1990», qui avait conduit à l'occupation du Koweït par les troupes de Saddam Hussein.



par Christian  Chesnot

Article publié le 28/03/2002